Une nouvelle vague contre la pollution des déchets plastiques
Si l'on a assisté à un déni, puis au renvoi régulier de la responsabilité sur l'autre (le consommateur, assez souvent), les temps sont peut être en train de changer : la filière mondiale se manifeste, marque un grand coup et assure sa défense face à l'offensive. Une trentaine de multinationales de la pétrochimie, du traitement, du recyclage et des biens de grande consommation ont annoncé aujourd'hui 16 janvier, la création d'une alliance prête à mobiliser des fonds pour trouver des solutions d'élimination des déchets plastiques : End Plastic Waste (Alliance pour l'élimination des déchets plastiques) regroupe à ce jour BASF, Berry Global, Braskem, Chevron Phillips Chemical Company LLC, Clariant, Covestro, CP Group, Dow, DSM, ExxonMobil, Formosa Plastics Corporation USA, Henkel, LyondellBasell, Mitsubishi Chemical Holdings, Mitsui Chemicals, NOVA Chemicals, OxyChem, Procter & Gamble, Reliance Industries, SABIC, Sasol, Shell, Suez, SCG Chemicals, Sumitomo Chemical, Total, Veolia et Versalis (Eni).
Avec ces fonds, un milliard de dollars d'engagement promis dans un premier temps, et jusqu'à 1,5 milliard d'ici cinq ans, l'Alliance veut notamment participer au financement d'initiatives déjà existantes, selon des communiqués de plusieurs groupes impliqués. Conctètement, elle privilégiera quatre types d'interventions essentielles, parfois au travers du soutien à des programmes déjà en cours : le développement d'infrastructures de traitement des déchets, l'innovation en matière de recyclage, l'éducation et le nettoyage des lieux déjà très pollués.
Elle cite notamment le projet STOP en Indonésie, qui travaille avec les villes pour réduire le rejet de plastiques dans l'environnement, ou encore l'ONG Renew Oceans, qui tente de récupérer les déchets plastiques dans les dix grandes rivières les plus polluées par ces déchets, dont huit sont en Asie. Plus largement, elle cherchera à nouer des partenariats avec les grandes villes, en particulier celles dépourvues d'infrastructures, pour améliorer leur gestion des déchets.
Les multinationales impliquées souhaitent développer un projet d'information scientifique ouvert ("open source") avec des institutions universitaires pour améliorer la collecte d'informations et le développement de méthode de gestion pour aider les gouvernements à éviter le déversement de plastiques dans l'environnement. "Il s'agit d'un défi mondial complexe et grave qui nécessite une action rapide et un fort leadership. Cette nouvelle alliance constitue l'initiative la plus vaste à date visant à mettre fin aux déchets plastiques dans l'environnement", a exposé le président de cette nouvelle entité, David Taylor, PDG de Procter and Gamble, dans un communiqué.
L'ONU avance 8 à 12 millions de tonnes qui finiraient en mers, chaque année ; l'instance internationale estime que si la tendance se poursuit il y aura plus de plastiques que de poissons dans les océans à l'horizon 2050 étant entendu que dans ces tonnages, le plastique à usage unique (bouteilles, bouchons, emballages alimentaires, sacs de supermarché, couvercles, pailles, les touilleurs et autres récipients pour alimentation à emporter) occuperait la pole position. On estime aussi que le recyclage des plastiques produits est inférieur à 10% à l'échelle mondiale, tandis que l'incinération s'évalue à 12%, selon ce rapport de l'ONU publié l'an dernier : quid du "reste" ; tel est le problème.
"En contribuant à l'allègement des matériaux, les plastiques améliorent l'efficacité énergétique des produits de notre quotidien et permettent de réduire nos émissions de CO2. Il est cependant critique d'améliorer la gestion de leur fin de vie pour faire en sorte qu'ils ne se retrouvent plus dans l'environnement", a déclaré Bernard Pinatel, directeur général Raffinage-Chimie de Total et membre du comité exécutif de l'Alliance.