UE : les pesticides font débat à Strasbourg
Utilisés pour protéger les végétaux contre divers parasites, les pesticides ont considérablement transformé l’agriculture européenne ; pourtant, ils sont souvent décriés pour leur impact néfaste sur la santé et l’environnement. Fin octobre, 3 rapports sur ce sujet ont justement été examinés dans l’hémicycle à Strasbourg : le premier traite de la stratégie politique générale quant à l’utilisation de pesticides, le second de leur autorisation de mise sur le marché, et le troisième de leur utilisation. Tout un programme...
Le terme "pesticide" recouvre toute substance ou mélange de substances permettant de détruire ou altérer le cycle de vie d’organismes vivants nuisibles pour les plantes, comme les champignons, les insectes ou les bactéries. On comprend l’intérêt gigantesque des pesticides pour une agriculture se voulant intensive : en protégeant les champs de divers parasites, la quantité des récoltes est accrue ; les terres peuvent être exploitées de manière extensive et requièrent moins de travail. De plus, les pesticides diminuent les coûts et rendent le transport et l’approvisionnement plus aisés.
Mais parce qu’ils agissent sur des organismes vivants, les pesticides ont des effets souvent néfastes pour d’autres plantes ou organismes vivants, et même pour la santé humaine. On trouve des traces de pesticides dans les sols, l’air et l’eau (une étude estime qu'en France, 90% des rivières et 50% des nappes phréatiques sont contaminées), ainsi que des résidus dans la nourriture. Plusieurs études scientifiques ont ainsi démontré que, même à de faibles taux de concentration, certains pesticides altèrent la production d’hormones du système endocrinien, sont cancérigènes ou modifient les gènes.
Face à ce constat, l’UE a décidé de modifier sa législation et notamment d’encourager la réduction de l’utilisation des pesticides. Les députés européens se prononceront donc définitivement très bientôt sur 3 aspects de cet épineux dossier :
Une stratégie thématique concernant l'utilisation durable de ces substances
Le rapport de la députée slovaque Irena Belohorska se prononce positivement sur la stratégie présentée par la Commission européenne en 2006. Il appelle cependant les Etats membres à promouvoir une agriculture consommant moins de pesticides, et donnant la priorité aux alternatives non chimiques. De même, le rapport soutient des objectifs chiffrés nationaux de réduction de l'utilisation de pesticides, seuls à même d'inciter les Etats membres à agir.
Des autorisations de mise sur le marché plus rapides... mais plus strictes !
Avant de mettre sur le marché un nouveau pesticide, une procédure d'autorisation en 2 étapes devra avoir lieu : les substances actives devront être autorisées au niveau européen, et les produits commerciaux au niveau national. Les députés soutiennent aussi l’interdiction des substances génotoxiques (qui modifient les gènes), carcinogènes (qui provoquent le cancer), toxiques pour la reproduction ou comportant des effets perturbateurs du système endocrinien.
Réduire l’usage des pesticides dans l’agriculture
Comment utiliser de manière durable et responsable les pesticides ? Dans le rapport de Christa Klass (PPE-DE), les députés pourraient s’accorder sur un objectif européen chiffré de réduction de leur utilisation : 25% de réduction d’ici à 5 ans, 50% d’ici à 10 ans. De plus, la Commission Environnement s’est déjà prononcée en faveur d’une interdiction de l’épandage aérien des pesticides, à cause du risque pour les environnements sensibles et les zones peuplées. Enfin, des "zones tampon" seraient crées autour de certains cours d’eau, dans lesquelles les pesticides ne pourraient être utilisés ou stockés.
Il reste maintenant à espérer que, suite à ces débats et échanges, les députés sauront prendre les décisions qui s'imposent afin de protéger les citoyens européens qu'ils représentent : on ne badine pas avec les questions de santé publique !