Trafigura : les droits de l'homme se rebiffent...
La semaine dernière, un tribunal anglais a pris acte de l’accord intervenu le 20 septembre dernier entre la société Trafigura et le cabinet Leigh Day & Co (voir notre article), qui représente près de 31 000 victimes ivoiriennes du déversement de déchets toxiques par le Probo Koala, à Abidjan en août 2006. Dans un communiqué, la FIDH (Fédération internationale des droits de l'homme) et ses organisations membres en Côte d’Ivoire (la LIDHO - Ligue ivoirienne des droits de l’Homme, et le MIDH - Mouvement ivoirien des droits humains) considèrent que "cet accord à l’amiable ne doit pas permettre à la société Trafigura de s’exonérer des responsabilités qui sont les siennes au regard de la genèse et des facteurs qui ont provoqué cette catastrophe humaine, sanitaire et environnementale"...
Tout en respectant le droit et le désir des victimes d’être indemnisées des préjudices considérables subis, la FIDH, la LIDHO et le MIDH considèrent qu’en présence d’une décision de juridiction civile britannique entérinant simplement un accord entre parties, et en l’absence d’une décision de justice impartiale sur la responsabilité pénale de la société Trafigura, celle-ci ne peut pas se considérer blanchie par le simple fait d’avoir transigé à l’amiable avec les victimes. "La FIDH, la LIDHO et le MIDH ne peuvent que dénoncer l’attitude indécente de Trafigura, qui développe dans la presse française et internationale une opération de communication institutionnelle et de relations publiques portant sur son absence de responsabilité, et ce au mépris de la douleur des familles et des souffrances des victimes", dénoncent les organisations
Ces dernières rappellent que la toxicité des "slops" (voir ici) contenus dans le navire Probo Koala a été reconnue par plusieurs expertises indépendantes, à la fois ivoiriennes et internationales. En outre, le lien entre le déversement à Abidjan des déchets toxiques contenus dans le navire et les 16 morts officiellement reconnues, sans parler des dizaines de milliers de cas d’intoxication, a été établi par des études indépendantes. Celles-ci ont été présentées notamment lors du procès de l’affaire à Abidjan en octobre 2008 (voir ici), puis par le Rapporteur spécial des Nations unies sur les déchets toxiques le 17 septembre dernier lors de la présentation de son rapport au Conseil des droits de l’Homme.
"En conséquence, nos organisations soulignent que cet accord à l’amiable ne saurait faire obstacle aux procédures pénales engagées à l’encontre de Trafigura et de ses dirigeants, visant à l’établissement des responsabilités et à l’application effective du droit des victimes à obtenir justice et réparation", concluent la FIDH, la LIDHO et le MIDH.