Taxe carbone : l'industrie chimique défend son bifteck...
Dans un communiqué, l'Union des Industries Chimiques (UIC) explique sa position face à la refonte du projet de loi sur l'application de la taxe carbone. A la suite de la décision du Conseil Constitutionnel (voir notre article), elle met en garde contre une "double peine" qui menacerait l’existence de nombreux sites en France...
En premier lieu, l’industrie chimique rappelle qu'elle milite pour la mise en place d’instruments juridiques et fiscaux qui incitent à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) sans affecter pour autant son indispensable compétitivité vis-à-vis de ses concurrents européens ou extra-européens.
"C’est la raison pour laquelle elle a soutenu le projet initial de contribution carbone qui avait vocation à compléter la directive européenne ETS (Emission Trading Scheme) sur les quotas d’émissions de GES. La plupart des émissions de l’industrie chimique étant soumises à cette directive, le projet initial de contribution carbone, en toute logique, exemptait ces dernières et permettait ainsi une répartition équitable de l’effort de réduction entre les particuliers et les différents secteurs économiques concernés", explique l'UIC. "La censure de ce projet par le Conseil Constitutionnel conduit l'Union des Industries Chimiques à alerter contre un nouveau projet qui infligerait aux industriels une double pénalisation économique, porteuse de grands risques pour l’avenir de l’industrie chimique en France".
Il convient de rappeler que la mise en oeuvre du système de quotas fixé par la directive ETS n’est en effet pas gratuite. Elle impose d’ores et déjà une réduction des émissions qui implique des investissements techniques importants et l’achat de quotas supplémentaires lorsque la croissance amène à produire plus. L’UIC estime que le mécanisme de la directive ETS post 2012 devrait coûter à l’industrie chimique 250 millions d'euros par an, notamment pour l’achat de quotas aux enchères et la réalisation d’investissements.
"Si la contribution carbone devait venir s’ajouter, en France, à ces dépenses obligatoires au niveau européen en s’appliquant à toutes les émissions, cela représenterait, dès 2010, un coût additionnel de 400 millions d’euros par an, soit près de 15% du montant total annuel des investissements de la chimie en France, et au total une facture carbone de 650 millions d’euros par an, à partir de 2013", s'inquiète l'UIC. "Cette 'double peine', qui représenterait 4% de la valeur ajoutée du secteur, ne pourrait pas être supportée par les industriels de la chimie dont les prélèvements obligatoires s’élèvent déjà à 23% de la valeur ajoutée, contre 14% en Allemagne".
Dans un contexte de crise majeure (avec une production 2009 en baisse de 11,5% par rapport à 2008) où le remplacement de la taxe professionnelle par la CET (Contribution Economique Territoriale) n’engendrera pas d’économie substantielle, les industriels de la chimie alertent les pouvoirs publics sur les risques que feraient peser "ce nouveau fardeau sur la pérennité de leur activité en France". C'est pourquoi, l’UIC demande à ce que la contribution carbone ne s’applique aux industriels soumis à ETS que pour 3 ans (2010-2012), sachant qu’à compter de 2013 ceux-ci devront, au-delà des investissements nécessaires à la tenue des objectifs de réduction de 20%, acheter leurs quotas aux enchères. Elle est par ailleurs favorable à l’adoption :
de taux différenciés pour les industriels soumis à ETS, en fonction de leur exposition au risque de "fuite de carbone" (risque de délocalisation) et de leur degré d’intensité énergétique ;
d’une liste de dépenses reconnues comme libératoires de la contribution carbone afin de stimuler les investissements nécessaires à la tenue des objectifs de réduction des émissions, à une plus grande efficacité énergétique et au respect des objectifs environnementaux ambitieux retenus dans le cadre du Grenelle Environnement.