Suez Environnement : la crise, même pas peur !
Malgré le ralentissement économique, Suez Environnement tire son épingle du jeu et poursuit son développement sur tous ses marchés (eau, déchets). Jean-Marc Boursier, Directeur financier du Groupe, livre dans le dernier numéro de Suez Environnement Magazine les clés de cette remarquable résistance tout en fixant le cap pour les années à venir : poursuivre une stratégie de croissance rentable...
L’introduction en Bourse de Suez Environnement a coïncidé avec l’apparition de la crise mondiale. Comment l’entreprise a-t-elle traversé cette période ?
Notre politique a d’abord consisté à protéger le bilan de l’entreprise ainsi que ses grands équilibres. Cette volonté a notamment motivé la réduction des investissements de 1,7 à 1,1 milliard d’euros entre 2008 et 2009. Autre thème d’action fort : l’optimisation des coûts opérationnels avec le renforcement des objectifs du programme Compass (programme de réduction des coûts initié en 2008.). Grâce à la mobilisation de toutes les composantes de l’entreprise, nous avons pu dégager 190 millions d’euros d’économies en 2 ans (2008-2009), ce qui constitue une performance remarquable. Parallèlement, Suez Environnement a préparé la reprise en poursuivant son effort en matière de recherche et d’innovation, de développement commercial et de communication. Dans ces domaines, que nous considérons comme essentiels pour nous démarquer de nos concurrents, les investissements ont d’ailleurs été maintenus au même niveau depuis 2008.
Quel bilan tirez-vous de la stratégie mise en oeuvre ?
La priorité était d’éviter la dégradation du chiffre d’affaires et du RBE (Résultat Brut d’Exploitation, c'est-à-dire la différence entre les produits et les charges d’exploitation d’une entreprise), qui mesure la rentabilité opérationnelle de l’entreprise. Le pari a été globalement tenu puisque le premier indicateur s’est apprécié de +0,6% entre 2008 et 2009, quand le second affichait une légère baisse de -1,2% seulement. Le Groupe a maintenu un taux de marge "RBE surchiffre d’affaires" élevé de 16,8% grâce aux bonnes performances opérationnelles des 3 segments : Eau Europe, Propreté Europe, International. Dans l’ensemble, il faut souligner la formidable tenue de nos résultats face à la crise. Le constat est d’autant plus probant que la reprise économique en 2010 s’avère très progressive, du moins en Europe. Dans ce contexte, Suez Environnement affiche, au troisième trimestre 2010, une performance opérationnelle en forte progression, avec une hausse de +11,8% du chiffre d’affaires et de +9,9% du RBE. Nous avons relevé nos objectifs annuels en nous engageant sur une croissance du chiffre d’affaires en 2010 supérieure ou égale à 7% par rapport à 2009 et une croissance du RBE supérieure ou égale à 9%. Nous avons indiqué, lors de la publication du troisième trimestre 2010, notre confiance dans l’atteinte de ces objectifs.
Les 3 segments de Suez Environnement affichent des performances positives mais contrastées. A quoi tiennent ces disparités ?
Sur le marché de l’Eau en Europe, les volumes tendent à diminuer depuis une dizaine d’années. Au cours de l’année écoulée, la progression du chiffre d’affaires (+6,4%) a surtout été tirée par le développement commercial. Suez Environnement propose désormais des services additionnels à l’ensemble de ses clients (télérelève des compteurs, récupération de la chaleur des eaux usées pour chauffer les bâtiments publics...). S’agissant du segment Propreté Europe, 2 éléments principaux ont contribué à la croissance (+9,4%) en dépit d’un contexte économique relativement atone. D’une part, le renchérissement des prix des matières secondaires que nos équipes collectent, trient et valorisent, papiers-cartons et métaux en tête. D’autre part, l’augmentation des volumes recyclés sous l’effet notamment de la pression réglementaire. La plus forte accélération (+22,7%) est à mettre au crédit du segment International, dont les business units se développent sur des marchés en plein essor, caractérisés à la fois par des hausses de prix et de volumes. Par ailleurs, notre filiale Degrémont a bénéficié de l’avancement de la construction de l’usine de dessalement de Melbourne et affiche une croissance de son chiffre d’affaires de +52% à fin septembre 2010 ! Au total, comme vous le voyez, 2011 marquera pour Suez Environnement le retour de la croissance.
L’écart de dynamisme entre les marchés peut-il vous inciter à revoir vos critères d’investissements ?
Je souhaite tout d’abord préciser qu’il n’existe pas chez nous de politique financière indépendante des enjeux industriels et stratégiques. Mon rôle est de contribuer à la définition de la stratégie industrielle, tout en assurant les ressources pour la mettre en oeuvre : il n’y aurait rien de pire que de passer à côté d’une opportunité, faute de pouvoir la financer... Cela dit, il est nécessaire de hiérarchiser les priorités en matière de développement. Plusieurs principes vont guider nos choix. Nous allons rester focalisés sur l’eau et les déchets, qui continuent à offrir des perspectives prometteuses. Sur le plan géographique, les positions du Groupe hors d’Europe lui permettent de bénéficier d’une croissance plus rapide à l’international, et tout particulièrement en Asie et en Australie. En Europe, où l’activité industrielle reste peu soutenue, nous poursuivons notre croissance dans l’eau, en intégrant les activités d’Agbar, et nos activités de tri et de valorisation sont en forte croissance. L’équilibre sera également recherché entre les domaines régulés, fortement consommateurs d’investissements mais sources de revenus réguliers, et non régulés. Mais au total, nous donnerons désormais plus de capitaux à celles de nos business units qui ont déjà démontré leur capacité à créer de la valeur sur leur marché.
Compte tenu des bons résultats financiers de l’entreprise, le plan de réduction des coûts conserve-t-il toute sa pertinence ?
Bien sûr, dans la mesure où le maintien d’une rentabilité opérationnelle forte constitue un élément déterminant pour l’avenir. Il y va de notre compétitivité future. Compass a été lancé en 2010 avec l’ambition de générer 250 millions d’euros d’économies supplémentaires sur 3 ans. Dans chaque entité, les énergies sont mobilisées pour améliorer l’efficacité des processus relatifs aux achats, à l’informatique ou aux assurances, mutualiser les frais généraux, réduire le nombre de journées de travail perdues à la suite d’accidents, etc. L’intégration d’Agbar fait également l’objet d’une démarche spécifique d’économies, qui se traduit notamment par la rationalisation des structures de développement, la simplification de la couverture géographique et l’adaptation des procédures aux standards de Suez Environnement. Puisque nous évoquons ce point, je voudrais insister sur l’intérêt stratégique de la prise de contrôle d’Agbar. Cette société, qui est un peu le pendant ibérique de Lyonnaise des Eaux en France, nous permet de construire un second pilier européen dans l’eau et d’asseoir notre croissance. Nous allons également tirer parti de sa puissance commerciale dans des pays comme le Chili, où Agbar est un véritable leader.
Comment voyez-vous l’avenir de Suez Environnement ?
Les facteurs de croissance (augmentation de la population mondiale, renforcement de l’urbanisation, prise de conscience environnementale, cadre réglementaire plus strict), la trajectoire de l’entreprise et les contrats gagnés en 2010 démontrent la pertinence du modèle économique de notre Groupe, qui offre visibilité, profitabilité et croissance. Les programmes que j’ai décrits doivent nous conduire au rang d’acteurs de référence dans le monde des utilities environnementales. Etre l’entreprise la plus performante, la plus désirée par les jeunes diplômés souhaitant faire carrière dans l’environnement, la plus consultée par les industriels et par les collectivités confrontés à des problématiques liées à l’eau ou aux déchets : telle est notre ambition. Si nous parvenons à la concrétiser, je ne doute pas que les marchés financiers donneront à Suez Environnement la prime qu’elle mérite.
source : Suez Environnement