Réemploi : et les couches lavables alors?
Les couches jetables semblent dépassées... Il en va de l'intérêt écologique mais aussi économique des consommateurs d'utiliser des couches lavables (lire notre article "Déchets: les couches jetables sont has-been!"). Quand on additionne le nombre de couches utilisées par un nourrisson, la pollution engendrée et le nombre d'années qu'elles mettent à se dégrader, on a des sueurs froides. La couche lavable, c'est bien, mais ce n'est pas pratique, entend-on dire très souvent. Résultat Stéphane Piette, alsacien de 40 ans, a mis au point un système ingénieux de blanchisserie pour couches lavables. Explication en deux mots.
Plus d'une tonne en moyenne par bambin entre le moment où il est mis au moment et le moment où il devient "grand" et prend ses distances avec les couches. Soit un volume et un tonnage de déchets monumental, qui mettra des années pour ne pas dire des siècles à se dégrader compte tenu de la matière utilisée, ou qui sera incinéré, ce qui n'est guère mieux puisqu'il faut réduire à tout prix le volume des déchets destinés à l'incinération. Selon les expertises, il faudrait 4 arbres et demi et 110 000 litres d'eau pour fabriquer 5 000 couches jetables. A cela s'ajoutent évidemment les nombreux additifs chimiques ...
Dans ce contexte, la couche lavable a pris un nouvel essor. Image d'un temps ancien, elles avaient été remplacées par les couches jetables, plus pratiques. Mais force est de constater qu'elles ne sont pas écolo et pas nécessairement respectueuses du popotin du tout petit. La couche lavable est en revanche beaucoup moins irritante pour la peau ; elle est, en moyenne, deux à trois fois moins énergivore qu'une couche jetable. Sauf que les parents ont moins de temps à mettre à disposition pour laver les langes à la main. Sans oublier qu'une image dégradante s'est associée au processus.
Un alsacien de 40 ans, Stéphane Piette, père de deux enfants, a donc pensé à un système innovateur. Son entreprise propose de vendre ou de louer des couches lavables écolos et "high-tech" en chanvre et coton bio avec, en prime, un service de ramassage à domicile et de nettoyage, sur toute l'agglomération de Strasbourg. Ce système, une première en France, doit revenir très cher, me direz-vous. Mais au final, cela ne coûte pas plus cher que l'achat de couches jetables.
Il a bien fallu dépoussiérer l'image rétrograde des couches lavables, et rassurer les consommateurs. Les couches d'aujourd'hui ne sont pas celles de nos grand-mères, assure Stéphane Piette : "elles sont confortables, absorbantes et aussi faciles à mettre qu'une couche jetable. Finis aussi les problèmes de couches pleines dont on ne sait pas quoi faire. Aujourd'hui quand vous changez un enfant, il suffit de jeter dans les toilettes, le voile de protection biodégradable souillé, placé au fond des couches". Cela permet aussi de réduire le contact entre la peau du bébé et des matières potentiellement nocives pour lui.
Ce père de famille ne s'est pas arrêté en si bon chemin. Il a eu l'idée de fonder une blanchisserie pour couches lavables. Inspiré par des projets similaires en Allemagne et au Luxembourg, l'Association Alsace éco-services a vu le jour en juin 2009. Les couches sont fabriquées dans un Centre d'Aide par le Travail (CAT), et les lavages sont assurés par une entreprise d'insertion. Des valeurs écologiques et sociales sont donc au coeur de son projet. Le ramassage des couches à domicile est effectué par trois salariés de l'association, qui circulent en véhicule fonctionnant au gaz naturel ou en carriole, et sont également des travailleurs en insertion socioprofessionnelle.
Si l'équilibre financier n'est pas encore atteint, l'association travaille déjà en partenariat avec le Centre Médico-Chirurgical et Obstétrical de Strasbourg, ce qui permet de faire adopter des bons réflexes de consommation dès la maternité. Des accords avec d'autres maternités et crèches sont en vue. L'aventure ne s'arrête pas là. A la rentrée, Stéphane Piette souhaite créer des éco-ateliers pour enseigner l'art de fabriquer des couches lavables, ou de s'occuper de son bébé avec des produits 100% naturels, parfois même à confectionner soi-même. Même si le système doit encore faire ses preuves pour être entièrement rentable, Stéphane Piette se dit prêt à aider les personnes voulant s'engager dans l'aventure dans d'autres parties de France. Pourquoi pas?