Mardi 3 décembre 2019, Nicolas Vuillier, président de l’Unicem, a réitéré son opposition à l'instauration d une REP sur les déchets inertes du bâtiment, qui ne permettra pas d’atteindre l’objectif européen... puisqu’il est déjà atteint ! Il a également dressé le bilan de l’année 2019 de l’activité des matériaux de construction : les résultats attendus seront en dessous des prévisions avec + 1 % pour les granulats (345 millions de tonnes, y compris recyclés) et + 0,5 % pour le béton prêt à l’emploi (40,1 millions de m3), 2019 étant marqué par un atterrissage plus brutal qu’attendu. En 2020, les carnets de commande bien garnis permettront de garantir un certain niveau d’activité pendant quelques mois avant qu’un repli de l’activité ne s’amorce.
La bonne orientation des indicateurs, tant du côté du bâtiment (carnets de commandes bien garnis, indicateurs de confiance élevés, construction non résidentielle dynamique, marché des logements neufs stabilisé, rebond de la maison individuelle, redressement de l’enquête promoteurs) que du côté des travaux publics (niveau élevé des marchés conclus, des chantiers en cours et des travaux routiers…), plaidaient plutôt pour un atterrissage maîtrisé de l’activité des matériaux en fin d’année.
Mais les dernières données disponibles pour les granulats et le BPE montrent un freinage plus prononcé cet automne, qui pourrait, du reste, être encore amplifié par les fortes pluviométries du mois de novembre et un climat social incertain et tendu. Sur les dix premiers mois de l’année, l’évolution de la production de BPE et de granulats est ainsi ramenée à +1,3 % sur un an, soit un rythme un peu plus modéré que celui attendu par les professionnels.
Plus globalement, l’indicateur « Matériaux » (qui regroupe un panier de matériaux de construction de la filière minérale) confirme ces tendances. Au troisième trimestre, le recul de l’activité s’est poursuivi (-0,7 % en glissement annuel, données CJO), certes à un rythme plus atténué qu’au trimestre précédent (-1,8 %). Grâce au très bon début d’année, l’indicateur se maintient encore sur une tendance haussière pour les dix premiers mois 2019 (+1,8 %).
La fin de l’année 2019 sera donc décisive. Pour l’heure, les estimations de volumes produits pour l’année 2019 ont été revues à la baisse de près de deux points dans le BPE, béton prêt à l'emploi (à +0,5 %) et d’un point dans les granulats (+1 %). L’année se solderait ainsi par un niveau de production de l’ordre de 345 millions de tonnes pour les granulats, soit environ 10 % en dessous du niveau moyen de long terme (30 ans), ce qui traduit les efforts de la profession en matière de gestion économe de la ressource et d’utilisation raisonnée des matériaux. Quant au BPE, les livraisons atteindraient 40,1 millions de m3, un niveau un peu supérieur au niveau moyen de ces 20 dernières années (+4 %), dans un contexte d’activité constructive plutôt dynamique, portée par les grands chantiers et la montée en charge du cycle électoral.
Pour 2020, les livraisons de BPE devraient au mieux se stabiliser autour de 40 millions de m3, la demande restant portée une partie de l’année par une conjoncture du bâtiment soutenue par des carnets de commandes encore bien garnis dans le gros œuvre, un léger rebond du logement individuel et un secteur non résidentiel encore dynamique. Quant aux granulats, la demande prévue autour de + 1 % serait alimentée par la fin du cycle électoral et les projets des grands opérateurs publics et privés (Grand Paris, plan autoroutier, etc.). Le freinage de l’investissement des collectivités locales, après l’échéance des élections municipales, devrait se solder par un retour plus marqué des disparités territoriales entre les grandes métropoles et le reste du territoire.
Le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire est actuellement à l’étude à l’Assemblée Nationale avec la volonté, pour le gouvernement, d’instaurer une filière de responsabilité élargie du producteur (REP) appliquée aux déchets du bâtiment et la gratuité de leur reprise. Une mesure, dont l’objectif principal est l’augmentation du taux de valorisation et la résorption des décharges sauvages, qui fait peser de nombreuses incertitudes sur le secteur des industries extractives et matériaux de construction, alors même que l’économie circulaire est déjà une réalité au sein de la filière. En effet, sa mobilisation depuis plusieurs années a permis de dépasser, dès 2018, le seuil des 70 % de taux de valorisation fixé par l’Union européenne. Les déchets inertes du bâtiment, en particulier les bétons de démolition, sont ainsi déjà valorisés à plus de 80 %. La profession s’appuie sur un maillage de 1 500 plates formes réparties sur l’ensemble du territoire.
« Pleinement conscients de l’enjeu pour les pouvoirs publics de la gestion des déchets non inertes, la profession est prête à prendre des engagements forts permettant d’optimiser la collecte des déchets du second œuvre (bois, plâtre, verre, isolants…) et participer ainsi à l’effort collectif d’amélioration de la performance du secteur. Ces actions pourront se traduire par la reprise, sous certaines conditions, des déchets non inertes et non dangereux, en s’appuyant sur le réseau des plateformes actuellement dédiées aux déchets inertes », exprime le syndicat.
Par ailleurs, concernant les déchets inertes du bâtiment (ils ne se décomposent pas, ne brûlent pas, ne produisent aucune réaction physique ou chimique, ne détériorent pas d’autres matières en contact de manière préjudiciable à l’environnement ou à la santé humaine), la profession est prête à s’engager pour porter le taux de recyclage de 80 % à ce jour à 90 % à 2025.
Il y a donc, de fait, deux problématiques distinctes, avec d’un côté une filière qui existe, atteint ses objectifs et est prête à prendre des engagements volontaires pour aller plus loin et, de l’autre, des filières à créer, notamment pour certains déchets non-inertes.
Et Nicolas Vuillier de conclure par des mots bien sentis : l’instauration d’une REP sur les déchets inertes du bâtiment ne permettra pas d’atteindre l’objectif européen... puisqu’il est déjà atteint ! L’Unicem, par la voix de son président, réitère donc sa demande d’exclure les déchets inertes du bâtiment de ce projet de REP compte tenu du haut niveau de performance environnementale de la filière. Par ailleurs, sur la résorption des dépôts sauvages, « il est nécessaire que la résorption des dépôts sauvages repose sur une responsabilité de l’ensemble des acteurs, de l’administrions aux collectivités territoriales, des associations aux professionnels du bâtiment. L’Unicem est prête à s’engager autour d’un projet collectif et pragmatique pour contribuer à l’arrêt de ces pratiques illégales et à la résorption de ces points noirs. Ce projet reste aujourd’hui à construire ».