Québec : les centres de tri menacés par la chute des prix
Avec la chute des prix des matières premières, la quarantaine de centres de tri existant au Québec fonctionne à perte depuis le milieu du mois d'octobre. Certaines voix d'exploitants se font entendre, comme celles de Frédéric Potvin, vice-président du comité des centres de tri du Réseau Environnement et directeur général de Tricentris, pour parler de possible faillite dans les semaines qui viennent. En même temps, c'est l'occasion pour les représentants de l'industrie papetière de demander un nouveau partenariat avec les trieurs en remettant en cause les exportations vers la Chine et dénonçant un manque de qualité sur les papiers cartons triés...
En trois mois la valeur de vente du carton et papier mixte issus des centres de tri du Québec a perdu plus de 90% de sa valeur. Une tonne de carton triée qui, au début du mois de septembre, valait environ 140$ en vaut aujourd'hui moins de 25$. Et, ce n'est pas tout, il est difficile de trouver des acheteurs pour les centres de tri qui exportent vers l'Asie. Résultat, les stocks augmentent .
«À ce rythme-là, nous allons tous faire faillite dans les prochaines semaines», a prévenu M. Potvin, directeur général de Tricentris ( 40 000 tonnes/an de matières recyclables ). Son organisme sans but lucratif gère trois centres de tri à Terrebonne, Lachute et Chelsea. Depuis un mois, ses pertes se chiffrent à 300 000$.
Au Québec, on dénombre une quarantaine de centres de tri, employant 2400 personnes. Selon leurs responsables,ils fonctionnent à perte depuis le mois d'octobre. Face à cette dégradation financière, les autorités publiques étudient les mesures à prendre et l'éco-organisme Recyc-Québec va remettre un rapport après avoir rencontré l'ensemble des acteurs industriels.
Du côté de l'industrie papetière et du groupe Cascades, représenté par son dirigeant, Alain Lemaire, on avance des solutions et on demande de revoir notamment la question de la qualité du tri.
Le dirigeant explique que ces dernières années les responsables des centres de tri ont exporté massivement leur tonnage vers la Chine et du coup ont "réduit le tri à sa plus simple expression en exportant une matière mélangée en ballots et expédiée vers l'Asie, où elle est retriée à des coûts de main-d'oeuvre dérisoires" ( à quoi cela sert-il de trier ?? ). Or, en même temps les papetiers soulignent qu'ils importent des PCR en provenance de l'Ontario et du nord-est des Etats-Unis. Les récupérateurs doivent investir pour améliorer la qualité de la fibre, et l'éco-organisme Recyc-Québec doit " réaménager la chaîne d'approvisionnement " propose Lemaire
« Présentement, on a un genou à terre, et ce n'est pas le temps de nous dire d'embaucher 25 personnes de plus », répond Frédéric Potvin, ajoutant que la matière est difficile à trier en raison des saisons québécoises et de la grosseur des bacs. Il exclut aussi l'idée que les centres de tri enfouissent leur surplus. Une gestion qui serait « totalement contre leur mentalité », dit-il.
Karel Ménard, directeur général du Front commun pour une gestion écologique des déchets, déclare pour sa part qu'une aide financière est nécessaire et il propose pour cela une hausse de la taxe à l'enfouissement et des entreprises d'emballages. « Si on ne les aide pas, dit-il, ils fermeront, et c'est très difficile de remettre sur pied un centre de tri. Nous risquons de reculer de 20 ans en matière de récupération.»