Pollution à la dioxine : un vieil incinérateur, resté dans le collimateur

Seine-et-Marne, agglomération de Melun : plus de quinze ans de procédure contre l'incinérateur d'ordures ménagères de Vaux-le-Pénil, installé en 1974, fermé en juin 2002, faute d'avoir pu être modernisé. Accusé d'avoir rejeté à longueur d'années des fumées chargées de dioxines, et autres polluants organiques toxiques, ayant généré des lymphômes mortels, et la colère des riverains qui ont attaqué, patienté, et qui aujourd'hui, ont remporté une victoire, jugée «historique».
C'est une première dans l'histoire judiciaire française : aujourd'hui mardi 6 mars 2018, le tribunal correctionnel de Paris a condamné l'agglomération de Melun (Seine-et-Marne) à une amende de 250 000 euros, dont 50 000 euros avec sursis, pour «mise en danger de la personne» dans l'affaire de la pollution aux dioxines émises par un incinérateur qu'elle exploitait. Le tribunal a retenu cette infraction sur la période allant de janvier 1999 - date d'un premier arrêté préfectoral - à juin 2002 - date de fermeture de l'installation, mais aussi la «poursuite d'une installation classée non conforme», la préfecture ayant mis en demeure l'exploitant de mettre aux normes l'incinérateur avant mars 2002, sans réaction de ce dernier. Explications...
Après plus de quinze ans de procédure, les riverains de cet incinérateur de Seine-et-Marne qui "crachait" des fumées chargées en dioxines, ont remporté une victoire "historique": l'agglomération de Melun, exploitant, a été condamnée mardi à une lourde amende..."C'est la première fois que des victimes obtiennent réparation du préjudice lié au dysfonctionnement d'un incinérateur", a souligné l'ancienne ministre de l'Environnement Corinne Lepage, qui défendait ces riverains avec Pierre-Olivier Sur, les deux avocats ayant d'aileurs cette décision .
Construit puis exploité dès 1974, cet incinérateur d'ordures ménagères implanté à Vaux-le-Pénil, proche des habitations polluait l'environnement immédiat. Impossible à moderniser, il avait fermé en juin 2002.

Quelque 165 riverains lui avaient emboîté le pas. Parmi eux, une dizaine sont morts de cancers au cours de ces dernières années, notamment de "lymphomes non hodgkiniens", qui se développent à partir de cellules du système lymphatique, selon les parties civiles. Une dizaine d'autres en souffrent à ce jour.
L'agglomération avait finalement comparu devant le tribunal correctionnel de Paris en novembre et décembre seulement pour "mise en danger d'autrui" et ce sur une période restreinte (janvier 1999 - date d'un premier arrêté préfectoral enjoignant l'exploitant à se mettre aux normes - à juin 2002, date de fermeture de l'installation).
Ce mardi, les juges l'ont condamnée pour ce délit ainsi que pour "poursuite d'une installation classée non conforme", la préfecture ayant en vain mis en demeure l'exploitant de mettre aux normes l'incinérateur avant mars 2002.

Des relevés de mars 2002 avaient mis en évidence des taux de dioxine très très très au dessus de la norme.Une trentaine de riverains présents au tribunal ont accueilli le jugement dans le calme. Plusieurs avaient décrit lors de l'audience un paradis perdu, un rêve campagnard brisé par la maladie ou l'angoisse de devenir malade.
"La science a (désormais) besoin de faire des progrès pour établir plus précisément le lien de causalité" entre dioxines et cancers, a estimé Mme Coffinet, présidente de l'association des victimes. A défaut, l'agglomération n'était pas poursuivie pour homicides involontaires.

Son avocat, Pierre Chaigne, n'a pas souhaité faire de commentaires ; il avait soutenu au cours du procès que l'agglomération ne pouvait être poursuivie pour des faits antérieurs à janvier 2002, date à laquelle elle avait remplacé un syndicat intercommunal.
Le tribunal a toutefois précisé qu'en vertu d'une loi d'amnistie de 2002, l'agglomération pourrait "éventuellement" être amnistiée pour une partie des faits de "mise en danger" une fois l'amende payée et la condamnation définitive.

