Pneus usagés : une réutilisation anti-inondation
La ville de Bron (Rhône, 69) a choisi un procédé peu commun pour remédier aux problèmes d’inondation et d’infiltration récurrents en contrebas du cimetière communal. Solution choisie : l'empilement de milliers de pneus de camions. Focus sur un chantier original et écologique...
Les caves de la résidence "Le Terraillon" (géré par Alliade Habitat) et l’avenue Pierre-Brossolette étaient régulièrement inondées par temps de pluie. L’évacuation du réseau communautaire, en contrebas de l’avenue François Mitterrand, ne suffisant pas, la ville de Bron a donc programmé des travaux afin de reprendre le réseau d’assainissement de l’allée intérieure du cimetière. Afin de créer un dispositif de rétention/infiltration enterré et un ouvrage de décantation, la Ville, ainsi que le bureau d’études Ingedia (maître d’oeuvre), ont fait appel à un système à base de pneus de camions empilés.
Souvent utilisés comme remblais en bordure d’autoroute, en sous-couches routières, pour les écrans antibruit, les pneus usagés connaissent en effet une multitude d’applications dans le domaine des travaux publics. Le chantier de Bron en est la preuve.
Situé dans une zone à faible sensibilité hydrogéologique, ce chantier développe une idée ingénieuse qui est à la fois respectueuse de l’environnement et économique. Empilés dans une grande fosse, 6 500 pneus de camions permettront à l’eau de s’infiltrer progressivement dans le sous-sol. Ces pneus usagés entiers de poids lourds qui garniront le bassin de rétention, lui permettront de conserver un volume d’eau important avec 70% de vide. Avantage : le pneu est une matière inerte qui ne pollue pas. Des études écotoxicologiques menées par l’Ademe et Aliapur le prouvent ; 43 paramètres ont été analysés, à chaque fois, en dessous des normes. On notera au passage que les pneus mis en place sont triés, nettoyés et calibrés.
Autre avantage : la résistance de ces structures à base de pneus usagés permet de les recouvrir et de les aménager. La création d’un petit talus, matérialisant l’ouvrage, donnera ainsi naissance à un nouvel espace vert sur la résidence. Son aménagement pourrait d’ailleurs se faire en collaboration avec les habitants. Le chantier, débuté en septembre dernier, devrait durer environ 4 mois pour un coût de l’ordre de 350 000 euros. Tout y a été mis en oeuvre pour limiter au maximum les gênes et assurer la sécurité des habitants comme des usagers du cimetière. Le bailleur Alliade et la ville de Bron ont ainsi imposé une organisation complète du chantier : zones de stockage, de retournement des camions, barriérage, gardiennage...
D'un point de vue technique, la solution retenue consiste donc en l’empilement de pneus usagés entiers. L’ouvrage présentera un volume net d'environ 1 000 m3 ; la hauteur maximale stockée sera de 6 m, pour une cote de fond de 190,50 NGF. Il sera lié par un double géotextile anti-contaminant et pourvu d’une tranchée drainante pour permettre de meilleures répartition de circulation et infiltration d'eau. L’arrivée à l’ouvrage de rétention/infiltration se fera par un ouvrage siphoïde de décantation, de surverse et de régulation de débit. Il permettra une première épuration du fluide (isolement des fines, graisses et flottants). Un orifice calibré avec un voile de surverse permettra la régulation du débit de fuite à 20 litres/seconde en direction du réseau communautaire. Un drain sera implanté entre le mur du cimetière communal et le dispositif de rétention/infiltration pour diriger les éventuelles eaux souillées provenant du cimetière par infiltration directement vers le réseau unitaire du Grand Lyon.
Dans les faits, les premières eaux lessivées par un orage seront orientées vers le réseau communautaire. Le surplus, qui auparavant inondait les caves, sera décanté dans un siphon. Ce dernier filtrera les eaux les plus sales avant leur passage dans les pneus et dans une épaisse couche de galets jouant le rôle de filtre final avant l’infiltration. Tout a donc été prévu pour une régulation saine et efficace. Il faudra tout de même surveiller les zones de rétention, les moustiques adorant les petits bassins pour venir y pondre à gogo...