Planète Ferrailles : le taureau par les cornes
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En dépit du climat délétère qui règne sur les marchés de matières premières de l’acier, un certain nombre de sidérurgistes européens ont décidé d’annoncer de prochaines hausses de prix des produits qu’ils mettront sur le marché. Prochaines hausses de coils sur le marché nord-européen, prochaines hausses de certains produits longs sur le marché italien. En matière de hausses de prix de l’acier par les temps qui courent, il y a parfois loin de la coupe aux lèvres, comprendre de l’annonce de la hausse à sa concrétisation sur le marché. Mais il fallait saluer ici le courage de ces sidérurgistes qui choisissent de « sortir de la victimisation » (victimes des importations chinoises à bas prix, victimes de la politique de la Commission Européenne qui veut les contraindre à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre) pour reprendre le combat et démontrer que la sidérurgie européenne à des qualités à faire valoir et qu’elle n’entend pas se laisser terrasser par le « Dragon chinois ».
Cette volonté de faire décoller les prix de l’acier est confirmée en ce début de semaine par l’annonce faite par un des principaux acheteurs de ferrailles sur le marché français de hausser de 15 € le prix d’achat de ces ferrailles en décembre. Il y a fort à penser que cette hausse ne s’appliquera pas sur des volumes importants, mais elle sera dans le portefeuille du sidérurgiste pour discuter en début d’année prochaine le prix de ventes de ses aciers. Reste que la « calmitude » est présente sur le marché international des ferrailles en ce début décembre. A destination de la Turquie, la moyenne des prix s’est dégradée d’une paire de $ qui reflète tout autant le manque d’appétit des usines turques que la modestie du nombre de transactions constatées vers cette destination au cours de ces dernier jours. Un petit mouvement haussier d’une quinzaine de $ des ferrailles exportées du Japon vers la Corée fait l’évènement de la semaine. C’est loin de signifier que le marché du Sud-Est asiatique, qui reste sous la pression des exportations chinoises de produits finis et de billettes, est en train de s’enflammer. Sur le marché américain, d’après les premières indications, il semble que la reconduction des prix de novembre se soit plus ou moins confirmée. Reste également que nous évoluons dans un monde économique complétement ouvert, que les exportations chinoises ont dépassé avant le terme de l’année le cap des 100 millions et que les « grands mineurs » n’ont pas l’air, malgré l’effondrement du prix du minerai, malgré leur effondrement en bourse et malgré les pertes qu’ils enregistrent, de vouloir changer d’un iota leur stratégie sidérante.



L’instabilité politique qui se perpétue dans certaines régions du monde et l’ambiance négative qui règne en Europe qui s’est encore dégradée au cours de ces dernières semaines avec la crise des réfugiés et les attentats n’est pas propice au développement des investissements. Les fonds qui étaient destinés à la rénovation des infrastructures en Allemagne seront finalement dépensés sous forme d’aides aux réfugiés.

Une action antidumping à l’encontre des importations chinoises de ronds à béton par les Britanniques devrait être en place en janvier. Il reste à savoir si cette action concernera le marché européen dans son ensemble ou si son impact sera limité au Royaume-Uni et à l’Irlande. Cette action pourrait avoir un impact positif sur les prix si des importations d’autre provenance n’arrivent pas à s’aligner sur le niveau de prix des aciers en provenance de Chine.

La concurrence avec les producteurs chinois reste très vive en de nombreux points de marché, une concurrence souvent décrite comme déloyale par les opérateurs qui en sont victimes. Les producteurs de produits longs en Turquie auraient choisi de donner désormais plus d’importance aux prix qu’aux volumes. Dans ces conditions, il y a peu de chances que l’instabilité du marché se résorbe si la demande n’est pas suffisante par rapport à une offre surabondante nonobstant les incertitudes politiques et l’évolution des parités monétaires. 
Jeudi prochain à Luxembourg une conférence sur le financement de l’économie circulaire organisée par la Commission européenne, le gouvernement luxembourgeois qui préside actuellement l’Union Européenne et la Banque européenne d’investissement (BEI).

La faiblesse de l’€ n’a pas profité au commerce extérieur de l’acier. Les exportations françaises d’acier à destination des Pays-Tiers ont chuté de 23 % au cours des 9 premiers mois de l’année tandis que les importations en provenance de ces mêmes Pays-Tiers auraient progressé de 71 %. Les exportations de produits longs enregistrent un repli 14.3 % à tandis que celles de produits plats reculent de 24 %. A destination des autres pays de l’Union Européenne, les exportations françaises d’acier reculent de 5.8 %, celles de produits longs de 5.3 % et celle de produits plats de 6.2 %. Les importations d’aciers des Pays-Tiers ont progressé de 71.4 %. Tandis que les importations de produits longs reculaient de 33 %, celles de produits plats augmentaient de 150 %. Les importations d’acier en provenance des autres pays de l’Union Européenne ont progressé de 15.5 %, celle de produits longs de 16.5 % et celles de produits plats de 15.3 %.

Un chantier de démolition navale à Gijón. Après 3 ans de négociations diverses, Antonio Barredo a annoncé qu’il ouvrirait en juin 2016, un chantier de démolition navale dans le port de Gijón au Nord de l’Espagne. 3 millions d’€ ont été investis et 50 000 t de ferrailles devraient être produites par le chantier qui prendra en charge des petites et moyennes unités.

Royaume Uni
Celsa Cardiff remise en route. 3 semaines après l’explosion du four de la filiale britannique du groupe espagnol qui a fait deux morts et plusieurs blessés l’usine a été remise en production en même temps que les investigations se prolongent pour mettre à jour les causes de ce drame.

Les sidérurgistes inquiets sur l’avenir de leur relation avec la Russie. Au cours des 9 premiers mois de l’année, la Turquie a importé de Russie 7.3 millions de tonnes d’acier sous forme de produits finis et semi-finis. La Turquie exporte également vers ce pays des volumes non négligeables. Les exportateurs turcs d’acier se plaignent d’avoir été victimes de quelques « turpitudes » depuis que les relations politiques entre les deux pays se sont détériorées avec notamment quelques retours d’expédition.Les exportations turques d’acier en repli. Au cours des 11 premiers mois de l‘année 2015, les exportations turques d’acier, à 14 700 000 t affichent un tassement de 7.2 %

Nettoyage de l’Arctique. Une nouvelle campagne de nettoyage de l’Arctique devrait débuter en juin prochain. Le but : récupérer les ferrailles disséminées sur ce territoire par les « activités » du Ministère de la Défense à l’époque soviétique et post soviétique. 4 600 t de déchets métalliques pourraient être collectés au cours de cette prochaine campagne. En 2015, l’armée russe a entrepris le nettoyage de 78 ha et rassemblé 4 300 t de ferrailles dont 1 800 tonnes ont été extraites de ces territoires et 2 500 t préparées pour la campagne 2016. Ces campagnes de nettoyage pourraient s’étendre jusqu’en 2016.

Exportations de ferrailles en hausse. Au cours des 11 premiers mois de l’année, les exportations ukrainiennes de ferrailles ont augmenté de 40.4 % pour atteindre 1 175 000 t.

Des signes de « reprise » sur le marché des ferrailles. Au cours de la seconde quinzaine de novembre, les prix de ferrailles au Japon ont manifesté le désir de mettre un terme à une longue phase de dégradation. Les négociants ne comptent sur une brutale remontée des cours, mais le marché semble vouloir mettre un terme à la baisse après 6 mois de tassement presqu’ininterrompu. Sur les marchés export, les prix des ferrailles ont également enregistré un léger mieux notamment à destination du Vietnam et de Taïwan. Ce sont d’ailleurs ces hausses qui ont convaincu les exploitants d’usines électriques domestiques à faire progresser leurs prix d’achat. Malgré cette timide amélioration des conditions de marché, personne ne rêve au Japon en estimant que la page de la crise est tournée mais par les temps qui courent, toute amélioration est bonne à prendre.

Les exportations d’acier ont crevé le plafond des 100 000 000 de t. On n’attendait cette nouvelle qu’à la fin de l’année. 11 mois auront suffi à l’Empire du Milieu pour atteindre la prévision. Au cours des 11 premiers mois de l’année, la Chine a exporté 101 700 000 t d’acier : il se pourrait bien qu’en fin d’année on se soit sérieusement rapproché des 110 000 000 de t. Au mois de novembre, la Chine a exporté 9 610 000 t d’acier. Ce chiffre est légèrement en retrait par rapport au volume exporté en novembre 2014.Si les exportations chinoises d’acier n’ont pas retrouvé leur niveau mensuel record de 11 300 000 t atteint au mois de septembre, elles ont progressé de 0.6 % par rapport à leur niveau d’octobre. Au cours des 11 premiers mois de l’année, les exportations chinoises d’acier ont progressé de 21.7 % par rapport à la même période de 2014 en dépit des entraves de plus en plus nombreuses qui tentent de leur barrer le chemin. Fort discrètement, la Chine aurait annoncé qu’elle avait l’intention dès le 1er janvier prochain de réduire de 25 à 20 % la taxe qu’elle applique sur les exportations de billettes et qu’elle en profiterait également pour réduire la taxe à l’exportation sur la fonte marchande.

La sidérurgie chinoise exporte massivement, ce qui ne l’empêche pas de perdre de l’argent. Selon l’agence Chine Nouvelle, les grandes et moyennes entreprises sidérurgiques ont enregistré une perte cumulée de 11 340 000 000 de $ au cours des 10 premiers mois de l’année. Ce qui ne représente guère qu’une perte moyenne de 16.8 $ à la tonne produite. Parmi les 101 entreprises sur lesquelles la CISA, la fédération chinoise de la sidérurgie a enquêté la marge moyenne réalisée sur les ventes a reculé de 1.5 % sur la période, le pire résultat jamais enregistré par la sidérurgie chinoise.
La production d’acier continuera de se tasser en 2016. Selon l’institut de planification de l’industrie métallurgique, la production chinoise d’acier reculera de 3.1 % à 781 000 000 t en 2016 entraînant une chute de 4.2 % de minerai de fer. Quant à la consommation d’acier en Chine l’an prochain, l’institut estime qu’elle reculera de 3 % par rapport à 2015 à 648 000 000 t. Nonobstant que la Chine, malgré la crise, continue d’importer de l’acier par-ci, par-là, la production devrait dépasser la consommation d’environ 133 000 000 de t, ce qui nous laisse augurer de nouveaux bonheurs.

Bien installé sous 40 $. Le prix du minerai 62 % pour livraison immédiate sur le port de Tianjin a reculé de 0.3 % mardi pour s’établir à 38.80 $. La chute de la demande d’acier en Chine conduit progressivement les sidérurgistes à ralentir leur production voire à la stopper quand c’est possible. On ne se précipite pas à acheter et les stocks sur les ports enflent comme des vaches qui ont mangé de l’herbe humide. Ils ont atteint récemment 90 millions de t, leur niveau le plus élevé depuis le mois de mai. Un certain d’analystes estiment que le minerai est en train de se diriger tranquillement vers les 30 $. Un certain John Kovacs estime même que sous 40 $, les grands mineurs qui conduisent la politique d’accroissement de la production alors que la demande se tasse, pourraient se retrouver coincer dans leur propre piège. Les bourses ont manifesté leur méfiance un peu partout dans le monde à l’encontre des grands producteurs. Vale a retrouvé à Sao Paulo sa cotation la plus faible depuis 2003 et BHP a affiché à Sydney son cours le plus faible depuis 2005.Malgré la situation désastreuse dans laquelle les mineurs sont entrain de conduire la sidérurgie mondiale, ils continuent de justifier leur politique en expliquant aux « abrutis » qui n’y comprennent rien qu’ils mènent, eux, « une politique à long terme ».
