
"Du réemploi des matériaux à la transformation des quartiers : recycler la ville ?" : tel était le thème du petit-déjeuner débat organisé le 10 mai dernier à Lille par l’Observatoire de la Ville, sous l’égide de la Fondation d’Entreprise Bouygues Immobilier. Cet événement, qui a mobilisé une centaine de participants, a permis de présenter différents travaux menés par des architectes, urbanistes et entreprises de la région…



La question du recyclage concerne aussi les maisons ouvrières du Nord de 1930, qui représentent une part importante des logements dans les Hauts-de-France. Bénédicte Grosjean, architecte-urbaniste et enseignante, pose la problématique : "Plutôt que d’inventer un nouveau modèle de pavillon neuf éco-conçu, comment proposer une forme de recyclage de la maison de 1930 ?". A partir de là, les étudiants de l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Lille (ENSAPL) imaginent des dispositifs innovants au service de la réhabilitation énergétique de maisons types dans la métropole. Baptisé "Habiter 2030", le projet a pour but de bousculer les codes d’architecture et de proposer des conceptions singulières.
Le recyclage de la ville s’applique également à l’échelle d’un quartier. L’un des acteurs majeurs du renouvellement urbain de la région lilloise est la Fabrique des Quartiers. Créée en 2010 pour réhabiliter les immeubles anciens et les quartiers sociaux avec habitations denses, celle-ci rachète les immeubles, reloge les habitants, et reconstruit pour redonner de la valeur à des quartiers où il n’y a plus de marché. "Dans la métropole lilloise, 73% des logements sont privés et ce patrimoine est ancien, voire obsolète : 50% des logements sont antérieurs à 1949 et près de 42.000 sont de mauvaise qualité", indique Vincent Bougamont, Directeur Général de la Fabrique des Quartiers. L’un des projets les plus emblématiques porte sur le quartier du Pile à Roubaix. "Comment lier un projet urbain d’investissement à des dynamiques sociales et économiques ?", questionne M. Bougamont. L’expérience du Pile montre l’importance de l’"empowerment", qui consiste à intégrer l’habitant au cœur du projet. "Nous avons monté des chantiers école de recyclage de matériaux avec des associations locales pour que l’investissement dans la ville serve le développement économique et social. Tout projet de transformation d’un quartier doit passer par une phase d’intégration sociale", précise le Directeur Général.
"Pour recycler la ville, il faut mettre les acteurs en jeu et dans le jeu : collectivités locales, institutions territoriales publiques et privées", déclare Brigitte Fouilland, Directrice exécutive de l’Ecole urbaine de Sciences Po. L’enjeu des projets de villes recyclables réside dans la capacité de mobilisation des habitants. "La ville recyclée, résiliente et durable ne prendra corps que si elle s’appuie sur ses citoyens et si la réhabilitation est socialement acceptée", conclut Alain Bourdin, sociologue-urbaniste.
