Nonant le Pin : quand la justice choisit de fermer le site à double tour…
Pour mémoire, si le site n’a jamais fait l’unanimité, c’est la présence de morceaux de pneumatiques, stockés sur le site ornais, alors qu'ils ne devraient pas l'être qui a mis le feu aux poudres confortant les opposants dans leur conviction que l’affaire n’est pas aussi clean qu’il y paraît…
Pour en revenir à l’audience du Tribunal Correctionnel de cette semaine, présidée par François Lavallère, quelques temps forts ont ponctué la session du tribunal qui n’a rien eu d’ordinaire. Ainsi, le président s’est t-il étonné de la présence de Maître Harada en qualité de défenseur de GDE, alors que ce dernier avait auparavant collaboré au cabinet de maître Faro, l'avocat des adversaires de l’entreprise de recyclage. La question ayant été jugé d’importance, on a jugé bon de prononcer une suspension de séance…
Autre sujet d’agacement, l’absence des dirigeants de l’entreprise à l’audience…
Fort de ces constats et regrets, le tribunal a choisi d’éplucher le dossier et de revenir sur l’historique à commencer par les autorisations administratives, les 1 856 tonnes de déchets arrivés sur le CET en octobre 2013 au cours des deux seuls jours d’ouverture effective (puisque le site a ensuite été bloqué par les anti-GDE), les photos aériennes qui ont permis aux opposants de démontrer que des pneus usagés ont été stockés, l’intervention des huissiers mandatés par la justice, venus constater les faits in situ, lesquels ont expliqué lors de l'audience, qu’ils ont été coursés par des agents de sécurité de l’entreprise lors que leur première intervention (d’où la nécessité pour eux de revenir sur les lieux afin de procéder aux prélèvements nécessaires)…
Bref : ce fut théâtral…
Il n’en demeura pas moins que l’une des questions de fond concernait bel est bien ces pneus usagés : avaient-ils le droit, ou non, d’atterrir sur le CET pour y être enfouis ?
Simple question et pourtant… un débat et non des moindres s’est alors engagé.
Pour les opposants et leurs défenseurs, la réponse étant clairement NON (parce que, pour faire court, les morceaux de pneus sont trop gros pour être assimilables à des RBA)
Pour l’entreprise, on l’aura deviné, la réponse est OUI, parce qu’un pneu broyé, même sommairement, est un résidu de broyage automobile.
Much Ado About Nothing, aurait peut-être indiqué Shakespeare en son temps… Mais pas le juge d’Argentan, qui poursuit et va de l'avant.
A l’identique, en effet, on s’est questionné sur l'avenir des 1 856 tonnes de déchets déjà stockés sur le centre de stockage : GDE allait-elle les ôter de là, ou non? Puis, on s'est interrogé quant à savoir pourquoi GDE a fait appel de la mise en demeure du préfet de l'Orne, de les extraire du site d’enfouissement dans un délai de 3 mois…
Naïvement, on pourrait considérer que si appel a été interjeté, c’est que l’entreprise en a eu le droit, tout simplement. Et que GDE souhaite aller au bout de ces procédures, convaincue de son bon droit d’une part, et désireuse d’exploiter le CET pour lequel elle a investi un petit paquet de blé, il est bon de le rappeler aussi…
Toujours est-il que les arguments développés par l’entreprise n’ont pas convaincu les juges qui ont donc prononcé la fermeture définitive du site. Réplique quasi immédiate de l’industriel : appel.
Un communiqué confirme que la société est « plus que jamais mobilisée pour faire reconnaître la parfaite conformité et la qualité de la gestion et des installations de son site de Nonant-le-Pin », exprimant « sa stupéfaction suite à la décision du juge de fermer le site de Nonant-le-Pin ». Le petit fils du fondateur, Guillaume Dauphin, rappelant de son côté que « la décision n’est pas immédiatement exécutoire, tant que les voies de recours ne sont pas épuisées ». Pour le jeune dirigeant, « cette condamnation à la fermeture définitive est parfaitement incompréhensible tant elle est infondée et profondément disproportionnée ». Pour preuve : la Dréal (Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement) a constaté elle-même que la présence de fragments de pneumatiques n'était pas contraire aux prescriptions fixées par le préfet pour l'exploitation du site. Et pour cause : l'ensemble des installations de stockage de déchets non dangereux en France sont destinées à stocker les fragments de pneumatique ultimes que les conditions techniques et économiques actuelles ne permettent pas de valoriser au sein des filières. « Nous allons continuer de travailler et de nous battre pour démontrer que notre site est en tout point conforme à la réglementation, en tout point exemplaire et nous sommes convaincus que nous obtiendrons gain de cause ».
On l’aura bien compris… Ce n’est pas fini !