Nomenclature ICPE : ce qui va changer pour le compostage
L'activité de compostage est soumise à la législation des ICPE (Installations Classées pour la Protection de l’Environnement). A ce titre, les sites de production concernés se voyaient jusqu’ici appliquer un régime administratif qui variait selon la provenance des matières premières : en fonction de l’origine des déchets traités, l’installation de compostage pouvait ainsi relever de la rubrique 2170 relative à la fabrication d’engrais et supports de culture, mais aussi de la rubrique 322B3 (portant sur le stockage et le traitement des ordures ménagères et autres résidus urbains), et/ou de la rubrique 167C (consacrée au stockage et au traitement des déchets industriels). Les décrets 2009-1341 du 29 octobre 2009 et 2010-369 du 13 avril dernier ont changé tout cela en faisant évoluer la régmementation. Dans le dernier numéro de son magazine "Horizon Bio", Terralys (le spécialiste de la valorisation et du traitement biologique des déchets organiques au sein de Suez Environnement) nous propose un décryptage de ces nouvelles règles et de leurs conséquences dans le domaine du compostage...
"Les nouveaux décrets clarifient et simplifient ce paysage réglementaire, dans le cadre plus général d’une refonte de la nomenclature des ICPE. Dorénavant le classement des installations se base sur la nature des déchets et leur dangerosité potentielle, conduisant à distinguer 2 classes de déchets, dangereux ou non dangereux, et sur le mode de traitement dont ils font l’objet (compostage, enfouissement, incinération ou tri-recyclage). Bien entendu aucun déchet dangereux ne peut être traité par compostage", explique Antoine Tricaud, ingénieur chez Terralys.
Ainsi, le décret de 2009 crée une nouvelle rubrique 2780 dédiée au compostage. Elle concerne l’ensemble des "installations de traitement aérobie (compostage ou stabilisation biologique) de déchets non dangereux ou matière végétale brute", et ce quelle qu’en soit la source. 3 sous-rubriques précisent la réglementation applicable selon la nature des matières premières et les tonnages traités quotidiennement :
Pour les installations qui compostent exclusivement des déchets "verts" (c'est-à-dire les déchets végétaux, les effluents d’élevage et les matières stercoraires), la sous-rubrique 2780-1 instaure une autorisation administrative obligatoire à partir d’un seuil fixé à 30 tonnes par jour de matière traitée. Le principe d’une simple déclaration est conservé pour les sites transformant entre 3 et 30 tonnes/jour de déchets.
La catégorie 2780-2 concerne les plateformes qui traitent la FFOM (Fraction Fermentescible des Ordures Ménagères), les denrées végétales déclassées, les rebuts de fabrication de denrées alimentaires végétales et les boues de station d’épuration des eaux urbaines, de papeteries, d’industries agroalimentaires, seuls ou en mélange avec des déchets "verts". Du fait de la nature des déchets spécifiques (boues, FFOM ou OMR compostables) et de la nécessité d’un suivi plus attentif de leur provenance, le seuil d’autorisation est ici abaissé à 20 tonnes/jour, et celui de la déclaration à 2 tonnes/jour.
Enfin, pour les sites classés 2780-3, qui transforment des déchets autres que ceux visés dans les 2 premières sous-rubriques, notamment des déchets industriels spécifiques, le régime d’autorisation devient systématique, sans seuil quantitatif. "De façon logique, la nouvelle réglementation impose des contraintes plus fortes aux installations de grande capacité, susceptibles d’impacter davantage leur environnement", souligne Antoine Tricaud. "Lorsque la capacité du site et la nature des déchets compostés n’imposent pas la procédure d’autorisation, il suffit de déclarer l’activité en préfecture et de respecter les préconisations d’un arrêté type national (arrêté type en préparation actuellement pour la rubrique 2780). Dans les autres cas, l’autorisation sera délivrée par un arrêté préfectoral spécifique. L’établissement de cet arrêté est effectué sur la base d’un dossier déposé conformément à l’arrêté ministériel du 22 avril 2008 et est soumis à enquête publique afin d’évaluer les impacts environnementaux".
Ces nouvelles règles régissent la création de plateformes de compostage comme l’activité des installations existantes. En ce qui concerne les sites déjà en production, le basculement dans la nouvelle nomenclature se fait à "périmètre constant", sur la base des activités préexistantes, comme l’explique M. Tricaud : "Qu’elles aient été jusqu’ici soumises à autorisation ou bien exploitées sous l’ancien seuil déclaratif, les installations bénéficient du droit d’antériorité prévu par le Code de l’environnement. Elles peuvent se prévaloir de cette historicité sous réserve d’avoir fonctionné 'régulièrement' sous leur ancien régime, et de poursuivre l’exploitation à l’identique".
A condition de ne pas élargir son champ d’activité à d’autres types de déchets, l’exploitant n’est pas tenu, en principe, de déposer un dossier de demande d’autorisation. Et si le préfet peut imposer des prescriptions techniques de fonctionnement motivées par la prévention des risques et nuisances constatés, ces mesures ne doivent pas entraîner de modifications importantes dans le gros oeuvre de l’installation ni dans son mode d’exploitation.
En pratique, la plupart des sites exploités par Terralys relèveront de la 2780-2 car ils compostent à la fois des déchets "verts" et des boues ; la 2780-1 est réservée aux plateformes qui reçoivent exclusivement des déchets "verts". Si l’exploitant peut justifier qu’il transforme également des matières n’entrant pas dans ces 2 catégories, il peut demander le classement en 2780-3. Les intéressés ont un délai d’un an à compter de la publication du décret pour se faire connaître auprès des services préfectoraux, en précisant la nature de leur activité et la quantité de déchets traités chaque jour.
"L’une des difficultés tient au fait que le classement ne se fonde plus sur les quantités de compost sortant, mais sur les tonnages de déchets entrants", conclut Antoine Tricaud. "Il n’y a pas correspondance immédiate entre les anciens et les nouveaux seuils : cela dépend de nombreux critères : type de déchets traités, process utilisé, taille du crible... En tout état de cause, chaque installation recevra, à terme, soit un nouvel arrêté préfectoral, soit une mise à jour de son arrêté préfectoral".
source : Terralys