L'intercommunalité à la croisée des chemins
A l'occasion du congrès des maires, Philippe Séguin, premier président de la Cour des comptes, a présenté hier, le rapport sur «L'intercommunalité en France» qui est l'aboutissement de trois ans d'enquêtes. S'il a salué le succès de son développement et la prise de conscience des acteurs qu'elle doit évoluer, il a insisté d'une part sur l'importance des efforts qu'il reste à accomplir pour simplifier les structures et les rendre plus cohérentes et surtout appeler à une coopération étroite au risque de voir la situation financière évoluer défavorablement...
Très brièvement, voici les conclusions du rapport : Il faut simplifier le paysage intercommunal car on a multiplié le nombre des structures. "Cela tendrait à démontrer que l'échelle territoriale actuelle des communautés d'agglomération et des communautés de communes n'est pas adéquate." La logique de l'intégration n'a pas été conduite à son terme. N'apparaît pas d'une manière flagrante, l'un des objectifs de la réforme, qui était la mutualisation des moyens pour parvenir à la réalisation des économies d'échelle ou améliorer les services. Au niveau financier, la pression fiscale sur le contribuable risque de s'accroître dans les années à venir d'où la nécéssité que les communes progressent dans leur mutualisation et intégration.
Dans son discours Philippe Séguin déclare :"L'intercommunalité ne saurait avoir pour vocation de dépenser toujours plus et de prélever toujours plus de richesse, mais de mieux dépenser en faisant de la mutualisation un objectif en soi et de rechercher toujours à améliorer et à mesurer l'efficacité des politiques territoriales... Il faut rendre compte aux citoyens de ce que l'on fait de l'argent public."
En ce qui concerne l'action de l'intercommunalité à l'égard de la compétence de la gestion des déchets , le rapport de la Cour des comptes souligne : La nouvelle intercommunalité a été l'occasion d'une réorganisation des services publics locaux, au bénéfice des usagers. Il y a lieu d'apprécier dans quelle mesure des économies d'échelle se dégagent, ou à tout le moins de vérifier si la hausse des coûts inévitable en raison des exigences normatives nouvelles, s'accompagne d'améliorations tangibles du service aux usagers. La mise en cause des modes de financement traditionnels, ce qui pose sous un nouveau jour le problème de l'égalité des citoyens usagers devant les charges du service public Il constate la nécéssité d'un périmètre de taille suffisant : si les opérations de collecte peuvent être organisées rationnellement à l'échelle d'un bassin de quelques dizaines de milliers d'habitants, pour les opérations de traitement (incinération, recyclage...) elles sont mieux menées à l'échelle au moins d'une centaine de milliers d'habitants. On conçoit donc bien d'une intercommunalité à deux niveaux. En ce qui concerne la collecte sélective elle paraît difficilement séparable du traitement Concernant l'organisation de la gestion des déchets, elle relève des Plans départementaux d'élimination des déchets ménagers et assimilés dont l'interprétation a été ultérieurement revue dans le sens d'un moindre recours à l'incinération. La gestion intercommunale est indispensable lorsque l'on doit décider d'un nouvel investissement suite à la fermeture d'une UIOM. C'est ainsi que faute d'intercommunalité la ville de Dieppe se retrouve en 2004 à devoir porter seule un projet de mise aux normes en matière de fumées dimensionné pour une capacité de 45 000 tonnes de déchets alors que la production de la ville n'est que de 19 000 tonnes et que deux syndicats de communes voisines se sont retirés de l'opération. Les difficultés relevées par les chambres régionales proviennent des montages en cascade : trop grand nombre d'échelons : risque de doublons, de coexistence de compétences similaires. En cas de désaccord entre collectivités locales, cela se complique : exemple de la communauté de communes du Delta Sèvre-Argent, membre du syndicat mixte de Val de Loire, qui est lui même membre du syndicat mixte de traitement et d'élimination des déchets dans les Deux Sèvres. Dans l'ensemble des secteurs "rarement possible d'observer de mettre en évidence un gain purement financier lié à la réorganisation des périmêtres". Les hausses ont été accompagnées d'amélioration des services : pour les communautés de petite taille service amélioré et économies d'échelle (plus de cohérence dans la collecte, aides financières au tri sélectif) . Par contre pour les communautés plus importantes, elles ne semblent pas toujours bénéficier d'une amélioration du service : à Dijon la transformation du district en communauté a été sans incidence. Idem pour l'agglomération de Nevers. En fait, il est difficile d'évaluer de manière plus précise l'impact des restructurations intercommunales sur la gestion des services publics en évolution comme la gestion et la valorisation des déchets ménagers faute souvent d'outils comptables, méthodologiques adaptés. Par contre il ya peu de cas de hausses de coûts sans amélioration du service. En définitive, c'est "d'une certaine manière à cause de l'intercommunalité que certains services sont devenus plus coûteux, car sans elle, certains progrès dans la qualité du service n'auraient pas pu être réalisées" Recommandations : Plus d'information à l'égard de l'usager via des indicateurs pertinents permettant de rendre compte de l'évolution du service rendu , mais aussi des charges pesant sur le contribuable. Poursuivre l'effort de clarification et d'harmonisation des financements de services intercommunaux qui doivent, dans toute la mesure du possible rester compatibles avec le principe d'égalité des usagers devant les services publics |
Pour en savoir plus : Lire le rapport de la Cour des comptes sur l'intercommunalité