
Rendez-vous était donné dans un havre de paix, un endroit hors du temps, pour parler du temps qui est passé… Patrick de Noray et son équipe fêtaient en effet les 20 ans de l’ACN ; l’occasion de revenir sur un parcours parfois parsemé d’embûches (le recyclage des ELA ayant été controversé, bien des fois…) et de défis nombreux qui ont été relevés… C’était sans compter la volonté de faire mieux. Jeudi 24 mars, on a donc eu droit à une rétrospective des événements qui ont jalonné la vie des déchets d’emballages cartons pour liquides alimentaires au cours de ces 20 dernières années, mais aussi à l’annonce d’investissements majeurs, en France, destinés à recycler les ELA, pour de bon…

Depuis 20 ans, ACN, qui a vocation d’encourager le tri, la collecte et le recyclage des briques alimentaires en étroite collaboration avec les collectivités locales, est impliquée dans la recherche & développement pour optimiser la gestion des emballages en fin de vie.
ACN propose également son expertise aux centres de tri pour les aider à optimiser la qualité et la quantité de briques triées…
Retour sur un parcours qui force le respect…

Créée en 1990 à l’initiative des fabricants de briques alimentaires, l’association Alliance Carton Nature s’est donnée pour mission d’améliorer le taux de recyclage de l’emballage brique. A l’époque, il y avait fort à faire, pour ne pas dire tout à faire…
A la tête de la structure, un homme extraordinaire, qui a su au fil des années défendre le produit, tout autant que le matériau, auprès des pouvoirs publics, des collectivités locales, des centres de tri et des recycleurs. Ce magicien, c’est René Hautin…
Car il est vrai qu’au tout début, il aurait mieux valu incinérer les briques qui disposent d’un fort pourvoir calorifique, et prendre le temps de travailler la recyclabilité et le recyclage de cet emballage complexe. Mais non : au lieu de l’incinération dans les règles de l’art, on s’est mis en tête de pratiquer le recyclage matière quand celui-là n’était pas possible ou presque…
La brique s’est retrouvée dans l’arène, sujette à bien des critiques, quant à son taux de recyclage ridicule, tant les centres de tri n’étaient pas encore adaptés au tri de ce type de produit…
Environ 100 000 tonnes de briques sont mises sur le marché en France chaque année ; 75% de ce type d’emballage est fabriqué à partir de matière renouvelable ; 98% du carton utilisé par les membres d’ACN est produit en Europe du nord (Finlande et Suède).Une brique alimentaire vide et sans bouchon pèse seulement 26g ; dans ce contexte, un camion peut transporter 600 000 briques à plat et 946 000 briques en rouleaux. Dans un autre registre un camion chargé de briques alimentaires est constitué à 95% avec le contenu et seulement 5% d’emballage (palette et emballage secondaire inclus). Les fibres de carton de la brique alimentaire peuvent être recyclées 6 fois en moyenne. Si le recyclage effectif des déchets d’emballages briques alimentaires constituent le point faible de cet emballage hors pair, le taux de recyclage de la brique augmente chaque année. Il est passé de 8% en 2000 à 43% en 2010. |
Pendant des années, le recyclage des ELA ne cassait pas des briques…Et le temps passe… On passe d’un taux de recyclage de 8% en 2000 à un peu plus de 40% dix ans plus tard…
C’est sans conteste, la grande fierté de l’équipe de Patrick de Noray… Consciente des progrès qu’il reste à accomplir, l’Alliance continue son action, avec deux axes prioritaires : l’éducation des jeunes générations et la recherche de débouchés pour les composants polyéthylènes et aluminium, afin que l’emballage brique, soit effectivement recyclé le plus possible et en France si possible.


« Lorsque nous avons décidé de créer ACN, notre premier objectif était d’informer les consommateurs sur le bon profil environnemental de notre emballage, composé à 75% de carton issu du bois, puis de les sensibiliser à l’importance du tri des déchets », souligne René Hautin, président d’ACN entre 1990 et 1997. « Dès 1994, nous avons axé notre action vers les enfants, avec l’opération Robin des Briques, qui proposait une collecte massive des briques de lait dans les écoles et sensibilisait les élèves à l’importance du tri » ajoute l’ancien président.
Mais on ne s’arrête pas là : « la décennie 90 voit également la naissance de Brikkado, opération phare de l’association jusqu’en 2007. Lancée en 1996 en partenariat avec l’UNICEF, elle a permis d’éveiller la fibre éco-citoyenne des élèves de 17 000 écoles ».

Leur objectif ? Optimiser les systèmes de collecte, de tri et de recyclages des briques alimentaires, en apportant leur expertise technique et en mettant en contact tous les acteurs de la chaîne du recyclage


« Aujourd’hui, on peut se féliciter du chemin parcouru : le tri est entré dans les moeurs. Cela étant, il est nécessaire de travailler à ce que toutes les briques alimentaires produites sur le marché français soient effectivement recyclées. « En 2010, le taux de recyclage des briques alimentaires s’élevait à 43%, ce qui est déjà un très bon résultat. Nous travaillons à améliorer encore ce taux », explique Patrick de Noray, actuel Président d’ACN. Si l’association a été très active auprès du grand public et des services territoriaux durant cette période, elle a également travaillé avec les recycleurs en facilitant la coordination avec les centres de tri et soutenu les industriels, en proposant à partir de 2008 l’Engagement de reprise sur les déchets industriels.

Le Grenelle fixe les objectifs de recyclage qui visent 75% de taux de recyclage en 2012 ; si certains emballages ne connaissent guère de difficultés pour atteindre les objectifs, d’autres en revanche, se lancent dans la compétition avec un handicap.
C’est le cas des briques alimentaires…
Bénéficiant de l’activité d’un précurseur, Matussière et Forest, premier industriel papetier à avoir mis au point un papier 100% fibres recyclées, premier aussi à avoir proposé un papier recyclé blanchi sans chlore, la brique collectée était largement écoulée via l’usine de Rambervillers… qui absorbait 60% de ce qui était collecté.
Oui mais voilà…
Le précurseur était sans doute trop en avance. En 2004, on annonce que le papetier va mal. Rapidement, rien ne va plus. Un repreneur se manifeste… Mais c’est sans les activités de ce type…
Puis Matussière disparaît du paysage papetier français…
Il n’y a plus alors de repreneur français pour les déchets d’emballages de briques alimentaires. L’Allemagne et l’Espagne captent le gisement français ; Stora Enso bénéficie en Espagne d’une capacité de traitement de 100 000 tonnes…
Cela étant, il devenait évident qu’il faille restaurer de quoi recycler en France…
C’est chose faite. On ne peut que s'en réjouir!

Basé non loin d’Epinal, l’industriel qui appartient au groupe Italien Lucart, s’est équipé moyennant un investissement de 10 millions d’euros, pour recycler 35 à 40 000 tonnes par an de briques alimentaires qui seront transformées en papier d’essuyage industriel, essuie-tout ménager et papier toilette…
« Ce sera la première fois qu’on sera en mesure de proposer un produit issu à 100% du recyclage des briques alimentaires… Le process complet dure environ 60 minutes, indique Hervé Kraemer, le directeur du site. Notre unité atteindra sa vitesse de croisière dès 2013... mais il est bon de noter que notre produit est d’ores et déjà agréé "contact alimentaire"…
Pour l’heure 1/3 du PE/Aluminium est recyclé ; notre objectif est de doper cette fraction dans la mesure où nous disposons de débouchés possibles pour environ 3 000 tonnes par an. Il faut donc pouvoir fournir les granulés et satisfaire cette demande, puisqu'elle existe », complète Patrick de Noray…

« Le polyéthylène et l’aluminium sont aujourd’hui recyclés et utilisés dans l’industrie, notamment pour la fabrication de piquets de vignes et de mobilier urbain, mais ces débouchés ne sont pas suffisants pour utiliser l’ensemble de la matière issue du tri français. Nous travaillons donc à trouver de nouveaux débouchés et espérons pouvoir annoncer prochainement le recyclage à 100% des trois matériaux constituant la brique alimentaire… A terme, il est clair qu’il faudra éliminer le mot déchet du vocabulaire dédié aux emballages destinés au recyclage »… conclut le président Patrick de Noray.


Environ 100 000 tonnes de briques sont mises sur le marché en France chaque année ; 75% de ce type d’emballage est fabriqué à partir de matière renouvelable ; 98% du carton utilisé par les membres d’ACN est produit en Europe du nord (Finlande et Suède).