"Inspire": nouvelle association écologique...
Le Grenelle de l'Environnement inspire... C'est le moins que l'on puisse dire. Une nouvelle association écologique est née : elle est fondée sur un nouveau contrat avec le vivant. L'association "Inspire"... (Initiative pour la Promotion d'une Industrie Réconciliée avec l'Ecologie et la société) a été créée pour répondre à ce paradoxe : nous savons ce qui se passe ; nous avons pris conscience de l'urgence écologique ; nous connaissons une bonne partie des solutions - et pourtant nous avons l'impression de ne pas avancer assez vite, ni assez loin...
Le Grenelle de l'environnement s'est saisi des questions d'emploi et de compétitivité. L'éco-conception, l'économie circulaire et l'économie de fonctionnalité ont été débattues. Des recommandations ont été émises, mais leur traduction en actes prendra du temps. Peut être plus de temps que nous n'en avons. Il faut maintenant agir, concrètement, sur le terrain, pour mettre en œuvre les changements stratégiques qui s'imposent. Nous devons dès maintenant détecter les pionniers, valoriser leurs expériences, rechercher et diffuser les savoirs utiles pour les mettre en œuvre, dans un contexte inédit d'inversion des raretés (1).
Inspire... se positionne comme une courroie de transmission entre la recherche nationale et internationale de haut niveau et les besoins des entreprises et des collectivités sur le terrain.
Ses actions de veille internationale, de diffusion des savoirs et d'accompagnement à la mise en œuvre se concentrent sur quatre thèmes clés :
L'augmentation radicale de la productivité des ressources naturelles, matière et énergie,?
L'économie circulaire (2), la bio-inspiration et le bio-mimétisme (3) comme moteurs pour l'innovation,
La recherche de nouveaux modèles économiques basés sur les services : l'économie de fonctionnalité(4),
Le ré-investissement dans le capital naturel (5), pour restaurer la pleine fonctionnalité et le potentiel d'évolution des écosystèmes.
Pourquoi agir aujourd'hui ? L'entreprise peut chercher à améliorer sa rentabilité, en augmentant sa productivité dans l'utilisation des matières premières et de l'énergie. Elle peut chercher à développer, par l'innovation, de nouveaux modes de relation avec sa clientèle. Elle peut aussi chercher à pérenniser son activité en la rendant moins dépendante de ressources devenues rares, et en consolidant les services écologiques dont son activité dépend. Du coté des collectivités et des états, une réflexion sur une nouvelle forme de régulation - et de fiscalité - devrait être entamée, fondée sur les consommations de nature, énergie fossile, énergie verte, consommation de biomasse, prélèvements de ressources renouvelables ou non, en lieu et place des régulations actuelles fondées sur le capital manufacturier et le travail.
Inspire... a été fondée par Emmanuel Delannoy, représentant de la Ligue ROC au groupe Emploi et compétitivité du Grenelle de l'environnement. L'initiative est soutenue par de nombreuses personnalités de haut niveau, comme Dominique Bourg, professeur à l’université de Lausanne, membre du Comité de veille écologique de la Fondation Nicolas Hulot ; Bernard Chevassus-au-Louis, Président du conseil Scientifique du CIRAD, ancien président du Museum National d’Histoire Naturelle ; Hubert Reeves, Astrophysicien, président de la Ligue ROC ; Michel Trommetter, Economiste, directeur de recherches à l’INRA ; Jacques Weber, économiste au CIRAD, directeur de l’Institut Français de la Biodiversité.
______________________
1. L'inversion des raretés repose sur un constat simple : ce que nous avions cru abondant depuis un siècle et demi, notamment les ressources énergétiques fossiles (pétrole et charbon) ainsi que certains minerais, devient de plus en plus rare, et la production mondiale ne peut plus répondre à l'accroissement de la demande. Cette rareté relative est aussi valable pour de nombreuses ressources issues du vivant (comme le bois ou le poisson, par exemple), qui ne sont renouvelables que dans la mesure ou nos prélèvements sont inférieurs à la capacité de production des écosystèmes. Dans le même temps, ce qui était autrefois rare comme le savoir, les compétences et la capacité de travail, est aujourd'hui abondant. L'information circule désormais instantanément sur les réseaux mondiaux. Ce changement de paradigme appelle une nouvelle révolution industrielle, qui devra être fondée sur un nouveau contrat avec le vivant.
2. Economie circulaire : aussi appelée écologie industrielle, L'économie circulaire s'intéresse aux interactions entre les différents systèmes de production industrielle et entre les systèmes de production industrielle et les systèmes écologiques. Elle cherche à rapprocher le fonctionnement des industries de celui des écosystèmes, par exemple en utilisant les déchets produits par une industrie comme matière première pour une autre (on parle aussi de symbioses industrielles).
3. La bio-inspiration et le bio-mimétisme visent à copier les formes et les procédés du vivant pour innover. L'économie circulaire s'inspire du fonctionnement des écosystèmes qui fonctionnement en circuit fermé en recyclant les nutriments. De nombreuses applications ont été conçues par bio-mimétisme : l'une des plus connues est le Velcro, inspiré de la Bardane, mais on pourrait aussi citer certains verres autonettoyants dont la surface s'inspire de la structure microscopique des feuilles du Nymphea®, ou de certains pneus neige qui copient les pattes du Gecko. De nombreux défis restent à relever : la soie des araignées, par exemple, est à la fois plus solide et plus souple que le Kevlar®, toute en étant produite à température ambiante avec des matériaux organiques communs et sans composés toxiques. Innover par biomimétisme est un moyen de recréer du lien entre les activités industrielles et le vivant. Des royalties pourraient être versées par l'entreprise à ses inventeurs , à travers le financement d'action de conservation par exemple.
4. L'économie de fonctionnalité vise à valoriser l'usage et le service rendu par un bien plus que le bien en lui même. Les produits sont alors conçus pour durer plus longtemps, pour s'adapter à la demande de manière évolutive, et pour être éventuellement ré-utilisés par plusieurs utilisateurs successifs. De nombreux exemples démontrent la pertinence de ce modèle, comme par exemple dans reprographie. Plus aucune entreprise n'achète son propre photocopieur aujourd'hui. Elle loue un équipement, son loyer étant indexé sur sa consommation réelle de copies. La capacité de l'équipement est adaptée en permanence au besoin réel de l'entreprise utilisatrice, par le producteur du bien qui se charge aussi de la maintenance. L'économie de fonctionnalité s'applique aujourd'hui à des domaines aussi divers que le chauffage des locaux, les pneumatiques de camions, ou les moquettes de bureaux.
5. Toute activité économique repose sur la disponibilité de biens ou de services fournis gratuitement par les écosystèmes. Cela va de la production de matériaux, comme le bois, le recyclage et le traitement écologique de l'eau, la pollinisation des cultures, jusqu'à la régulation du climat local et global ou la temporisation des intempéries, comme le contrôle des inondations. Ces biens et services environnementaux constituent pour l'entreprise un capital naturel, à valoriser et à entretenir au même titre que le capital financier, le capital productif (les machines), ou encore le capital immatériel (brevets et savoirs faire).