Incinération : le torchon brûle entre les « Pro » et les « Anti »…
L’incinération fait débat, ce n’est pas nouveau. Sauf que la tension est récemment montée d’un cran : le collectif "Alliance pour la Planète" a, en effet, convié la presse pour faire le point (voir notre article du 2/4/2007) et promouvoir un moratoire contre l'incinération. Une idée qui a fait son chemin, on l’imagine bien, à la veille et pendant les élections présidentielles : plusieurs candidats se sont en effet, prononcés en faveur de ce moratoire (voir, là encore, nos rédactionnels).
Pour Tiru, c’en est trop et Luc Valaize, Directeur Général du Groupe, monte au créneau...
Pourquoi un moratoire contre l’incinération serait une erreur pour la France ?
Les faits parlent d’eux-mêmes : en 2006, comme en 2005, l’incinération a été la deuxième source d’énergie renouvelable en France, derrière l’hydraulique mais loin devant l’éolien et le solaire. Par exemple, quand un champ d’éoliennes produit de l’électricité 2000 heures par an, nos usines en produisent pendant plus de 8000 heures. Nul besoin de vent, de pluie ou de soleil pour produire l’énergie verte à partir de nos déchets : la poubelle de chacun de nous est pleine chaque matin ! Cette année encore, les professionnels du secteur en France ont transformé 13 millions de tonnes de déchets en énergie, soit l’équivalent de 7 millions de barils de pétrole économisés. Ajoutons que cette énergie verte est produite dans des usines propres ayant bénéficié d’un investissement global de 700 millions d’euros en 2005 pour installer les traitements de fumée complémentaires requis par les nouvelles normes européennes. Aujourd’hui les 123 incinérateurs français rejettent deux fois moins de dioxines par an que les feux domestiques. Et, comme le souligne l’Ademe, ces incinérateurs ont un impact favorable sur l’effet de serre. Au moment où tout le monde ne parle que de crise énergétique et de réchauffement de la planète, il est urgent de mettre en avant les vertus écologiques de l’incinération !
L’incinération représente-t-elle un risque pour la santé publique ?
Non : d’après l’Organisation Mondiale pour la Santé, « L'incinération des déchets est une méthode hygiénique qui permet de réduire le volume et le poids de ces déchets, tout en réduisant son potentiel de pollution ».
(Source : OMS – Habitat et santé – Brochure déchets)
Les experts scientifiques auteurs d'études sur l'impact sanitaire, concluent que pour des installations conformes à la réglementation en vigueur - comme le sont les 123 usines du parc français actuel - les risques associés peuvent être considérés comme négligeables. Les risques calculés (malgré des facteurs pénalisants à chaque incertitude) sont en effet bien inférieurs aux risques rencontrés dans la vie de tous les jours (accidents domestiques, automobile, intoxication alimentaire...).
L’OMS considère comme nul, le risque des incinérateurs sur la santé publique.
De plus, les conclusions des études épidémiologiques menées par l’INVS et l’AFSSA en 2006 établissent l’absence de risques sanitaires associés aux unités actuelles de valorisation énergétique des déchets
(Source : Etude imprégnation dioxines de l'Institut National de Veille Sanitaire )
Les nouveaux incinérateurs sont-ils propres et sans danger ?
Oui : depuis le 28 décembre 2005, tous les incinérateurs sont soumis à de nouvelles « normes », toujours plus strictes en matière de rejets et de protection de l’environnement. Pour les dioxines, par exemple, avec les nouvelles normes européennes, les incinérateurs doivent rejeter moins de 0,1 ng / Nm3. Ils émettent bien moins de dioxines que les feux domestiques.
(Voir : Publication de l'Institut d'Aménagement et d'Urbanisme de la Région d'Ile-de-France )
Quant aux fumées, la visibilité du panache est due à la condensation de la vapeur d’eau contenue dans les fumées. Cette eau provient pour partie de l’eau contenue dans les déchets et pour partie du lavage des fumées quand un procédé par voie humide est mis en œuvre avant le rejet dans l’atmosphère. Quand la clarté de l’atmosphère diminue, elles peuvent paraître grises, comme les nuages, mais leur composition reste inchangée.
La valorisation des mâchefers est-elle dangereuse pour l’environnement ?
Non : La valorisation des mâchefers, résidus minéraux de l’incinération des OM, est régie par la circulaire ministérielle du 9 mai 1994, à laquelle se réfèrent les arrêtés d’exploitation des UIOM.
Le contrôle des mâchefers, en vue de leur valorisation, effectué à la sortie des fours permet de définir 3 catégories de mâchefer : mâchefers « V »(directement valorisables), mâchefers « M » (nécessitant une période de maturation (naturelle) à l’issue de laquelle les mâchefers deviennent « V ») et mâchefers « S » (non valorisables, mis en centre d’enfouissement technique de catégorie 2).
L’utilisation des mâchefers « V » évite d’avoir recours aux matériaux naturels prélevés dans les rivières ou dans les carrières. L’usage de ces derniersdans les conditions de la circulaire du 9 mai 1994 est sans danger pour l’environnement
(Sources : étude ADEME/SVDU de mars 2001 ; évaluation de l’impact environnemental de juillet 2003 ; caractérisation et impact des dioxines de janvier 2002 par l’INERIS )
L’incinération fait-elle disparaître les déchets ?
Non mais elle fait disparaître les nuisances : les odeurs, les risques infectieux, l’encombrement : sans incinération, les 13 millions de tonnes d’ordures que traite cette activité rempliraient chaque année 13 000 piscines olympiques. Sans incinération, l’ensemble des ordures collectées serait stocké en décharge sur une surface de 100 000 mètres carrés (soit 15 terrains de football) avec une hauteur de 40 mètres (soirt la hauteur d’un immeuble de 13 étages).
L’incinération est-elle une opération de valorisation ?
Oui : la combustion des déchets permet la production d’énergie. Chaque année TIRU valorise en énergie plus de 4 millions de tonnes de déchets soit l’équivalent de 420 000 habitants chauffés et 550 000 habitants alimentés en électricité. Selon le rapport DGEMP-DIDEME 2004, l’incinération se positionne en deuxième source de production d’énergies renouvelables derrière l’hydraulique.
(Voir : http://www.industrie.gouv.fr/energie/renou/biomasse/incineration-om.htm)
L’incinération est-elle une source d’énergie renouvelable permettant de lutter contre l’effet de serre ?
Oui : l’effet de serre est produit partiellement par les émissions dans l’atmosphère de gaz, comme le dioxyde de carbone (CO2) et le méthane (CH4). L’effet du méthane est 22 fois plus important que celui du dioxyde de carbone.
L’incinération produit du dioxyde de carbone qui provient de la combustion du carbone contenu pour plus de la moitié dans la biomasse (déchets verts, papier, carton, cellulose) et pour l’autre moitié, dans les matières comme les matières plastiques qui ont été produites à partir de carbone fossile. Cette distinction est importante car le CO2 issu de la combustion de la biomasse ne contribue pas à l’impact sur l’effet de serre. Le CO2 est ainsi recyclé par photosynthèse par les végétaux lors de leur croissance et permet donc de refaire de la biomasse.
De plus, dans la mesure où l’incinération est effectuée avec récupération d’énergie, les déchets brûlés permettent d’économiser un combustible fossile, ressource de la planète.
Pour résumer, l’incinération avec valorisation énergétique élimine les nuisances du déchet mais elle a aussi un effet positif sur l’effet de serre : elle évite la production de méthane comme dans une décharge (l’incinération génère moins de gaz à effet de serre que les décharges avec ou sans récupération de bio gaz.
(Source Ademe, octobre 2003 ) et plus de 50% du CO2 sont recyclés.
Enfin, elle produit de l’énergie qui permet d’économiser du combustible fossile.
L’incinération crée-t-elle des emplois et est-elle favorable à l’économie locale ?
Oui : un incinérateur a une durée de vie relativement longue (30 à 40 ans) et, tout au long de sa mission, ce sont des dizaines de métiers qui se côtoient sur le site.
Depuis la construction de l’usine qui génère en local (pour un incinérateur de taille moyenne) plus de 100 emplois pendant toute la durée des travaux (18 à 24 mois), jusqu’à son exploitation au quotidien qui nécessite l’intervention des employés du site, mais également des différents prestataires qui interviennent en maintenance sur ce dernier.
D’autre part, grâce à l’énergie produite dans les usines d’incinération, il est possible d’alimenter en vapeur ou en électricité, n’importe quelle autre unité industrielle (laiterie, papeterie, usine d’assemblage de voiture) qui viendrait s’implanter dans le périmètre de l’usine. Ce qui permet de développer et de soutenir d’autres secteurs d’activité ayant besoin d’énergie.
Enfin, depuis 2005, Tiru étudie l’implantation de parcs éoliens sur les terrains de ses usines ou encore l’installation de panneaux photovoltaïques. A terme un site de traitement des déchets sera vraiment un parc énergétique où différentes méthodes de production d’énergie renouvelable se côtoieront. Ce procédé créera des emplois connexes et renforcera l’activité économique de la commune porteuse du projet.
L’incinération des déchets est-elle un frein au développement des filières alternatives ?
Non : les pays européens qui ont une politique de réduction à la source des déchets très marquée avec un fort développement du tri-recyclage : le Danemark, la Suisse, les Pays-Bas, la Suède, la Belgique et enfin l’Allemagne sont également les pays qui ont le plus recours à l’incinération en % par rapport à l’ensemble des filières de traitement des déchets. La France n’arrive qu’en 7ème position.
(Source : BREF Incinération juillet 2005 )
Les technologies mises au point et la volonté de performance environnementale conduisent les exploitants d’unités de traitement des déchets à proposer des installations combinant plusieurs techniques de valorisation.
Aujourd’hui, il faut arrêter d’opposer les filières de traitement les unes aux autres. De manière idéale, il faudrait en amont trier les déchets recyclables (verre, papier, plastique, DEEE, etc.) au maximum (30%), en parallèle extraire la partie fermentescible de chaque poubelle pour être envoyée vers des usines de méthanisation, ce qui permet d’obtenir du compost réutilisable en agriculture et de l’énergie à partir du biogaz (30%) et envoyer la partie non recyclable vers les centres d’incinération qui valoriseront sous forme d’énergie les déchets reçus (30%). Enfin les déchets ultimes (10%) devraient être envoyés en décharge. Actuellement ce sont plus de 40 % de notre poubelle qui vont directement en décharge.
En conclusion ce que l’on peut dire, c’est que l’incinération n’est pas un frein au développement de solutions alternatives, c’est un procédé complémentaire.
L’incinération est-elle indispensable pour réduire la mise en décharge ?
Oui : c’est le seul procédé qui permet une réduction de volume des déchets très importante, de l’ordre de 90%, et de récupérer l’énergie contenue dans les déchets pour alimenter un réseau de chaleur et/ ou pour produire de l’électricité.
Les déchets ultimes produits par l’incinération représentent moins de 1 % en volume du tonnage traité, le recours à la décharge est ainsi très limité.
Les incinérateurs requièrent peu de surface au sol et, en fin d’activité, le terrain peut être ensuite restitué pour y implanter une autre activité ou des habitations.
L’incinération ne produit pas de méthane alors que, dans le meilleur des cas, pour une décharge, seule une partie du méthane produit est capté et au moins 20% s’échappent directement à l’atmosphère.
L’incinérateur peut être implanté au plus près des producteurs et donc minimise les coûts de transport et les émissions de gaz à effet de serre associées. C’est un procédé bien adapté en milieux urbains denses.