Gestion des déchets : la Cour des Comptes épingle Genève
Si la situation dans sa globalité est satisfaisante, puisqu’elle laisse apparaître des filières qui fonctionnent, des besoins bien couverts, des flux de déchets maitrisés, une proportion des déchets ménagers incinérés à la baisse et un taux de recyclage à la hausse (il est passé de 32% en 2000 à 45,5% en 2012, mais demeure plus bas que le taux moyen suisse, établi à 50%), restent quelques points à améliorer (d’où 32 recommandations, dont 28 ont été acceptées par les acteurs concernés, avec à la clé la perspective de faire plus de dix millions de francs d’économies), mais surtout un point noir au tableau : Genève se refuse depuis toujours à taxer les sacs-poubelle (afin d’inciter les consommateurs à jeter moins grâce au tri des déchets) et n’affiche aucune volonté de faire autrement, quand bien même elle déroge aux exigences en vigueur (Cf loi fédérale sur la protection de l’environnement).
De fait, il n’y a que le Valais et Genève qui font exception au principe du pollueur-payeur… Et donc, l’explication est de mise ; sauf qu’il semble difficile de démontrer qu’avec le système de la non taxation au sac, on obtienne un meilleur taux de recyclage… ce qui fait qu’il se pourrait qu’on remettre Genève sur le chemin classique, la Cour ne jugeant pas sur le fond mais sur la juste application du droit.
« Il est possible de ne pas adopter cette taxe à Genève, car la loi tolère des exceptions», a indiqué Stanislas Zuin, magistrat à la Cour des Comptes. Mais pour en bénéficier, il est impératif de fournir les pièces justificatives, avec en conséquence, des données concrètes, les raisons qui justifient une dérogation, et les réexaminer périodiquement. Il est par exemple, admis que si l’introduction de la taxe au sac génère trop de décharges sauvages (des décharges sauvages sont apparues un peu partout où la taxe au sac a été introduite, bien que ça se soit arrangé avec le temps ndlr), il vaut mieux y renoncer. Mais la Cour des Comptes constate dans son rapport que « ni l’Etat, ni les communes, n’ont fourni la moindre justification, ce qui place Genève dans une situation juridique délicate par rapport aux exigences fédérales». A cela s'ajoute qu'en 2000, le Conseil fédéral a été clair : l’usage de l’exception est limité dans l’espace et dans le temps.
Genève ne fait pas la sourde oreille mais tente de temporiser, estimant que la carotte vaut mieux que le bâton, avec pour argument les résultats affichés attestant de progrès sensibles ; le Canton a adressé une réponse écrite au rapport, indiquant qu'il s’exécutera éventuellement en 2017, et ce, s’il n’a pas atteint son objectif d’ici là (le Plan cantonal de gestion des déchets 2014-2017 vise les 50% de taux de recyclage). Le cas échéant, l’Etat étudiera alors, l’opportunité d’introduire la taxe au sac, ou documentera « à ce moment-là seulement » les raisons lui permettant selon lui, de continuer à bénéficier de l’exception prévue par la loi.
Du côté de la Cour, on ne manque pas d'arguments contraires : un bon taux de recyclage ne constitue pas une alternative au principe du pollueur-payeur, tandis que le financement du traitement des déchets par l’impôt est contraire au droit fédéral (du fait qu'il n'y a alors aucun effet incitatif pusique la quantité des déchets produits par les contribuables n’influe en rien le montant des impôts à payer)...
La Cour a également pointé du doigt la sorte de lenteur avec laquelle Genève développe la collecte des biodéchets et des déchets verts ; à la décharge du Canton, l'unique installation de traitement de ce type de déchets est en fin de vie.. Il est également rappelé que les communes du Canton doivent tout mettre en oeuvre pour mutualiser leurs moyens, généraliser les appels d’offres à compter d’un certain montant…
Enfin, la Cour des comptes suggère d'étudier la prolongation de trois ans de l'usine d'incinération des Cheneviers – dont la mise hors service est actuellement prévue en 2022 – afin de générer davantage de réserves financières qui serviront à rembourser une partie de ses dettes (60 millions de francs) et à financer sa déconstruction (14 millions de francs estimés). Pour l'heure cette UIOM, propriété des Services industriels de Genève, est la plus chère de Suisse : 24% de ses coûts sont liés à des décisions historiques, et parfois d'ordre politique. Aussi, la Cour souhaite que les exploitants du site revoient les charges... Ce qui est sûr, c'est que Cheneviers IV, sera en mesure de pratiquer des tarifs du même ordre que le niveau moyen en Suisse...