Filières REP : le temps de la consolidation serait-il venu ?
Les parlementaires constatent aussi que « la pression financière et politique est d’abord placée sur le citoyen consommateur, désigné comme le pollueur ». « Il lui est demandé de diminuer sa production de déchets, de financer pour une grande partie la gestion des déchets, tout en ayant un comportement le plus vertueux possible », écrivent Évelyne Didier et Esther Sittler dans leur rapport. Elles recommandent donc que « la politique des déchets ne se traduise pas à l’avenir, par un alourdissement supplémentaire des coûts pour le citoyen ».
Le rapport indique que les résultats obtenus sur le plan de l'écoconception sont très variables selon les filières. Pour les emballages, le bilan est globalement positif. Les modulations de contribution ont eu un réel effet incitatif sur l’écoconception de certains produits, du fait de la part de la contribution dans le coût total du produit. Le bilan est plus nuancé pour les équipements électriques et électroniques. La contribution (visant à traiter le futur déchet ou DEEE) y est marginale par rapport au prix total du produit. Les critères de modulation sont difficiles à définir pour ce type de produits et l’incitation se trouve nécessairement limitée dans le cadre de marchés mondialisés. La filière papier a obtenu de meilleurs résultats. L’éco-organisme de la filière a mené de longue date un travail sur l’écoconception. Mais cette filière est pénalisée par des exemptions, en particulier pour la presse et les magazines, ainsi que les documents officiels.
Au vu de ces résultats, améliorer le dispositif de modulation des contributions est une nécessité. Il s’agit en particulier d’augmenter l’ampleur des modulations et d’étendre leur application à l’ensemble du cycle de vie des produits.
Ces résultats en demi-teinte conduisent à s’interroger sur l’efficacité de la structuration et du fonctionnement des filières La collecte des gisements demeure imparfaite, ce qui limite les incitations à l’écoconception. Des efforts de communication et de simplification du geste de tri doivent donc être entrepris tout en évitant la hausse des coûts de gestion pour le citoyen. Les débouchés pour les produits issus du recyclage doivent être consolidés. La commande publique peut jouer un rôle d’accélérateur dans ce domaine.
Le contrôle insuffisant des pouvoirs publics conduit à ne pas collecter l’intégralité des gisements et à ne pas percevoir l’ensemble des contributions dues par les entreprises. Il est dès lors nécessaire de renforcer le contrôle de l’État, dont le financement pourrait être assuré par un prélèvement sur les contributions perçues par les éco-organismes.
Pour améliorer la performance des filières en termes de collecte et de traitement des déchets, la gouvernance, les procédures d’agrément et le nombre d’éco-organismes par filière doivent être revus.
C'est ainsi que sont formulées 22 recommandations. Parmi elles, il est question d’engager « une réflexion sur l’opportunité de réintroduire une consigne en France sur un certain nombre de flux de déchets », comme les bouteilles en plastique et en verre, les piles ou les batteries, « d’accentuer l’effort de communication sur le geste de tri » et d’« harmoniser les consignes de tri sur le territoire ainsi que, progressivement, la signalétique des bacs de collecte ».
S’agissant du contrôle par les pouvoirs publics, les sénatrices estiment qu’il est « insuffisant ». Et « conduit à ne pas collecter l’intégralité des gisements et à ne pas percevoir l’ensemble des contributions dues par les entreprises ». C’est pourquoi, elles proposent en particulier de « faire appliquer strictement la réglementation relative aux entreprises non déclarantes au sein de chaque filière », en majorant, le cas échéant, les amendes administratives encourues. En conclusion, Évelyne Didier et Esther Sittler recommandent de faire « une pause » avant de lancer de nouvelles filières REP.
Pour en savoir plus : Rapport de la commission durable sur les filières REP et l'éco-conception.