Filières déchets d'emballages : pour le CNR, il n'y a pas de quoi pavoiser
Si le bilan d’activité à mi-agrément des sociétés agréées Eco-emballages et Adelphe a été présenté aux membres de la commission consultative «emballages ménagers», le 2 octobre dernier, puis tout récemment publié sur le site de l'Ademe, s'il conclut que la quasi-totalité des obligations et engagements (99,5 %) inscrites au cahier des charges est jugée comme respectée par les deux éco-organismes, si un satisfecit leur a d'ailleurs été délivré à cet égard, les collectivités membres du CNR ont néanmoins "comme un nœud dans le gosier" : la prise en compte des deux objectifs principaux visés par le dispositif de la REP, à savoir l’atteinte du 75 % de recyclage matière et organique des déchets d'emballages ménagers et de 80 % de prise en charge des coûts nets de référence supportés par les collectivités territoriales, sont deux points qui ne sont pas au rendez-vous...
Dans ce contexte, une fois encore, le Cercle National du Recyclage dénonce fermement « cette appréciation infondée e la performance des sociétés agréées en totale incohérence avec les textes encadrant le fonctionnement de la filière » et ne manque pas de fournir des arguments pour justifier sa prise de position.
Pour visualiser le rapport : c'est ici
Une lecture du cahier des charges «à décharge»... La première erreur d’analyse, selon le Cercle, procède avant tout d’une lecture fantaisiste du cahier des charges qui laisse à croire que la responsabilité de l’atteinte de l’objectif de 75 % est partagée entre toutes les parties-prenantes et n’incombe pas aux seuls titulaires de l’agrément.
Le texte précise pourtant que « la performance de la filière des emballages ménagers est appréciée, dès 2012, de manière consolidée entre tous les titulaires d’un agrément de la filière des emballages ménagers».
Pour le CNR, le verdict est sans appel : en exonérant ainsi Eco-emballages et Adelphe de leur responsabilité «solidaire» dans la réalisation de l’objectif national de recyclage, les pouvoirs publics induisent une modification de la distribution des responsabilités en contradiction avec la réglementation et remettent profondément en cause le rôle dévolu aux sociétés agréées comme émanations des responsables de la mise en marché de produits emballés à destination des ménages.
Poursuivant son raisonnement, le Cercle estime dès lors, que le Ministère vient d’inventer un nouveau concept, à savoir la responsabilité élargie des producteurs sans... responsabilité.
Eco-emballages et Adelphe n’ont pas atteint l’objectif de recyclage qui leur a été assigné et qu’ils s’étaient engagés à atteindre dès 2012. Comme telles, elles doivent être sanctionnées.
Une condition «à charges» pour les collectivités territoriales... La seconde erreur d’appréciation de l’activité d’Eco-emballages trouverait elle aussi, son origine dans une lecture tendancieuse des textes. Le CNR rappelle que le taux de prise en charge à hauteur de 80 % des coûts ne saurait en aucun cas être conditionné à l’atteinte d’un taux de 75 % de recyclage et que d'ailleurs, la loi Grenelle est claire sur ce point puisqu'elle précise bien que le versement des soutiens est un moyen au service de la réalisation de l’objectif de recyclage. Pour mémoire, le Cercle National du Recyclage indique que les collectivités territoriales ne sont pas les prestataires des sociétés agréées et que les sommes perçues de la part de ces dernières sont versées au titre de dédommagement des coûts supportés en lieu et place des producteurs. Et d'insister que un constat jugé inadmissible : la justification de la limitation des versements aux collectivités du fait d’un taux de recyclage de 67 % équivaut à une perte pour les collectivités d’environ 150 M€ et semble entériner, avec la complicité des pouvoirs publics, la volonté des producteurs de limiter leur engagement financier.
La conclusion du CNR ne se fait pas attendre : déchargées des responsabilités qui leur incombent dans la réalisation des objectifs nationaux de la filière des emballages ménagers, Eco-emballages et Adelphe ont beau jeu de proposer à leurs adhérents une baisse des tarifs de contribution... Les discussions sur les futurs agréments continuent et au vu des derniers éléments, le Cercle National du Recyclage souhaite revenir aux fondamentaux du dispositif et exige que le prochain cahier des charges prévoit d’assigner clairement et sans ambigüité un objectif chiffré de recyclage à chaque titulaire de l’agrément et d’assigner tout aussi clairement et sans ambiguïté, un objectif de prise en charge des coûts à chaque titulaire de l’agrément.
Le mot de la fin ne manque pas de clarté : «comme la non atteinte des objectifs génère des économies substantielles pour les metteurs en marché et des coûts importants pour les collectivités et le contribuable, des sanctions proportionnées devront aussi être prévues et infligées»...