Fermentescibles : les Suisses nous mitonnent de la qualité !
Dans un souci de prévention sanitaire, nos voisins helvètes viennent de renforcer les prescriptions relatives à la production d'aliments liquides pour porcs. Ces dernières s'appliqueront désormais aussi aux installations de production de biogaz et de compostage qui utilisent les déchets de cuisine et les restes de repas. Elles entreront en vigueur le 1er avril prochain, avec des délais transitoires pour laisser le temps aux établissements d'adapter leurs structures...
Près de 300 000 tonnes de déchets de cuisine et de restes de repas sont produites chaque année dans les restaurants, le et les cuisines industrielles de Suisse. 200 000 tonnes sont utilisées pour la fabrication d'aliments liquides pour porcs ; une partie toujours plus importante est aussi utilisée dans les installations de production de biogaz et de compostage. Problème : une analyse des risques effectuée par l'Office vétérinaire fédéral a souligné que cette valorisation des déchets comporte un risque sanitaire non négligeable. Et le passé l'a démontré : que ce soit la grande crise de fièvre aphteuse en Grande-Bretagne en 2001 ou les cas de peste porcine en Suisse en 1993, les foyers épizootiques ont tous pour origine des aliments pour porcs mal préparés.
Les dispositions relatives à la production d’aliments liquides pour porcs étaient jusqu’à présent fixées dans l’ordonnance sur les épizooties et dans une directive technique. Elles se trouvent à présent dans l’ordonnance concernant l’élimination des sous-produits animaux, ce qui leur donne un caractère plus contraignant. De plus, ces dispositions de sécurité ont été détaillées et précisées afin de remplir deux objectifs :
d’abord, les déchets de cuisine et de repas non traités ne doivent pas entrer en contact avec les animaux de rente, ce qui implique une séparation stricte des processus de production des aliments avec les exploitations agricoles ;
ensuite, ces déchets doivent être suffisamment chauffés, fermentés ou compostés pour que les agents infectieux soient inactivés, ce qui implique une gestion sans faille des processus de fabrication.
La séparation stricte des processus de fabrication se fait à deux niveaux : d’abord les déchets de repas non traités ne doivent jamais entrer en contact avec le produit fini. De plus, ils ne doivent pas non plus entrer en contact avec les animaux de rente. Pour cela, le déchargement est important : les voies d’accès sont séparées et les déchets sont versés dans un système de conduites fermé menant à la cuve de cuisson. Les personnes travaillant à la fois sur l’installation et dans l’exploitation agricole doivent respecter des mesures de biosécurité strictes afin d’éviter toute contamination.
En plus d’une séparation correcte, le traitement thermique des déchets de cuisine et des restes de repas est un point essentiel : les aliments liquides pour porcs doivent avoir bouilli pendant au moins 20 minutes. Lors de la fermentation ou du compostage, les déchets doivent être chauffés à 70 degrés Celsius (température à coeur) pendant une heure ou fermenter dans un système fermé pendant au moins 24 heures à une température supérieure à 53 degrés Celsius.
Pour certaines exploitations, ces changements impliquent de nouveaux investissements pour garantir le niveau de sécurité exigé. Or, il est possible qu'à moyen terme la production d'aliments liquides pour porcs doive être interdite. En effet, grâce à des accords sanitaires, la Suisse bénéficie d'un commerce facilité avec l'Union Européenne pour les animaux et les produits d'origine animale. Petite zone d'ombre : la production d'aliments liquides pour porcs est interdite dans tous les pays de l'UE depuis l'automne 2006 ; la Suisse serait ainsi un cas à part. C'est pourquoi l'Union doit encore analyser si les prescriptions strictes de nos voisins helvètes offrent le même niveau de sécurité qu'une interdiction.