Emballage : et la brique refait parler d’elle…
En bien ou en mal, l’important est d’en parler nous dirait Talleyrand… Pour l’heure, une étude comparative européenne des différents emballages pour produits alimentaires est de sortie : il en ressort que la brique est un emballage « béton » du côté des moindres émissions de CO2. Cela compense le fait qu’elle reste très difficile (comprenez, aussi, très coûteuse) à recycler…
La performance écologique de l’emballage est devenue un élément clé dans l’évaluation et la prise de décision des responsables politiques, de l’industrie agro-alimentaire, des distributeurs et d’un nombre croissant de consommateurs. Dans cette mesure, on assiste à une multiplication d’études visant à mettre en valeur tel ou tel type d’emballage, afin peut être de susciter l’engouement, pour ne pas dire les faveurs de l’industriel demandeur d’emballage pour conditionner ses produits et du consommateur… Pour autant que ce dernier puisse comprendre ce qu’on nous raconte, tant il est vrai que décortiquer ces travaux n’est pas toujours de tout repos…
A vos marques…
Sur la ligne de départ, les boîtes de conserve (métal), les bocaux (verre), les briques (plastique + carton + alu) et des poches souples (plastique) : l'emballage carton a apparemment déclaré forfait. A l’arrivée, il paraît que « choisir la brique permet d’économiser jusqu’à 60% en émissions de CO2 et en énergie fossile ».
L’étude est récente (mai 2009) et européenne ; conduite par l’Institute for Energy and Environmental Research (IFEU), elle concerne le cycle de vie des emballages destinés à conditionner les aliments à longue durée de vie.
Cette étude a été effectuée en conformité avec les normes internationales ISO pour les analyses de cycle de vie et prend en compte la totalité du cycle de vie de l’emballage.
Michael Hecker, Responsable de la cellule Environnement, Santé & Sécurité chez SIG Combibloc a d’ailleurs expliqué que « notre objectif était de recueillir des informations réellement fondées sur la performance environnementale des emballages les plus fréquemment utilisés sur le marché des aliments ambiants. Au delà de nos briques carton aseptiques et appertisées, l’étude couvre également les boîtes de conserves métalliques, les bocaux ainsi que les poches plastiques ».
Cela étant dit, si l’étude ne manque pas d’intérêt, force est de constater qu’il y a quelques « hic » qui, sans nous mettre en état de choc, pourraient nous faire hoqueter : l’étude considère en effet « le poids global de l’emballage ainsi que le matériau qui le compose comme étant les principaux facteurs explicatifs de l’impact environnemental d’une solution d’emballage pour aliment ambiant, tels que les soupes ou les produits à base de tomate ».
Ce qui peut relativiser les affirmations et confirmations de l’étude, si l'on intègre d’autres types d'emballages et/ou d’aliments. Allez savoir…
De plus, est ce que le consommateur saura ce qu’est un aliment ambiant par rapport à celui qui ne l’est pas : n’est ce pas tiré par les cheveux que de considérer ceci et non cela, pour aboutir à ces constats ?
Pourquoi ne considérer que les bocaux en verre et non les bouteilles qui sont, elles aussi, des emballages parfois destinés aux produits de longue durée : le vin de garde n’en est-il pas une preuve ?
Pourquoi évacuer le paquet de biscuits, drappé dans son emballage carton et qui est, lui aussi, ambiant et très souvent de longue conservation ?
Bref : on ne voudrait pas casser l’ambiance ni la victoire de ces produits alimentaires « ambiants », et encore moins casser la baraque de la brique, mais enfin : ne pourrait-on pas, une fois pour toute, réaliser une étude globale sur les emballages, qui ne soit pas tirée par les cheveux et qui veuillent bien prendre en considération chacun des matériaux et non celui-ci ou détriment de celui là et puis tel autre parce qu’il contient ceci et pas cela ?
- Quid des principaux types d’impacts écologiques… -
Dans le cadre de cette nouvelle analyse de cycle de vie, l’ensemble des facteurs et des procédés qui ont un impact sur l’environnement tout au long du cycle de vie de ces systèmes d’emballage a été examiné et évalué : depuis l’extraction et le traitement des matières premières à la fabrication de l’emballage, du transport et de la distribution sur les points de vente à l’élimination ou au recyclage après utilisation. L’étude a considéré toutes les principales catégories d’impact sur l’environnement liées à la consommation de ressources et à l’émission de substances. En matière de consommation des ressources, l’étude prend en compte l’utilisation de matières premières fossiles, d’énergie primaire et des surfaces terrestres. Pour ce qui est des émissions, ce sont la production de CO2 et le changement climatique induit, les émissions de particules, l’eutrophisation et l’acidification des sols et des cours d’eau qui ont été étudiés. L’émission de CO2 est aujourd’hui considérée comme une problématique environnementale majeure. |
- Le poids et la matière première du conditionnement, des facteurs clés -
Les résultats de l’étude montrent que « le poids global de l’emballage ainsi que les matériaux utilisés sont des facteurs clés qu’il faut prendre en compte dans l’analyse de l’impact environnemental d’un système d’emballage pour aliment ambiant. Ce sont en effet les principaux facteurs qui déterminent l’impact écologique d’une solution d’emballage tout au long de son cycle de vie ». Le document précise aussi que ce sont « les briques carton aseptiques et appertisées qui obtiennent les meilleurs résultats sur l’ensemble des catégories d’impact environnemental (à l’exception de la catégorie « utilisation des ressources naturelles »), en termes de consommation de ressources et d’émissions de substances ». Les observations les plus frappantes sont les bons résultats obtenus dans les catégories relatives à « la consommation de ressources fossiles », « l’utilisation d’énergie primaire » et à « l’émission de CO2 / changement climatique ». L’analyse démontre que dans la catégorie « consommation de ressources fossiles » et « émissions de CO2 », la brique carton impacte jusqu’à 60% moins l’environnement que le reste des emballages étudiés dans le cadre de cette analyse de cycle de vie. Toujours selon l’étude, « ces résultats significatifs trouvent leur explication dans le poids de la brique carton et de l’optimisation des matières premières. Les briques carton utilisent bien moins de ressources fossiles que les boîtes de conserve métalliques, les bocaux ou les poches plastiques car elles sont principalement constituées de carton issu à 70% du bois : une matière première renouvelable »… |
Et pour conclure ce travail, Tim Kirchen, Global Food Manager chez SIG Combibloc affirme que « partout dans le monde, il est essentiel de réduire les émissions de CO2 et d’économiser les ressources fossiles liées à la fabrication d’emballages. Il est par ailleurs essentiel que les choix d’emballage dans l’industrie agro-alimentaire et par la distribution soient basés sur des faits et des analyses concrètes prenant en compte les différents impacts que peut avoir sur l’environnement un emballage tout au long de son cycle de vie».
A ce niveau, difficile de ne pas être d'accord avec lui.
« Ce n’est que de cette façon qu’il est possible de tirer de réelles conclusions quant à la performance écologique de cet emballage. Cette analyse de cycle de vie prouve clairement qu’en matière de respect de l’environnement, la brique carton est la solution d’emballage idéale ».
Idéale…
Vous avez dit idéale,
C’est pas l’idéal, comme formule, surtout si on se veut impartial.
Nous pensions en effet que l’emballage parfait n’était pas de ce monde, que chacun des matériaux avait ses points forts et ses points faibles, en aval comme en amont. Ainsi, il est avéré qu’elle n'est pas facilement recyclable à l’heure de la mise en place d’une Europe du recyclage (voir "Emballages pour liquides alimentaires : de qui se moque-t-on?": si les expériences menées dans le domaine du recyclage forcent le respect, il est tout aussi vrai que pour l’instant, la tonne de brique recyclée coûte « bonbon », ce qui ne facilite pas les débouchés du produit fini. Les difficultés pour trier cet emballage y sont pour beaucoup : avec la superposition d’aluminium, de carton et de PET, la brique alimentaire agace les machines qui ne savent où la dispatcher : vers les cartons, vers l’alu ou vers le plastique, elle « pollue » le gisement des monomatériaux du fait de sa combinaison complexe…
Bref : loin de nous l’idée de nier les qualités de la brique.
De là à la considérer comme emballage idéal, il nous semble que c’est aller un peu loin.
Et je dirai même plus : voilà une formulation qui ne casse pas des briques!!!!