Ecrans plats : DEEE écotaxés, non recyclés
Ecotaxés : parce que c'est la loi. Non recyclés parce la technique n'existe pas. Ce qui fait de la coqueluche des téléspectateurs, un futur DEEE moderne mais non recyclable. Du moins pour le moment. Et paf ! De la question de savoir à quoi sert l'écotaxe...
Qui dit TV, dit aujourd’hui écran plat : de fait, il est quasi impossible de mettre la main sur un écran à tube cathodique, jugé encombrant tout autant que volumineux et lourd. Bref : il s’est littéralement volatilisé et fait place nette à l’écran plat.
« A taille égale, le plasma est, en phase d’utilisation, plus gourmand en énergie que la télévision à tube cathodique. Mais ce n’est pas le cas du LCD, l’écran à cristaux liquides, a expliqué Stéphane Le Pochat, ingénieur au département éco-conception et consommation durable de l’Ademe. Seulement, la mode est au gigantisme. Et l’augmentation de la taille des téléviseurs annihile ce gain en énergie ».
D’ores et déjà et selon une étude menée par des démocrates libéraux Outre-manche, une augmentation de 6 % des ventes (en termes de volume) d’ici à 2010 sera responsable d’une augmentation de 64 % de la demande énergétique du parc national des téléviseurs.
Dans un autre registre, il faut garder à l’esprit que fabriquer un écran plat n’est pas une mince affaire car « a miniaturisation des composants appelle des procédés de plus en plus énergivores. Les matériaux doivent être plus purs, donc nécessitent davantage de traitements chimiques. On travaille à l’échelle moléculaire, dans des atmosphères contrôlées, avec des process très compliqués. C’est bien simple : plus vous êtes petit, plus vous consommez d’énergie, plus vous générez de déchets », complète Stéphane Le Pochat.
Avec la mise en place de la directive RoHs, les constructeurs d’écran n’ont pas coupé à l’obligation d’appliquer cette réglementation sur l’usage de substances toxiques. Ce qui ne règle pas tout pour autant : ainsi, Richard Toffolet, directeur technique chez Eco-systèmes, a expliqué que « pour les LCD, certaines lampes de rétro éclairage utilisent du mercure, un métal dont on sait qu’il est hautement toxique ».
S’il y a tout lieu de penser que les cristaux liquides ne sont pas toxiques, il faut quand même faire avec le fameux principe de précaution : les recherches se poursuivent. Pour les écrans plasma, « le problème vient des poudres électroluminescentes. Si elles ne contiennent pas de cadmium, a priori, elles ne sont pas toxiques. Sinon, il faudrait les retirer. Et ce serait très difficile, parce qu’elles sont encapsulées dans le verre ».
Mais ce n’est pas tout : la coqueluche des téléspectateurs aurait une espérance de vie beaucoup plus courte que le grand père cathodique…
Avec une moyenne de 7 à 8 ans aujourd’hui, l’écran plat a une vie deux fois plus courte. Et ceci pour diverses raisons qui n’ont pas nécessairement liées avec une panne.
Comme c’est le cas dans d’autres domaines (téléphonie, informatique…), chaque année de nouvelles technologies voient le jour ce qui fait que les écrans évoluent à un rythme soutenu poussant le consommateur à investir périodiquement pur ne pas être à la traîne, sans parler de la haute définition et son cortège de nouvelles connectiques.
L’avenir est au beau fixe. En France le SIMAVELEC, Syndicat des industries de matériels audiovisuels électroniques, annonce la vente de 6 millions d’écrans plats en 2008 de type LCD dans 90 % des cas, soit une augmentation de 250 % face à 2006. Et comme il n’y a, à ce jour que 30 % des ménages qui sont équipés… il y a de la marge !!!
Cela étant et quand bien même on n’achète pas un produit en pensant « recyclage », on ne peut évacuer la question (voir Recyclage des téléviseurs : pas de zapping pour les professionnels ). Moderne ou pas, tout appareil TV est DEEE en puissance. La réglementation impose aux constructeurs une prise en charge du recyclage de leurs produits dès lors qu’ils sont mis sur le marché. Et la modernité de ceux-ci ne change rien à cette affaire. L’écotaxe est de mise.
Pour autant, les éco-organismes dédiés au recyclage des DEEE confirment que si le système de collecte a bien été mis en place, le recyclage des écrans plats (en particulier les LCD) est pour l’heure impossible faute de technologie disponible. Saisissant non ?
Pour l’heure, on les démonte et on stocke les dalles. Ce qui n’empêche pas les cerveaux de cogiter la question car le marché va se révéler rapidement énorme. Tout nouveau, tout beau, le gisement est encore faible (50 000 tonnes environ à l’échelle européenne pour 2008). Mais les flux devraient fortement augmenter à l’horizon 2010 pour atteindre les 350 000 tonnes et flirter avec les 1,4 millions de tonnes à l’horizon 2020.
A ce stade, et dans ce cas particulier, on peut donc se demander à quoi sert l’écotaxe. Instaurée au nom de la responsabilité environnementale, payée par chaque citoyen acquéreur d’un futur D3E destiné au recyclage, il semble bien que pour l’heure, elle ne finance que des lieux de stockage. On ne poussera pas le bouchon trop loin pour se poser la question de savoir si les lieux en question sont loués et à quel prix. Mais bon...