Eco-taxe sur le plastique : le Maroc s'y colle
Les dés sont jetés : la loi 22-10 et l’écotaxe sont censées contribuer à une autre structuration du secteur, ceci pour favoriser l’arrivée de nouveaux investisseurs. Cette éco-taxe devrait apporter 240 millions de DH environ, qui seront déversés dans le Fonds national pour la protection et la mise en valeur de l’environnement (FNE). Il faudra attendre encore un peu : le ministère de tutelle devrait déterminer les règles de fonctionnement de ce fonds mais aussi quelles seront les filières concernées par ce financement, courant 2013.
La discussion au Parlement a été animée. Une révolution douce est en effet en train de se mettre en place. Sauf que de très nombreux professionnels ont affirmé haut et fort, que cette éco-taxe est en contradiction avec l’esprit de la loi 22-10, laquelle oblige les industriels à produire des sacs dégradables. Il est rassurant de constater que les contradictions ont cours ailleurs que dans notre pays ; pour faire court, dans l’esprit des professionnels concernés, il n’y a pas à tortiller :
soit ont reformule la taxe écologique, laquelle a clairement pour objet de favoriser l’émergence d’une filière de recyclage des produits plastiques,
soit on abroge la loi sur la production de sacs dégradables.
En d'autres termes, parce que la loi oblige les industriels de la plasturgie à utiliser un additif pour la dégradation des sacs en plastique, tous les produits contenant du plastique destinés au recyclage seraient en quelque sorte «contaminés». D'où le tollé et les récriminations visant l’abrogation de la loi 22-10. En face, le ministère de tutelle par le biais du département du Commerce et de l’Industrie, qui n’est pas de cet avis : « la loi sur les sacs dégradables et l’écotaxe constituent en fait deux instruments complémentaires de la stratégie de développement durable mise en œuvre par le gouvernement».
Et de rappeler que la loi obligeant les producteurs de sacs en plastique à intégrer un adjuvant pour la dégradation a été mise en place à cause des difficultés de récupérer les sacs en plastique faute d’une filière de tri en amont.
Les chiffres sont parlants : d'un côté, 120 000 tonnes de matières premières sont utilisées chaque année pour la fabrication de sacs. De l'autre, force est de constater qu'entre janvier 2011 et octobre 2012, à peine 1 485 tonnes ont été récupérées dans le cadre d’une convention entre les cimentiers et le ministère de l’Environnement. Trop peu pour favoriser un investissement sur ce segment. Quand on saura que «la collecte et l’incinération des sacs en plastique coûtent environ 20.000 DH la tonne! Soit plus que la production de résine vierge elle-même!», aux dires de Hassan Chouaouta, consultant auprès du cabinet Impact Plus, on aura compris le souci. Parce qu'en plus, le prix de la résine s’élève actuellement à 12 000 DH la tonne. Dans ces conditions, on peut peut-être mieux faire que de procéder à l’incinération des sacs en plastique (d'où le choix du gouvernement d'avoir opté pour la dégradation programmée).
Le Maroc consomme en moyenne 500 000 tonnes de matières plastiques par an (environ 24 kg par habitant). De l'avis des experts qui se sont exprimés, la loi 22-10 devrait être maintenue pour encourager les activités de recyclage. Même si ces mêmes spécialistes estiment qu'il faudra clairement déterminer la complémentarité entre cette législation et la nouvelle écotaxe. Gageons que le délai accordé (instauration effective de cette taxe en janvier 2014) permettra de bien préparer les modalités nécessaires à sa bonne application. Tous les secteurs seront à terme concernés : du EEE au textile, en passant par les caisses en plastique; etb donc, il s'agira de correctement définir aussi, la liste des produits figurant dans le tarif douanier, laquelle sera élargie pour intégrer d’autres produits comprenant des matières plastiques. Inutile de souligner que le ministère concerné, le département de l’Environnement, l’Administration des douanes et l'ensemble des professionnels touchés par ces nouvelles mesures auront du pain sur la planche pour arrêter les indispensables nomenclatures...
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source : l'Economiste