Déjections animales : non à la pollution gazeuse !
Les émissions atmosphériques de composés polluants sont de plus en plus souvent au centre des préoccupations environnementales et de nombreux secteurs d’activité sont concernés. L’agriculture est particulièrement visée par le biais de l’ammoniac, du méthane et du protoxyde d’azote, et ce, à travers la gestion des déjections animales...
En effet, les émissions d’ammoniac (NH3) issues de l’activité humaine sont pour l’essentiel d’origine agricole (95%), notamment liées à la gestion des déjections animales. L’ammoniac est un gaz irritant pouvant être incriminé dans l’apparition de certaines maladies chez les éleveurs et les animaux et dans la diminution des performances zootechniques. Les retombées de ce gaz ont diverses conséquences sur les plantes (déséquilibre et fragilisation) et sur les sols (enrichissement en azote, acidification).
Les activités d’élevage, à travers notamment la gestion et le devenir des déjections animales, contribuent aux émissions anthropogéniques des principaux gaz à effet de serre (GES). Depuis le début de l’ère industrielle, les concentrations de méthane (CH4) et de protoxyde d’azote (N2O) ont augmenté de respectivement 145 et 15% dans l’atmosphère...
Différentes techniques de mesure ont été développées au Cemagref (Institut de recherche pour l'ingénierie de l'agriculture et de l'environnement). Chacune étant adaptée à un contexte particulier, selon le produit et les gaz considérés. Parmi ces techniques, on peut citer :
Les "tunnels de ventilation", qui sont utilisés pour la mesure des émissions d’ammoniac après l’épandage des déjections animales. Les mesures effectuées sur le terrain ont montré que, suivant les conditions environnementales (température, vent...) et les caractéristiques du lisier (pH, matières sèches) et du sol, les émissions d’ammoniac s’échelonnent entre 5 et 75% de l’azote ammoniacal épandu.
Les "cloches flottantes", qui sont utilisées pour la mesure des émissions gazeuses (NH3, CH4 et N2O) au cours du stockage et du traitement du lisier (effluent liquide). Parallèlement, l’utilisation de "boîtes d’accumulation" permet la mesure des émissions de CH4 et N2O au cours du stockage des fumiers (déjections solides).
Et aussi la méthode du "gaz traceur", qui est utilisée pour quantifier précisément les émissions de CH4 et N2O issues du stockage des déjections en fosses. Cette technique permet de suivre les flux de ces différents gaz en conditions réelles. La méthode est basée sur le relargage, en continu, d’un gaz traceur (SF6) couplé à une analyse chromatographique en continu du SF6, CH4 et N2O.
Par ailleurs, des pilotes de laboratoire instrumentés permettent d’étudier les procédés de réductions des émissions gazeuses polluantes :
Des expérimentations en laboratoire ont montré une réduction des émissions d'ammoniac supérieure à 95% grâce à une couverture physique de la fosse de stockage (couverture PVC). Quant aux réductions obtenues grâce à l'utilisation d'une couverture absorbante (tourbe, zéolite), elles sont supérieures à 90%. La validation de ces résultats sur le terrain a également permis de mettre en évidence les difficultés techniques liées à l'utilisation de certains matériaux.
L’aération contrôlée du lisier stocké en fosse est une technique qui permet de réduire les émissions de méthane au cours du stockage des lisiers. Des essais en laboratoire ont permis de montrer qu’une aération faible et discontinue entraînait une réduction des émissions de méthane supérieure à 95% au cours du stockage des lisiers de bovins
Enfin, des études menées en collaboration avec l'INRA ont mis en évidence la possibilité de contrôler les émissions gazeuses en modifiant la composition de l'alimentation des animaux. Ainsi, une réduction des émissions d'ammoniac de plus de 60% a été obtenue en abaissant le taux protéique de l'aliment de 20 à 12%, pour des porcs en engraissement. Le maintien des mêmes apports en acides aminés essentiels permet de maintenir les performances zootechniques.
crédits photos : Cemagref