Déchets : un ardent défenseur des PME nous a quitté
Fils d'agriculteurs, il était paysan dans l'âme, au sens le plus noble que l'on puisse donner au terme : pavé de bon sens, il aimait son terroir et n'a eu de cesse d'y travailler, afin de participer à l'économie locale, celle de son pays, la Bretagne. S'il n'a pas eu la chance de fréquenter de grandes écoles qui lui auraient permis d'arborer des diplômes, il n'en était pas moins doué, à plus d'un titre...
Il a commencé à bosser à l'âge de 14 ans, aux champs, naturellement. Il fut ensuite chauffeur dans une coopérative agricole de céréales, fit son service militaire en Allemagne où il animera un club agricole : l'univers associatif est déjà quelque chose qui le branche.
A la suite de quoi, il intègre, en décembre 1971, l'entreprise de Marcel Bureau, dont le métier est de collecter les ordures ménagères à petite échelle ; ce dernier lui proposera le moment venu, de reprendre l'affaire : nous sommes en 1974, et c'est Oui, sans hésitation.
Il devient ainsi « petit patron », accompagné en cela par son épouse Marie Annick, d'une entreprise qui comprend alors, quatre salariés : il respecte les contrats en cours et cherche rapidement à élargir le cercle et son champ d'action, en se rapprochant des collectivités locales. C'est ainsi qu'avec le temps, mais aussi avec détermination et pugnacité, il fera de la « petite boite » qu'il a reprise, une belle entreprise employant pas loin de 300 collaborateurs, qu'il vendra beaucoup plus tard (en 2012) à Sturno, une PME normande... Pas question de lâcher l'affaire à un grand groupe : c'eut été se parjurer ou presque...
Il a beaucoup œuvré au sein des CCI, et sera même trésorier à la chambre de commerce dont son entreprise dépend, mais également Président du club des entreprises du pays de Brocéliande (un club de 22 ans d'âge, à ce jour), tant il aime s'impliquer au delà de sa propre société et porter plusieurs casquettes, ce qui permet comme il le disait volontiers, d'apprendre des autres et de partager avec eux, ce que l'on sait.
Ardent défenseur des entreprises à taille humaine, qui ont vocation à bien mailler le territoire, qui doivent perdurer et conserver leur spécificité (le travail efficace et de proximité), il créé, en 1995, le groupement national des PME du déchet et de l'environnement (une association qui rassemblera bien vite des confrères venant de toute la France, partageant ses vues du métier et de la nécessaire défense acharnée de celui-ci : seules les TPE et PME y sont les bienvenues), une structure qu'il présidera pendant de longues années et dont il aime rappeler à qui veut les entendre, les fondamentaux : « faire comprendre aux collectivités, comme au ministère de l'environnement, qu'il n'y a pas que des grands groupes dans la vie, et qu'il faut compter avec les plus petites entités qui apportent aussi, un service de qualité dans le domaine des déchets ». Quelque temps plus tard, il était heureux de constater que « les collectivités savent qu'elles peuvent nous appeler directement et qu'elles auront une réponse tout de suite (...) Nous, on est des hommes de terrain ; on a commencé derrière les bennes et on sait de quoi on parle»... Il était ainsi, Maurice Théaud : son franc parler ne laissait place à aucune ambiguïté...
Mais sa vraie bête noire n'était pas tant les grands groupes que les banquiers... Un sujet pour lequel il ne manquait pas de verve. Et dans ce registre, il ne mâchait pas ses mots, non plus. C'est vrai qu'en trente ou quarante ans, toutes les entreprises dédiées aux déchets (mais pas seulement) sont passées du travail manuel, au levage automatique, au tri optique, aux engins sophistiqués, pour faire court. Sans compter les normes qui sont nées puis ont évolué, tirant le métier vers le haut et nécessitant des investissements conséquents...
« Dans notre métier, si on n'investit pas, on ne travaille pas : il faut s'adapter en permanence. Or, les banquiers ne jouent pas le jeu, surtout les grosses banques, alors que l'Etat leur a demandé d'aider les PME. On se bat pour maintenir nos marchés et ils ne comprennent pas qu'il nous faut de l'argent pour cela. C'est à se demander si, pour eux, nous n'avons aucune valeur. C'est un scandale »...
Dès lors qu'il a eu vendu sa société, il n'a pas été le dernier à raconter, bien volontiers, que les banquiers, les mêmes, le courtisaient d'importance, afin de lui présenter les derniers produits du marché... Ce qui ne manquait pas de l'amuser.
Alors qu'il dirigerait encore sa société, il sera aussi, élu au Conseil Général de 2001 à 2008.
Puis lors des dernières municipales, élu en qualité d'adjoint de Saint Méen le Grand, et de vice-président de l'intercommunalité de Saint Méen le Grand et de Montauban de Bretagne.
Maurice Théaud aimait profondément sa famille (dont il rappelait régulièrement que « sans elle, il ne serait rien »), même s'il a toujours vécu par, mais aussi pour son entreprise et ses salariés.Travailleur acharné et infatigable, n'hésitant jamais à donner ni un coup de main, ni un point de vue, il savait rire aussi, et ne s'en privait pas : pas une AG présidée par lui, sans qu'elle ne soit ponctuée d'anecdotes, de sourires, voire de fous rires comme le montre la photo ci-contre.
Jusqu'au bout de sa vie, alors qu'il combattait la maladie, il est resté actif...
Un grand monsieur s'est éteint cette semaine ; ses pairs saluent la mémoire d'un homme qui a marqué d'une empreinte indélébile l'univers des petites et moyennes entreprises dédiées aux déchets, qu'il a su rassembler via une cause commune, et qui grâce à sa ténacité, ont cessé de passer inaperçues ou presque.
Ses obsèques seront célébrées lundi 2 mai à 14h30 à l’ Eglise de St Méen Le Grand (35290).
A son épouse Marie-Annick, à ses fils et belles-filles, Fabien et Séverine, Gaëtan et Agnès, Benoît et Aurélie, à ses chers petits enfants Mélissa, Romain, Valentin, Clara, Edwin, Méwen, Mathys et Lucas et à l'ensemble de ses proches, la rédaction présente ses sincères condoléances.