Déchets toxiques : Trafigura fait bonne figure
La société Trafigura qui s’est illustrée il y a trois ans et pendant des mois à l’occasion du scandale des déchets toxiques déversés sans contrefaçon en Côte d’Ivoire aurait négocié avec les victimes et trouvé un arrangement… en monnaie sonnante et trébuchante...
De source judiciaire, on apprend que Greenpeace a saisi la justice néerlandaise, mercredi dernier, pour obtenir que les responsables du déversement de déchets toxiques par le cargo Probo Koala soient poursuivis pour les faits commis en Côte-d'Ivoire.
La cour d'appel de La Haye a, en effet, été saisie par l’association écologiste qui lui demande d'ordonner au parquet d'entamer des poursuites. C’est ce qu’a indiqué à l'AFP un porte-parole de la cour d'appel ; une décision devrait être rendue d'ici un à deux mois…
Pour mémoire, les autorités du port d'Amsterdam n'avaient pas retenu le cargo lors de son passage au cours de l'été 2006. Puis, le déversement des déchets toxiques du Probo Koala en août 2006 à Abidjan avait causé la mort de plusieurs personnes. Et puis, ce jeudi, a été publié un rapport de l'ONU…
Trafigura, le capitaine et la ville d'Amsterdam sont donc poursuivis par la justice néerlandaise pour des infractions à la législation sur les importations et exportations de déchets, pollution maritime et faux en écriture commis aux Pays-Bas. Le procès au fond devrait débuter au cours de l'été 2010.
« Nous avons tenté également d'enquêter sur les faits commis en Côte d'Ivoire, mais ce pays ne nous a jamais transmis les informations que nous lui avons demandées », a déclaré à l'AFP Esther Schreur, porte-parole du parquet. « La Côte d'Ivoire a de toute façon elle-même enquêté sur ces faits », a-t-elle précisé par ailleurs.
Claude Dauphin, patron de Trafigura, la multinationale qui avait affrété le Probo Koala et plusieurs de ses collaborateurs « étaient au courant et impliqués dans le déversement des déchets toxiques », affirme de son côté Greenpeace, dans un communiqué.
En octobre 2008, deux responsables locaux impliqués dans l'affrètement du Probo Koala ont été condamnés à 20 et 5 ans de prison à Abidjan. En février 2007, la Côte d'Ivoire a conclu un accord avec Trafigura, mettant un terme aux poursuites en échange d'un dédommagement de 152 millions d'euros.
Le temps est passé. Mais d’aucuns sont restés mobilisés…
Selon un rapport publié jeudi dernier, le spécialiste de l’Onu sur les déchets toxiques, Okechukwu Ibeanu, détiendrait des «preuves solides» liant le décès des 19 personnes à cette pollution survenue en août 2006.
Cela étant, la multinationale qui a toujours nié en bloc et avec véhémence, dès lors que l’on a tenté de mettre en cause sa responsabilité dans cette affaire, maintient son cap. Même cause, mêmes effets : on ne veut pas entendre parler de ce rapport, dont on rejette les arguments.
Trafigura indique d’ailleurs avoir fait mener début 2009, par des experts indépendants, une série de tests sur plusieurs sites à Abidjan, «qui n’ont permis d’identifier aucun composant issu des ‘’slop’’». A partir de là, CQFD, absence de risques pour la santé en ces lieux. Telle est la conclusion émise par Trafigura, qui rappelons le, était l’affréteur du cargo Probo Koala, dont les résidus toxiques avaient été déversés principalement à Abidjan.
19 morts et quelques milliers d’intoxiqués plus tard, Trafigura avait aussi conclu un accord à l’amiable avec l’Etat Ivoirien, en février 2007, en contrepartie de quoi, la société lui avait versé une indemnisation de 100 milliards de francs Cfa.
Nouveau rebondissement récent : «des négociations survenues entre les victimes de ces produits et l’affréteur du bateau qui les a déversés à Abidjan ont abouti à un accord de dédommagement. Après deux semaines «d’âpres discussions», un accord d’indemnisation a été obtenu entre les victimes représentées par un cabinet d’avocats anglais «Leigh Day £ Co» et ceux de la multinationale, Trafigura.
A la suite de cette négociation, Trafigura a accepté de payer, selon une lettre ‘’confidentielle’’ en date du 8 septembre, adressée aux victimes par ledit cabinet : un total de 30 millions de Livres Sterling (soient 21,2 milliards) seront divisés de manière équitable entre les 30 000 clients qui recevront donc la somme de 750 mille francs Cfa, chacun.
Cette offre évitera certainement un autre procès à la société Trafigura. Pour Martin Day, directeur du cabinet, qui séjourne actuellement à Abidjan, pour «expliquer les détails de la proposition (...), si les victimes acceptent cette offre, ce sera la fin des actions en dommage contre Trafigura». Il conseille d'ailleurs de signer et évoque les lenteurs d'une procédure telle que celle-là : «nous avons certes des chances de le gagner, mais il peut durer des années. Cela ténat, nous pouvons aussi le perdre»... Et d’ajouter, «si vous acceptez cette offre, vous pourrez avoir votre argent d’ici la fin du mois d’octobre». Pour un certains nombre de victimes, «un mauvais arrangement valant mieux qu’un bon procès», elles ont choisi de signer, depuis dimanche, l’offre faite par Trafigura...