Déchets : mauvaise élève, l'Italie est privée de pépettes
L'Italie et ses déchets font une fois de plus la une de l'actualité ; ça n'en finira donc jamais (voir notre dépêche) ??... Le Tribunal de l'Union Européenne vient de confirmer les décisions de la Commission de ne pas verser à cet Etat membre des concours financiers FEDER pour la gestion et l’élimination des déchets en Campanie, l'Italie n'ayant pas adopté toutes les mesures nécessaires à l'élimination des déchets dans la région. "Pour refuser les paiements intermédiaires, il suffit pour la Commission d’établir que l’objet d'une procédure d’infraction est directement lié à celui du financement", précise-t-il. Le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER) vise à promouvoir, en synergie avec les autres Fonds structurels, la cohésion économique et sociale dans l'Union, par la correction des principaux déséquilibres et la participation au développement des régions. Il contribue, entre autres, à la réalisation d'un niveau élevé de protection environnementale...
Dans le cadre du soutien aux interventions structurelles de l'Union en Italie, la Commission a approuvé, en 2000, le Programme Opérationnel Campanie ("PO Campanie"), pour des dépenses effectuées entre le 5 octobre 1999 et le 31 décembre 2008. La mesure contenue dans ledit programme visait plusieurs opérations concernant le système régional de gestion et d’élimination des déchets (réalisation d'installations de compostage, de décharges pour l’élimination des déchets résiduels à la suite de la collecte différenciée, mise en œuvre des zones territoriales optimales et des plans de gestion et de traitement des déchets, soutien aux communes associées pour la gestion de la collecte différenciée des déchets urbains, aide aux entreprises pour l’adaptation des installations de récupération de matières dérivées des déchets, logistique et soutien aux entreprises de collecte et de récupération de déchets de catégories particulières d’activités productives, création d’un cadastre-observatoire pour la surveillance de la qualité et de la quantité des déchets). Les interventions de la région pouraméliorer et promouvoir le système de collecte et d’élimination des déchets ont donné lieu à des dépenses s’élevant à 93 268 731,59 euros, dont 50% (soit 46 634 365,80 euros) ont été cofinancés par les Fonds structurels.
Par ailleurs, dans le cadre d’une procédure d’infraction, la Commission a, en 2007, mis en demeure l'Italie pour ne pas avoir garanti que, dans la région de Campanie, les déchets soient éliminés sans danger pour la santé humaine et sans préjudice pour l’environnement, ainsi que de ne pas avoir créé de réseau intégré et approprié, d’installations d’élimination, en violation de la directive relative aux déchets. En 2010, la Cour de Justice de l'UE a effectivement constaté le manquement de l'Italie qui, n’ayant pas adopté toutes les mesures nécessaires à l'élimination des déchets dans la région de Campanie, avait mis en danger la santé de l'homme et porté préjudice à l'environnement (voir notre article). Entre-temps, la Commission avait informé, en 2008, les autorités italiennes des conséquences sur le financement du PO Campanie qu’elle entendait tirer de la procédure d’infraction en cours, en ce sens qu'elle envisageait de refuser provisoirement le remboursement des dépenses du Programme concernant le système régional de gestion et d’élimination des déchets, qui faisait également l’objet de la procédure d’infraction. Toute demande de paiement pour dépenses relatives au PO, introduite après que l’Italie a contrevenu aux obligations découlant de la directive sur les déchets, qui est entrée en vigueur le 17 mai 2006, serait donc refusée.
Par 2 recours, l'Italie a demandé au Tribunal de l'UE d’annuler les décisions de refus de la Commission, en soutenant que, pour justifier ce refus, l’objet spécifique de la procédure d’infraction devait coïncider précisément avec les "opérations" faisant l’objet de la demande de paiement des financements. Dans un arrêt, le Tribunal, après avoir analysé le libellé et le contexte du règlement, conclut que, pour refuser des paiements intermédiaires du FEDER, il suffit pour la Commission d’établir que l’objet d'une procédure d’infraction en cours est directement lié à la "mesure" dont relèvent les opérations faisant l’objet du financement, la notion de "mesure" ayant une portée plus large que celle de la notion d’"opération". "Par conséquent, la Commission était en droit de fonder les actes attaqués sur le règlement sur les Fonds structurels", indique-t-il.
Le Tribunal constate que le recours en manquement concernait l’ensemble du système de gestion et d’élimination des déchets en Campanie, y compris le manque d’efficacité de la récupération ou valorisation et de la collecte différenciée. Par son arrêt de 2010, la Cour a effectivement constaté que le taux de collecte différenciée en Campanie par rapport aux moyennes nationales et de l'Union était très faible et que les installations existantes et fonctionnelles dans la région étaient loin de couvrir ses besoins réels. Il en résulte que, contrairement à ce qu’a fait valoir l'Italie, l’objet de la procédure d’infraction englobait effectivement la carence de la collecte différenciée en tant qu'élément en amont aggravant les défaillances du système de gestion des déchets dans son ensemble. De même, les interventions décrites dans la mesure 1.7 du PO Campanie incluaient des interventions pour l’établissement d’un système de collecte différenciée des déchets urbains et la réalisation de décharges pour l’élimination des déchets en aval, de sorte que le lien requis entre l’objet de la procédure d’infraction et ladite mesure était présent en l’espèce. "Par conséquent, le Tribunal rejette les recours de l'Italie", conclut la CJUE.