Déchets : l'Europe a encore du pain sur la planche !
Taxes et interdictions de mise en décharge et d'incinération, programmes de responsabilité du producteur et systèmes de tarification sont les outils les plus efficaces pour envoyer les flux de déchets sur des chemins plus "durables" : tels sont les enseignements d'un nouveau rapport de la Commission européenne. Ce dernier indique que si l'UE veut atteindre les objectifs spécifiés dans la "Feuille de route pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources" (c'est-à-dire supprimer totalement la mise en décharge, maximiser le recyclage et la réutilisation des déchets et limiter la récupération d'énergie aux déchets non recyclables - voir notre article), elle devra généraliser ces instruments économiques dans tous les Etats membres...
Concernant les taxes et interdictions de mise en décharge et d'incinération, les résultats de l'étude sont sans équivoque : les taux de mise en décharge et d'incinération ont baissé dans les pays où interdictions ou taxes ont entraîné une augmentation des coûts. "Les systèmes de tarification se sont révélés très efficaces pour prévenir la génération de déchets et encourager les citoyens à participer aux collectes séparées", note également l'étude. Par ailleurs, les programmes de responsabilité des producteurs ont permis à plusieurs Etats membres de collecter et redistribuer les fonds nécessaires à l'amélioration des collectes séparées et du recyclage. "Mais la rentabilité et la transparence varient énormément entre les Etats membres ainsi qu'entre les flux de déchets. Ces systèmes nécessitent donc une planification et un suivi minutieux", précise le rapport.
"Les déchets ont trop de valeur pour être uniquement éliminés. Si cela est géré correctement, cette valeur peut être réinjectée dans l'économie. 6 Etats membres parviennent, à l'heure actuelle, à la suppression presque totale de la mise en décharge et ont un taux de recyclage élevé. Non seulement ces Etats exploitent la valeur des déchets, mais ils ont également créé une industrie prospère et de nombreux emplois. Ce rapport explique comment : grâce à une variété d'instruments économiques, ils ont augmenté l'attrait économique de la prévention, de la réutilisation des déchets et du recyclage. Nous avons la responsabilité, avec les Etats membres et les autorités locales, d'assurer l'utilisation efficace de ces instruments et leur diffusion dans toute l'Union européenne. C'est l'un des objectifs principaux de la 'Feuille de route pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources'", indique Janez Potočnik, membre de la Commission européenne chargé de l’environnement.
En effet, il y a des différences importantes entre les Etats membres en ce qui concerne la gestion des déchets. D'après un rapport publié par Eurostat le 27 mars dernier (voir notre article : Déchets européens : encore trop de mise en décharge), les 6 Etats membres les plus performants (la Belgique, le Danemark, l'Allemagne, l'Autriche, la Suède et les Pays-Bas) mettent en décharge moins de 3% de leurs déchets municipaux. A l'autre extrémité, 9 pays mettent encore en décharge plus de 75% de leurs déchets municipaux. Ces statistiques récentes publiées par Eurostat soulignent les progrès constants réalisés par certains nouveaux Etats membres, où les taux de recyclage augmentent rapidement. La génération des déchets municipaux a également diminué dans plusieurs pays, probablement à cause de la récession économique.
Le rapport (consultable ici, en anglais) conclut qu'il faudra donc nécessairement reproduire et généraliser les instruments économiques cités plus haut dans tous les Etats membres si l'UE veut atteindre les objectifs visés. Entre-temps, la Commission les encourage à mettre en œuvre de façon plus efficace la législation en vigueur en matière de déchets. Pour rappel, leur gestion et l'industrie du recyclage au sein de l'Union ont réalisé un chiffre d'affaires de 145 milliards d'euros en 2008 et représentaient environ 2 millions d'emplois. L'application intégrale de la politique de l'UE en matière de déchets permettrait la création de quelque 400 000 emplois supplémentaires et augmenterait de 42 milliards d'euros le chiffre d'affaires annuel du secteur (voir notre article : Déchets : il faudrait que les législateurs réagissent !...).