Déchets : la future Directive cadre n'est pas d'équerre
Jusqu’à maintenant, la politique « déchets » était l’une des plus dynamiques de l’Union européenne dans le domaine environnemental. Mais hélas… Sous couvert de simplification et malgré l’annonce d’objectifs ambitieux, la proposition de directive du Parlement et du Conseil relative aux déchets du 21 décembre 2005 ne fait pas l'unanimité , notamment du côté des collectivités locales...
Certes, ce changement de cap ne s’affiche pas ouvertement, mais il pourrait se traduire par quelques ambiguïtés susceptibles d’ouvrir les portes aux spécialistes du lobbying qui pourraient se livrer à des interprétations qui ne seraient pas du goût de tout le monde.
Alors que ce texte devait proposer une clarification des textes communautaires, il risque de saper les bases législatives de nombreuses années de politiques européennes et nationales de gestion des déchets.
Du flou dans les définitions
Dès le début du texte, certaines définitions dont celle de valorisation sont plutôt imprécises (« assurer la valorisation des déchets par la réutilisation, le recyclage ou d’autres opérations de valorisation »).
La prévention n’est pas partie intégrante de la gestion des déchets et la définition de la collecte reste incomplète.
De plus, la définition du « producteur » ne concerne plus celui qui met sur le marché le bien destiné à devenir un déchet mais s’applique à celui qui souhaite se débarrasser d’un bien et donc qui créé le déchet.
Une telle conception a deux conséquences :
Le principe de la Responsabilité Elargie du Producteur perd beaucoup de son sens
Cette dilution prévisible de la REP risque de nous priver de tout levier pour stimuler l’éco-conception...
Des objectifs difficilement tenables
Dans son article 5, l’Europe souhaite imposer une valorisation de tous les déchets, ce qui risque de conduire à des absurdités tant environnementales que financières. Il serait peut être préférable de veiller à ce que le maximum de déchets fasse l’objet d’opérations de valorisation.
Le recul du financement
La rédaction de l’article 9 « les Etats membres veillent à ce que les coûts occasionnés par la valorisation ou l’élimination des déchets soient répartis à bon escient entre le détenteur, les détenteurs antérieurs et le producteur » est difficilement acceptable.
Le manque de précision de la notion de producteur et la confusion entre les définitions de producteur et de détenteur ne permet pas de déterminer facilement les rôles respectifs de chacun.
De plus, la formulation imprécise vide de sens le principe de Responsabilité Elargie du Producteur, ainsi que celui de pollueur/payeur.
On assiste là à un retour en arrière par rapport à une responsabilité financière complète du producteur.
Quelle peut être la traduction financière d’une « répartition à bon escient» ?
Il est facile de traduire la « répartition à bon escient des coûts » par le partage des coûts.
Enfin, il est remarquable que la collecte ne soit pas mentionnée. D’où la question de savoir qui la finance ?...
Ne dramatisons pas : ce document n’est, en l’état actuel de choses, qu’à l’état de projet ; les instances européennes doivent encore se prononcer.
Cependant, un certain nombre de collectivités locales sont d’avis de communiquer et d’insister auprès des pouvoirs publics s’agissant de ces éléments.
En clair, il serait nécessaire que l’Etat prenne toutes les initiatives nécessaires et indique le chemin que devrait emprunter la politique « déchets », étant entendu qu’il serait fort dommage de gommer d’un trait de plume, 15 années d’efforts ...