Déchets : il est temps de déprogrammer l’obsolescence !
Le projet de loi 'consommation' est présenté par le Gouvernement comme un moyen de lutter contre les pratiques d’obsolescence programmée. Adopté en première lecture à l’Assemblée nationale et au Sénat, ce texte n’introduit pourtant aucune sanction à l'encontre d'un producteur qui limite la durée de vie de ses produits. De plus, il ne fixe aucune obligation pour les producteurs de fabriquer des pièces détachées, ni pour prolonger la durée de garantie...
"Face à la raréfaction des matières premières naturelles aux préjudices sociaux et écologiques engendrés par cette surexploitation effrénée qui conduit à l’épuisement des réserves, à la spéculation et la hausse des prix qu’elle induit mais aussi aux impacts sanitaires et climatiques de la gestion des déchets des matériels produits, il est indispensable de remettre en question nos modes de production et de consommation", indiquent les Amis de la Terre et le Cniid (Centre national d'information indépendante sur les déchets).
Chaque année, un Français achète plus de 9 équipements électriques et électroniques. Ce rythme de renouvellement, compte tenu de la raréfaction des ressources, contribue à accroître la compétition autour de l’accès aux ressources et l’augmentation inexorable du prix des matières premières, et donc des produits de consommation, qui va in fine peser sur le consommateur. D’autant plus qu’avec la crise économique, les consommateurs ont tendance à privilégier les produits les moins chers. Or, ces produits ne sont pas toujours conçus pour durer (le plastique remplace l’acier), ni pour être réparés (les assemblages collés, moulés ou sertis compromettent toute réparation).
En France, aucune disposition légale n’oblige les producteurs à fabriquer des pièces détachées pendant la durée de commercialisation et encore moins au delà. C’est la liberté commerciale qui s’applique en la matière, ce qui laisse toute latitude aux producteurs de définir la durée de production des pièces détachées. L’absence d’obligation à cet égard contraste avec la priorité donnée au réemploi des produits et à l’objectif d’éco-conception. "Pourtant, la réparation au-delà d’allonger la durée de vie de nos biens, permet de préserver et de créer des emplois locaux, des savoir-faire et des compétences dans notre pays. Le soutien aux acteurs de la réparation est donc une opportunité de maintenir des activités, des services et développer des alternatives dans les territoires", soulignent les Amis de la Terre et le Cniid.
C'est pourquoi les 2 associations portent 3 propositions phares qui sont :
Faciliter le recours à la réparation en informant mieux le consommateur des possibilités de réparations et en soutenant le secteur de la réparation
Le développement du secteur de la réparation est contraint par le manque d’information des consommateurs sur les possibilités de réparation et aussi par l’absence ou le coût des pièces détachées pour réparer les produits tombés en panne, cela n’est pas acceptable. Les constructeurs devraient avoir l’obligation de mettre sur le marché des biens réparables (démontables), proposer des formations aux réparateurs indépendants, approvisionner les pièces détachées des produits mis sur le marché et fournir les notices de réparation.
L’extension de la durée légale de garantie de 2 à 10 ans
Les 2 ans de garantie actuels laissent la possibilité à certains industriels de mettre sur le marché des produits avec une durée de vie limitée, et à certains distributeurs de vendre à prix d’or des extensions de garantie payantes. L’instauration d’une garantie à 10 ans ne mettra donc en péril que le modèle économique de ceux qui continueront d’écouler des produits de mauvaise qualité. L’extension de la garantie à 10 ans est un levier fort pour changer les modes de production et intégrer les critères de durabilité et de réparabilité des produits.
La création d’un délit d’obsolescence programmée
Alors que des cas avérés d’obsolescence programmée sont dénoncés et de plus en plus médiatisés (imprimante qui cesse de fonctionner au bout de 18 000 copies, appareil avec des batteries indémontables dont la durée de vie est donc limitée à celle de sa batterie, etc.), peu de producteurs sont condamnés en France. En plus de la mise en place des actions de groupe, l’inscription de l’obsolescence programmée dans le Code de la Consommation en tant que pratique commerciale trompeuse doit permettre de faire cesser ces pratiques qui contribuent à la surexploitation des ressources naturelles et pèsent sur le budget des ménages.
Les Amis de la Terre et le Cniid appellent les Députés français à "ne pas suivre le diktat des industriels et à ne pas abandonner les consommateurs dans la lutte contre l’obsolescence programmée". Une pétition vient ainsi d'être lancée, afin de "déprogrammer l’obsolescence" ; rendez-vous ici pour plus d'informations. Nous vous renvoyons également à notre article : L'obsolescence programmée sera bientôt "observée"....