Déchets : des sites pollués en Arctique qui inquiètent...
La communauté scientifique s'inquiète de la fonte de la banquise polaire et du dégel du permafrost (ou pergélisol, voir ici), perspective d'autant plus désagréable que les sols et sous-sols de l'Arctique ont été longtemps considérés comme le lieu de stockage et de confinement définitif de déchets miniers, militaires et d'hydrocarbures...
A la fin de l'année 2009, l'association Robin des Bois a publié un inventaire des sites pollués en Arctique ; 2 750 sites ont ainsi été dénombrés. Seules les pollutions chimiques, métalliques et organiques ont été prises en compte et la Russie n'a pas pu fournir des informations précises à ce sujet. Un rapport similaire est en cours sur les sites terrestres et masses d'eau contaminés par la radioactivité émise par des activités industrielles ou militaires au-delà du cercle polaire Arctique. Le volume et les modes de gestion des déchets à Radioactivité Naturelle Renforcée (RNR) sous-produits par les 4 000 puits d'exploitation de gaz et de pétrole dans l'Alaska Arctique sont à ce jour mal connus par les rapporteurs de Robin des Bois. La Norvège vient d'ouvrir un site dédié aux pièces métalliques activées par du radium et retirées des plateformes offshore. Ce stockage est installé au-dessous du cercle polaire Arctique mais il accueillera aussi des déchets en provenance de plateformes exploitées dans l'océan glacial. Dans l'archipel du Spitzberg, les mines de charbon ouvertes en 1906 ont marqué l'environnement avec du potassium 40, de l'uranium 238, et du thorium 232.
Le Canada a exploité dans le Grand Nord des mines d'uranium autour de Port Radium. Une bonne partie des stériles a été immergée dans le Great Bear Lake. Les riverains et le plan d'action fédéral demandent la mise en sécurité du site. A partir de 1942, l'uranium canadien a servi au programme militaire Manhattan aux Etats-Unis. 20 ans plus tard,ces derniers ont installé 2 réacteurs nucléaires en région subarctique ou en Arctique. Le premier en Alaska à Fort Greely a alimenté en électricité une base militaire. Les conditions de démantèlement sont floues. Des transuraniens sont détectés dans l'environnement. Il est possible que les vents, les eaux superficielles et souterraines aient entrainé des contaminants résiduels en Arctique. Le deuxième réacteur nucléaire américain a été installé à proximité de la base aérienne de Thulé au Groenland. Au moins 200 tonnes de déchets liquides auraient été laissés sur place. Les activités militaires américaines ont eu d'autres conséquences radioactives pour le Groenland avec le crash sur la banquise en 1968 d'un bombardier transportant des armes nucléaires. Il y a au moins un kilo de plutonium inégalement réparti dans un rayon de 17 km autour du lieu de l'accident. La radioactivité dans les sédiments marins est nettement au dessus du bruit de fond régional de même que sur les sols terrestres plus éloignés.
Enfin, un autre grand ensemble arctique est contaminé par la radioactivité militaire russe : l'île de Nouvelle-Zemble et ses abords, où 138 essais nucléaires aériens, souterrains et sous-marins ont eu lieu de 1954 à 1990. Si l'on ajoute aux sites terrestres, les sites sous-marins de la mer de Barentz ou de la mer de Kara où des sous-marins atomiques complets, des conteneurs et des fûts de déchets, des cargos chargés de matières radioactives ont été immergés, on réalise que le continent Arctique et l'océan Arctique qui fournit 20 à 30% des ressources alimentaires marines mondiales devra faire l'objet d'un programme renforcé de dépistage de la radioactivité et de restauration des sites contaminés. Des efforts internationaux sont en cours à Mourmansk et dans la baie de Gremikha. Ils sont insuffisants, ils souffrent autant du manque de transparence et de connaissances de la part de tous les acteurs historiques que du manque de financement. L'inventaire des sites pollués radioactifs en Arctique sera publié par Robin des Bois d'ici la fin de l'année.