DDD : des déchets qui risquent de faire grand bruit
La gestion des déchets dangereux diffus, DDD, se présente comme un vaste chantier à commencer par les chiffres destinés à se faire une idée qui sont eux aussi, diffus pour ne pas dire confus. En effet, on passe de données qui établissent la production de ces déchets à 180 000 tonnes annuelles quand d’autres sources les estiment à 800 000 tonnes …
Bon : qu’on se rassure ; ce ne sont pas les techniciens ou les chargés de stat qui se fourvoient ; les comptages sont délicats du seul fait qu’une bonne part des tonnages est traitée via les déchèteries, la Fnade estimant de son côté que les DDD comptent pour 3% environ des déchets traités en France.
La mise en œuvre de la REP étant de mode, on peut se demander comment la mettre en pratique dans ce cas de figure…
Deux assises soutiennent actuellement la mise en oeuvre de la REP : l’engagement 250 du Grenelle et l’article 127 de la loi de finances pour 2009.
Le premier fixait au printemps 2009 la création d’un outil pour la gestion de ces déchets spécifiques. Mais, comme on en a l’habitude, il s’est avéré que les délais étaient impossibles à tenir… Alors, le second a été adopté en décembre 2008 et modifie le Code de l’environnement pour instaurer une Responsabilité Elargie du Producteur pour les «peintures, vernis, solvants, détergents, huiles minérales, pesticides, herbicides, fongicides et autres produits chimiques pouvant représenter un risque significatif pour la santé et l'environnement».
La collecte, puis l’élimination de ces produits et leurs emballages, seront donc très prochainement à la charge technique et financière des personnes (physiques ou morales) qui les ont fabriqués, importés ou introduits sur le marché national, à compter du 1er janvier 2010.
L’article précise d’ailleurs qu’une TGAP sera mise en place à la même date pour les émetteurs qui n’auront pas respecté leur obligation ; il précise aussi que « ces produits doivent faire l'objet d'une signalétique Point rouge afin d'éviter aux usagers de les faire collecter en mélange avec les déchets municipaux résiduels».
Les dés comme les bases sont donc jetés : les modalités d’application seront définies par un décret ultérieur. Le Meeddat se satisfait de cette définition « car elle laisse de la marge de manœuvre pour la rédaction du décret». Au demeurant, cette catégorie de déchet pourrait inclure celle des artisans ou très petites entreprises.
Certains sont partisans d’une organisation des choses au vu des contenances : ainsi, un pot de peinture de moins de 20 litres serait un déchet ménager, mais n’en serait pas un au-dessus de cette contenance. Rien n’est joué ; tout reste à définir et déterminer dans ce domaine.
En effet, les questions en suspens ne manquent pas :
Les huiles bénéficient déjà d’une filière ; faut-il les intégrer ou non à celle des DDD?
Présentant des risques d’explosion, on peut aussi se poser la question de savoir s’il faut inclure les aérosols dans cette vaste famille qu’est celle des DDD? Il est bon de rappeler que pour l'instant, ils sont compris dans la filière Eco-Emballages, ce qui permet d'oublier leur potentielle explosion.
Qu’en est-il des chiffons souillés aux détergents et autres produits assimilables à des DDD?…
Bref : il reste fort à faire ! Ne serait-ce que pour déterminer avec précision ce qui est DDD et ce qui ne l’est pas. Et comme ce n’est pas le rôle des collectivités locales d’en juger, ni même aux fabricants de ces produits de les catégoriser, restera à espérer que des experts qualifiés puissent faire le tri sélectif au sein de ce groupe au demeurant hétérogène…
A la suite de quoi, il se pourrait qu’un nouvel éco-organisme soit mis en chantier dans un proche avenir. Deux études, réalisées pour le compte de l’Ademe, devraient prochainement être rendues publiques.
L’une s’attaque à ce qui se passe chez nos voisins ayant mis en place une collecte des DDD ; la seconde est dédiée aux gisements bien de chez nous. Elle tablerait sur un gisement estimé, de l’ordre de 178 350 tonnes en intégrant les déchets dangereux assimilés des artisans et commerçants mais sans compter les déchets du bâtiment souillés ni ceux pour lesquels il y a déjà une filière (ampoules, huiles moteur, piles et accumulateurs).
A la sempiternelle question du "combien ça coûte", les auteurs de l’étude (le Bipe) estime que si l’on parvenait à collecter et traiter 80% des tonnages cela coûterait entre 157 et 167 millions d’euros suivant les scénarios.
Etant entendu que pour certains produits, comme les acides-bases (hors eau de Javel) ou les fluides de coupe, le coût de la REP compterait pour 10% du coût du produit tandis que pour d’autres, comme les vernis ou colles, il ne serait que de 0,5%... Bref : qu'on se le dise, les travaux n'avancent peut être pas assez vite pour que tout soit bouclé en janvier 2010 comme défini par le Code de l’environnement, mais ils avancent! Le ministère a d'ailleurs pour ambitrion de signer et de publier le décret entre décembre 2009 et février 2010 afin de pouvoir ficeler les arrêtés pour l'été de la même année...