Centre de stockage de GDE : 10 ans de combats et 26 décisions de justice...

Le 21/05/2016 à 15:05  

Centre de stockage de GDE : 10 ans de combats et 26 décisions de justice...

Décision de Justice 30 millions d'euros investis, 3 jours de fonctionnement (avant que les opposants au site n'en barrent les accès, se relayant pendant 346 jours afin qu'aucune activité ne puisse avoir lieu) et depuis, parce que la zone sur laquelle est construite le centre de tri et d’enfouissement des déchets de Guy Dauphin Environnement (GDE) à Nonant-le-Pin (Orne), est jugée inondable par certains et fiables pour d'autres, c'est l'enlisement et un incroyable bras de fer judiciaire, avec moult rebondissements... Le dernier en date concerne la décision de la cour administrative d’appel de Nantes qui, suivant l'avis du rapporteur public, a annulé hier, 20 mai, l'autorisation d'exploiter le site...

 Le centre d’enfouissement de résidus de broyage automobiles du géant du recyclage Guy Dauphin Environnement (GDE) situé à Nonant-le-Pin, dans l'Orne, ne peut être exploité, depuis octobre 2013, parce que bloqué par les « anti-GDE », regroupés en associations (Nonant Environnement et Sauvegarde des terres d’élevage, localement, Zéro Waste France et France Nature Environnement (FNE) pour ce qui est de la représentation associative nationale) : pour les opposants, l'industriel a installé le site sur une nappe phréatique, ce qui constitue un contexte géologique fragile, du fait des risques d'inondations et donc de pollution des eaux , ce que conteste depuis des années le recycleur, faisant valoir qu'une couche d’argile de plus de 100 mètres de profondeur, rend l'installation parfaitement viable et non inondable.

Depuis lors, expertises, contre expertises, procédures au civil, au pénal, et en droit administratif... et un véritable imbroglio judiciaire avec des décisions de justice qui donnent tantôt raison à l'industriel, tantôt à ses opposants (le conseil d’État et la cour de cassation ayant penché en leur faveur), tandis que de nombreux « politiques », députés, président de région, ministre se sont eux aussi, emparés de l'affaire : un médiateur a d'ailleurs été mandaté pour établir un rapport.
Il reste que ce site a engendré une quarantaine de procédures (dont une quinzaine sont encore en cours), ce qui constitue une sorte de record...

 Ce 17 mai, le rapporteur public, qui a estimé un risque de pollution des eaux avéré dans ce dossier, et ce malgré le drain prévu par GDE, rappelant que des déchets « très hétérogènes » (caoutchouc, ferraille, verre…) seront stockés sur le site, établi dans une zone humide soumise à des « risques d’immersion en période de hautes eaux » et donc de « migration des polluants », qui a rappelé la liste de manquements impressionnantes de la part de l'industriel, a préconisé la fermeture du site devant la cour administrative d'appel de Nantes, qui devait examiner l’autorisation d’exploitation délivrée 2011, au spécialiste du recyclage de ferrailles et métaux par le tribunal administratif de Caen (février 2011) et la préfecture de l’Orne (qui avait détaillé  les conditions d’exploitation en juillet 2011).

Côté ministère on a rappelé une situation géologique et hydrogéologique du site « très particulière car située dans une cuvette ». et « des solutions techniques ont été proposées par GDE mais elles ont montré leurs limites ».
Côté associatif, les avocats ont mis l'accent sur la « désinvolture totale » de l’industriel, qui a fait preuve de « dissimulation systématique » dans le cadre de l’instruction de son dossier.
Côté GDE, après que le Directeur général Hugues Moutouh a rappelé le montant de l'investissement (30 millions d’euros) pour la mise en œuvre de ce projet vieux de 10 ans (c'est en effet en 2006 que le recycleur a acheté 50 ha pour implanter son centre de tri et de stockage, qui était sensé réceptionner 150 000 tonnes de déchets par an, pendant 17 ans, soit un total de 2,3 millions de tonnes), mettant en garde les juges nantais contre « l’insécurité juridique » dans laquelle ils pourraient plonger « tous les industriels de France » s'ils en venaient à annuler une autorisation qui a bel et bien été délivrée, on a justifié le choix du site par la voix de maître Harada, qui a sollicité la réouverture de l'instruction sur les base d'un rapport que l'industriel juge favorable
« La cour appréciera si des éléments nouveaux sont de nature à rouvrir l'instruction », a conclu le président, avant d'annoncer que la décision sera rendue vendredi 20 mai, à 14h.

Si les avis des rapporteurs publics sont généralement suivis par les juges, il a fallu néanmoins attendre hier, pour connaître la décision de la cour. Comme l’avait préconisé son rapporteur public, la cour administrative d’appel de Nantes a donné raison aux opposants de l'installation et a pris une décision historique : l'annulation de l’autorisation d’exploiter, qui avait été accordée à GDE, notamment en raison des risques de pollution des eaux. Ce qui constitue la 26ème décision de justice, et non des moindres, concernant cette affaire.
La société GDE a immédiatement fait savoir qu'elle engage un recours en cassation devant le conseil d’État pour demander l’annulation de l’arrêt prononcé ce 20 mai 2016.