Ce n’est pas un emballage, ça y ressemble, et c'est un déchet…

Le 18/02/2014 à 12:57  

Ce n’est pas un emballage, ça y ressemble, et c'est un déchet…

Nespresso recyclage Ce n'est juridiquement pas un déchet d'emballage, mais la « chose » intéresse bigrement l’éco-organisme dédié qui a décidé de payer pour voir... Si dans un premier temps, il y a fort à parier qu'Eco-Emballages ne pouvait s’intéresser à la problématique du petit déchet métallique, avec le temps, la donne a changé au profit de Nespresso qui a su faire comprendre que ce n’est pas parce « qu’on se paie » Clooney (et d’autres grands du cinéma) qu’on joue la comédie lorsqu’on certifie, au siège de l’AMF, se préoccuper des déchets générés par la vente de ses produits… Quand bien même tout cela coûte « bonbon », le déchet d’emballages en aluminium y trouverait globalement son compte : la petite capsule Nespresso, permettrait de mieux trier le reste des déchets en alu (pour autant que le centre de tri soit correctement équipé). C’est ce qui ressortirait des expériences pilotes menées dans les quelques centres de tri qui se sont prêtés au jeu…

L’idée de fond, c’est la mine. Urbaine. Elle est considérée comme une aubaine par les chantres de la REP et de la collecte sélective. Dans le cas qui nous occupe, un partenariat tripartite a été signé pour une durée de trois ans, mercredi 12 février entre le Club de l’emballage léger en aluminium et en acier (Celaa *), Eco-Emballages et l’AMF, Jacques Pélissard, président des Maires de France, n’ayant pas manqué de rappeler, en préambule, que « le modèle français est unique, qu'il a permis de belles performances (...) et qu'en ce qui concerne spécifiquement l'aluminium, la seconde fusion ne consomme que 5% de l'énergie nécessaire pour la production initiale tout en ne générant que 5% d'émissions de gaz à effet de serre par rapport à la production »...

L'alu, on n'est jamais allé à fond dessus
Ce « Projet métal », vise à promouvoir et améliorer la collecte, le tri et le recyclage des petits emballages et objets en aluminium (dont les taux de récupération sont encore trop riquiqui alors que le matériau est recyclable à l’infini).

La faible proportion d’emballages en aluminium au regard de la totalité des emballages mis sur le marché explique une partie du constatBoîtes boissons : 58 000 tonnes sur 4,7 millions de tonnes d’emballages déclarés auprès d’Eco-Emballages, tous matériaux confondus, a fait que l’on ne s’est pas penché dessus en priorité. Mais, comme le rappelait justement Marc Teyssier d’Orfeuil, délégué général du Celaa, « s’il est désormais admis qu’il faut optimiser le recyclage de l’aluminium contenu dans les déchets ménagers, il est tout aussi évident qu’à moins de 100 000 tonnes par an, ça n’intéressait personne, il y a encore 10 ans ». L’idée mise en avant consiste, pour faire court, à aller chercher ce qui manque à genoux (c’est bien évidement une façon de parler, ndlr), par conséquent à re-trier les déchets concernés et à trouver la filière globale dédiée au petit déchet métallique…

 C’est précisément cette faible proportion d'alu dans les déchets d'emballage, qui justifierait le manque d’équipements visant une récupération optimale du métal, dans de nombreux centres de tri, lesquels sont à même de trier les grands emballages rigides en aluminium (canettes, aérosols et autres boîtes de conserves), mais pas ce qui est de taille inférieure à celle d’un pot de yaourt, en version semi-rigide ou souple. Canettes écrasées en version mini, barquettes, couvercles, bouchons, opercules, dosettes de café ou papier aluminium passent allègrement à travers les mailles du filet et sont donc « voués à l’enfouissement ou à l’incinération », indique Marc Teyssier D’Orfeuil, tandis que le sénateur et président du Conseil général du Lot, Gérard Miquel, co-président du Celaa (avec Philippe Vitel, député et conseiller général du Var, ndlr) et fervent défenseur d’Eco-Emballages, précise que « la pyrolyse (une unité dédiée existe en Allemagne), permettant l’élimination des polluants sans altérer la matière métallique récupérée en centre de tri, favorise un recyclage à part entière (…). Les soutiens augmentent si le captage des déchets augmente, rappelle aussi le sénateur ; plus on travaille, plus Eco-Emballages sera à nos côtés »… « L'objectif serait de créer une unité de pyrolyse similaire en France »...

Eric BRac de la PerrièreEtant entendu qu'Eric Brac de la Perrière, directeur général de l'éco-organisme confirme quant à lui « qu'Eco-Emballages est par principe, contre la décharge », considérée comme un moyen évident de « pratiquer le gaspillage de matières premières » qui peuvent connaître une seconde vie plus valorisante. Si l’incinération est associée par le directeur général à un moyen de valoriser les déchets, « elle ne permet pas pour autant de récupérer la matière ». A cela s’ajoute « qu’aller chercher les points manquant pour parvenir aux 75% de taux de recyclage, ce sera nécessairement plus dur que d’avoir pu capter les premiers », rappelle aussi le DG de l'éco-organisme.
De là, déduction logique, on souhaite inverser la tendance, via le partenariat dont il était question le 12 février dernier (Nespresso et le Celaa ayant financé les premières expériences, ils ont besoin de sous et de soutien, pour aller plus loin).

Reste qu’on est en droit de se poser la question de savoir que fait Eco-Emballages dans cette histoire, à partir du moment où les capsules Nespresso usagées, pour ne citer qu’elles, ne sont pas, au regard des textes en vigueur, des déchets d’emballages au sens strict, puisque le contenant et le contenu sont indissociés, tandis que l’éco-organisme ne doit se pencher que sur les déchets d’emballages.
Alors ?Aluminium
Alors, on rappelle que faire maigrir la poubelle est un devoir, que capter la matière qui a une valeur marchande est un objectif incontournable, que la « filière industrielle de recyclage d'aluminium en France manque de matière à recycler » (ça, c’est peut-être pour berner ceux qui ignorent encore, alors qu’ils devraient le savoir, qu’il n’y a pas que les déchets ménagers dans la vie et que les déchets d’alu se trouvent en grandes quantités, avec les tonnages qui vont de pair,  ailleurs, c'est à dire de l’autre côté de la rivière, dans l’univers industriel).

Quand le tout petit sert à mieux harponner le plus gros...
Et l’on finit par nous livrer un élément clé, qui permet évidement de mieux piger, tout en nous rassurant : les juristes oeuvrant pour Eco-Emballages n'ont pas vu d'un mauvais oeil que l'éco-organisme dédié au recyclage des déchets d'emballages se penche financièrement sur le recyclage des dosettes de café usagées en alu quand bien même ce ne sont pas juridiquement des emballages. Au moins ça, c'est dit. Etant entendu que le fin du fin, reste à venir...

Capsules Nespresso Quatre expériences ont eu cours, dans le Var, dans le Lot et dans les Hauts de Seine afin de démontrer « que nous allons dans le bon sens, même si, en effet, les capsules Nespresso usagées, ne constituent pas au vu des textes réglementaires en vigueur, des emballages», confirme Marc Teyssier d’Orfeuil.
L’expérience, lancée en 2009, a maintenant près de 4 ans : les centres de tri qui se sont prêtés au jeu ont été équipés d'une machine à courant de Foucault installée (en complément du tri des emballages rigides de la chaine principale) en bout de chaîne, ce qui favorise un meilleur tri des refus et des fines (ce ne sont pas des indésirables, mais des éléments dont la taille est inférieure à 70 mm et qui ont été éjectés de la chaîne de tri). Ces centres de tri se situent dans les Alpes-Maritimes (Sivades/IHOL à Cannes-la-Brocca), dans le Var (Pizzorno au Muy), dans le Lot (Syded à Catus) et dans les Hauts-de-Seine (Syctom de Paris/Genesis à Nanterre).

« Chaque équipement supplémentaire de cette nature représente un investissement de 100 à 300 000 euros, selon les adaptations nécessaires », indique Éric Brac de la Perrière. Cher? Oui! Mais... tout est relatif, expliquent tour à tour les participants. Ne serait ce que parce que ces équipements auraient permis d’augmenter le taux de captage de l'alu, de + 10% à + 200 %. Ce qui mérite, évidemment, réflexion.
« Si l’investissement se pose là, il peut être facilement amorti sur cinq ans», selon David Vallour, représentant la société Pizzorno, gestionnaire du centre de tri du Muy, qui annonce + 30% de tonnages alu, mais aussi une récupération supplémentaire des déchets en acier. « C’est d’autant moins en enfouissement (il faut compter 120 euros la tonne, dans le Var, fiscalité incluse). Pour nous, l’investissement est payé, d’autant que la demande en alu est actuellement soutenue, que les cours sont favorables, sans compter l’aide versée par Eco-Emballages »…

Le partenariat signé a pour objectif de dupliquer le projet auprès des collectivités locales, des opérateurs, des recycleurs et des associations. Un fonds de soutien accompagnera les collectivités éligibles : le suisse Nespresso, est de la partie en ayant mis en place ce fonds de dotation qui vise à offrir un soutien supplémentaire de 300 euros la tonne triée et valorisée, mais validée par Eco-Emballages, quelle que soit sa qualité et sa teneur en aluminium, explique en substance Arnaud Deschamps, directeur général Nespresso France, qui indique que les  dosettes de café ne sont valorisées (pour l'instant) que par le biais des clients qui ramènent leurs capsules uemballages aluminiumsagées dans les espaces et boutiques de la marque. « Nous avons mis en place notre propre système de collecte des dosettes, mais nous ne pouvons pas obtenir un taux satisfaisant de recyclage sans un travail collectif, d'où notre rapprochement avec Eco-Emballages», complète Arnaud Deschamps, qui ajoute néanmoins que les deux filières vont cohabiter pendant les années qui viennent.

Vous l’aurez compris, « le pré-requis est une massification des tonnages pour que le projet soit rentable », conclut Eric Brac de la Perrière, évoquant les 60 tonnes de déchets métalliques produites par centre de tri et par an, comme donnée de base (sur la durée de l'expérimentation, ce seraient près de 250 tonnes d'emballages métalliques qui auraient échappé à l'élimination, au bénéfice du recyclage). Toujours est-il que l’objectif est par ailleurs affiché : au terme des trois années qui viennent, on escompte la participation de 25 centres de tri sur les 241 que compte notre pays. L'AMF s'engage, de son côté, à encourager ses membres à envoyer leur candidature à Eco-Emballages et à soutenir le renforcement des consignes de tri.
La R&D prendra sans doute le relais pour ces petits flux auxquels ont va demander le maximum. L'idée sera très bientôt de constituer un standard... Mais ceci est une autre histoire...
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(*) : Le Celaa, créé en mai 2009 a pour memebres Alfyma, Ball Packaging, BCME France, France Aluminium Recyclage, Nespresso, Sita, SNFBM et Veolia Propreté.