Carboscories : des déchets de nickel pour stocker le CO2

Le 21/03/2016 à 14:01  
Carboscories : des déchets de nickel pour stocker le CO2
site de stockage des scories de la SLN La production de nickel par pyrométallurgie génère en Nouvelle-Calédonie des déchets, nommés "scories", qui se comptent en millions de tonnes. Ces déchets sont stockés ou réutilisés par exemple pour des remblais. Avec ce gisement de scories quasi inépuisable, l’île dispose ainsi d’une ressource valorisable, dont on sait depuis quelques années qu’elle a la capacité de fixer le CO2

 Un projet réalisé sous l’égide de l’ANR (Agence Nationale de la Recherche) de 2009 à 2012 démontré que non seulement les scories peuvent absorber le CO2, mais que couplée à un procédé innovant dit d’"attrition", cette capacité peut être grandement améliorée.

 Le principe est d’immerger les scories dans une eau à très haute température (180°C) et sous pression (20 bar), contenant du CO2 dissout. Une partie des scories se dissout alors également, les éléments chimiques réagissent entre eux et se transforment en minéraux solides. Le CO2 est ainsi minéralisé. Mais durant cette réaction, les particules réagissent et il peut se former une sorte de gangue qui limite la quantité de CO2 absorbée. En abrasant les scories (le procédé d'attrition) durant la carbonatation, on limite la formation de cette gangue et on optimise le procédé.

 Dans le cadre du projet Carboscories, cette technique a été testée avec succès sur des scories des sociétés SLN (Groupe Eramet) et KNS (Koniambo Nickel SAS). Les essais de carbonatation-attrition ont été effectués dans l’enceinte d’un broyeur à billes agitées en acier, avec l’obtention d’un stockage de CO2 évalué entre 200 kg et 300 kg par tonne de scorie. Plusieurs milliers de tonnes de CO2 par site d’exploitation pourraient ainsi être stockées grâce à ce procédé.

broyeur à billes agitées Les scories sont initialement broyées à une taille inférieure à 100 µm. Les particules qui se forment sont du carbonate de magnésium (MgO.CO2), dont la taille à la sortie du procédé est proche du micromètre. Leurs propriétés physiques permettraient d’envisager une réutilisation notamment pour la production de matériaux de construction. Par ailleurs, pour un gain d’énergie lors de ce procédé, une option permettrait de remplacer les billes d’acier du broyeur par des scories de taille équivalente, et ainsi d’économiser sur la partie broyage.
 A noter : la plupart des expériences ont été effectuées à 180°C, mais des essais à beaucoup plus basse température ont donné des résultats encourageants. Ces tests ont pour l’instant été menés sur des quantités réduites (moins de 50 g) dans des conditions de laboratoire. Il convient maintenant de valider les résultats obtenus en changeant d’échelle grâce à un pilote de démonstration d’une capacité de plusieurs litres.
 Pour information, le projet Carboscories, qui a duré 18 mois, a été mené sur un cofinancement du CNRT "Nickel et son environnement" (un GIE - Groupement d’Intérêt Public) et du BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières). Coordonné par ce dernier, ce projet a été mené en partenariat scientifique avec le LGC de Toulouse (Laboratoire de Génie Chimique) et l’UPMC (Université Pierre et Marie Curie). Les sociétés SLN (Société Le Nickel, Groupe Eramet) et KNS (Koniambo Nickel SAS, dont Glencore est co-actionnaire), toutes 2 membres du CNRT, sont parties prenantes du projet
 
crédits photos : BRGM - LGC