Biomasse-énergie : l'Europe va-t-elle droit dans le mur ?
Les terres agricoles et les forêts seraient-elles menacées par la demande européenne en bioénergies ? C'est ce que tend à démontrer une étude menée par l’Université d’Economie et de Commerce de Vienne pour les Amis de la Terre/Friends of the Earth Europe. Celle-ci soutient qu'une surface de la taille de la Pologne et de la Suède pourrait être nécessaire afin de fournir les plantes et le bois dont les énergies à base de biomasse auront besoin en 2030...
Cette nouvelle étude, intitulée "Brûler la Terre : combien de terres faudra-t-il pour fournir la biomasse destinée à l’énergie ?", révèle l’ampleur du bilan foncier de la biomasse destinée à produire de l’énergie. Elle démontre que la consommation des plantes agricoles et de bois destinés aux transports, au chauffage et à la production d’électricité devrait doubler d’ici 2030 et exercer, sur les forêts et les terres agricoles de la planète, de nouvelles pressions non soutenables et sans comparaison avec celles qu’on a déjà connues. Rien que pour produire le bois destiné au chauffage et à la production d’électricité, il faudrait utiliser presque 40% de l’espace forestier productif de l’Europe, si le bois devait provenir entièrement de l'UE.
"La consommation européenne de terres échappe à tout contrôle depuis trop longtemps. Le recours accru à des plantes agricoles et au bois comme combustibles ou carburant doit doubler dans les 15 années à venir, ce qui menacera les forêts, les communautés rurales et la production alimentaire partout dans le monde. L’appétit insatiable de l’Europe pour toujours plus de terres et de ressources naturelles n’est pas soutenable. Nous devons non seulement plafonner l’utilisation des agrocarburants pour les automobiles, voire les interdire complètement, mais aussi diminuer l’énorme quantité de terres que l’Union Européenne confisque, en mettant en place des objectifs exécutoires qui réduisent la surconsommation", indique Ariadna Rodrigo, Chargée de la campagne sur les ressources des Amis de la Terre Europe.
Ces résultats interviennent alors que la Commission européenne doit publier prochainement une séries de mesures ayant pour but de rendre l’UE plus efficace dans l’utilisation des ressources (le "Paquet Economie circulaire"). Celle-ci s’est engagée, en 2011, à commencer à mesurer et réduire la consommation des ressources naturelles, mais il est à craindre qu’elle n’ignore les terres et l’eau. "Il est catastrophique de brûler des arbres entiers dans des centrales électriques. L’énergie tirée de la biomasse peut jouer un rôle pour diminuer les émissions de GES, mais on doit porter l’accent sur les déchets de matériaux, plutôt que de brûler des arbres et des plantes alimentaires. Les Gouvernements doivent d’abord plafonner puis éliminer les agrocarburants produits à partir de plantes agricoles et s’assurer aussi que la demande en énergie tirée de la biomasse ne provoque pas l’abattage des forêts mondiales", déclare Robbie Blake, Chargé de campagne des Amis de la Terre Europe.
Les Amis de la Terre Europe demandent donc à l’Union Européenne de :
mettre fin à l’utilisation des agrocarburants tirés de plantes agricoles et à la combustion d’arbres entiers pour produire de l’énergie ;
limiter l’utilisation d’énergie tirée de la biomasse à des niveaux soutenables et s’assurer que seules les formes durables d’énergies tirées de la biomasse, et qui réduisent les émissions de GES, sont encouragées dans les politiques d’ici 2030 ;
réduire la consommation de ressources naturelles en mettant en place le calcul des bilans en terres, eau, carbone et matériaux de l’UE, et en introduisant dans le "Paquet Economie circulaire" des objectifs ambitieux de réduction.
Pour plus d'informations et télécharger le rapport "Brûler la Terre : combien de terres faudra-t-il pour fournir la biomasse destinée à l’énergie ?", rendez-vous ici (format PDF, 6,4 Mo).