Automobiles: Le marquage du plastique en vue du démontage
La nouvelle directive européenne sur les VHU rend obligatoire le marquage des pièces plastiques en vue d’une valorisation matière ultérieure. L’objectif visé est de permettre aux acteurs de la filière plastique de démonter puis de trier très aisément les composants en fonction de la nature ou de la famille des polymères.Le service ingénierie recyclage à la Direction de l’Ingénierie des matériaux chez Renault a pour mission de collaborer avec les bureaux d’études afin d’intégrer de plus en plus de nouveaux matériaux (plastiques, composites…) et de favoriser le réemploi du plus grand nombre d’entre eux…En un mot, l’objectif est de tout mettre en œuvre pour que les matières plastiques composant les véhicules soient effectivement récupérables et recyclables demain, lorsque la voiture est devenue VHU.Pierre Valersteinas responsable au sein de ce service fait le point sur le marquage du plastique en vue du démontage. |
Les normes internationales ISO 11469 et ISO 1043 parties 1 et 2 définissent avec précision les modalités de marquage et de repérage des pièces plastiques.
Les normes Renault 00-10-504 et 03-02-002 déclinent au niveau du groupe automobile leur mise en application.Le marquage est un outil indispensable pour le repérage et le tri des polymères principalement si l’on envisage une valorisation matière après extraction. En effet, une erreur de marquage peut conduire à une pollution du gisement pouvant nuire à la qualité des matériaux recyclés issus de la filière recyclage.
En quoi consiste le marquage des plastiques ?
Le principe du marquage s’appuie sur une désignation normalisée des polymères (norme ISO 1043-1) et des charges (norme ISI 1043-2) ainsi que sur une symbolique de marquage consistant à placer la désignation du matériau entre les signes > et <.
Ce marquage se décompose de la manière suivante :
A : désignation normalisée du polymère de base
B : complément précisant la nature du polymère de base
C : séparateur entre les polymères et les charges
D : désignation normalisée des charges ou renforts avec mention de leur état
E : pourcentage de charges ou renforts
Exemples :
Désignation d’un polypropylène non chargé.....<PP>
Désignation d’un polyamide 66 chargé 30% fibres de verre...<PA66-GF30>
La phase dépollution consistant à extraire tous les fluides demande également des actions de marquage plus spécifiques.
Ainsi le réservoir à carburant, les amortisseurs, le bocal de liquide de frein présentent des repères visuels pour indiquer aux recycleurs le point de perçage permettant la récupération maximale des fluides.
Les matières plastiques recyclées sont-elles assujetties aux même règles ?
Il deviendra nécessaire, dans le futur, de repérer les composants obtenus à partir de matières recyclées, ne serait-ce que pour localiser le substances dangereuses incluses lors du processus de recyclage (exemple typique, les bacs de batterie en PP réutilisés sous forme de passage de roue et donc la matière est fortement polluée par le plomb résiduel venant du bain d’électrolyte).
Aujourd’hui la norme ISO 1043 ne prévoit pas de repérage particulier en ce qui concerne les matières recyclées.
Par contre, il existe dans la norme ISO 14021 une proposition de symbole représenté par la « boucle de Möbius » (symbolisant le recyclage) qui accompagné d’un % indique que le matériau concerné par ce symbole est un recyclé à x %.
Les matières renouvelables (ou matières naturelles) sont-elles spécifiquement identifiées ?
En complément à la valorisation des plastiques qui permet une économie des ressources naturelles, l’utilisation des matières dites renouvelables participe également à la réduction de l’utilisation des matières fossiles.
C’est le cas des produits issus du monde végétal (coton, lin, bois, caoutchouc naturel…) ou du monde animal (laine, cuir…).
Ces matériaux font également l’objet d’une identification bien que celle-ci soit plus difficile à normaliser.
Quelles sont les différentes techniques de marquage mises en œuvre ?
L’industrie automobile applique depuis plusieurs années le marquage des pièces plastiques. Les équipementiers sont tenus d’indiquer sur les plans des pièces la zone de marquage ainsi que la codification normalisée.
Généralement, ce marquage est rendu indélébile grâce à la technique de gravage dans le moule. Il accompagne les autres informations relatives à la traçabilité des pièces : dateur, nom du fournisseur, n° pièce…).
Les pièces dont la masse est inférieure à 100 g ou pour lesquelles il est impossible de la réaliser sont exemptées de marquage.
Enfin, pour les pièces de grandes dimensions le marquage peut être répété plusieurs fois.
Quelle est la stratégie mise en œuvre pour favoriser l’éco-conception des pièces plastiques ?
La conception en vue du recyclage prend en compte d’une part la facilité de démontage ou d’extraction de pièces ou produits automobiles et d’autre part la réutilisation de matières recyclées.
Deux stratégies sont actuellement en concurrence pour assurer la valorisation des matières plastiques:
Le démontage des composants avant broyage de la carcasse et leur tri selon la nature des matériaux à l’aide du marquage si une filière de valorisation matière existe
Le broyage direct du véhicule –après dépollution obligatoire- et tri des matériaux post-broyage
Quelle est la politique menée par Renault pour réduire le coût des opérations de démontage et de recyclage ?
L’extraction des grandes pièces plastiques ne peut se concevoir que si l’économie du système génère une valeur positive mesurée sur l’ensemble de la filière.
En effet, l’objectif de valorisation à hauteur de 95% en masse d’un véhicule hors d’usage n’est pas une contrainte technique en soi (il est toujours techniquement possible de « recycler à 100% » un produit) mais devient un obstacle économique si le concepteur n’a pas intégré le coût du démontage dès l’étude avant-projet.
C’est pourquoi Renault a engagé sur ces nouveaux véhicules des actions de conception afin de réduire le coût des opérations de recyclage sur les deux premières phases du traitement en fin de vie (phase de dépollution et phase de démontage) sur les pièces cibles choisies pour leur capacité à être valorisées, par exemples : le bac à batterie, le réservoir à carburant et les contenants de fluides, les boucliers, les mousses de sièges, les pièces d’habillage intérieures.
Pour chaque fonction, l’accessibilité et les modes de fixation sont optimisées afin de réduire le temps de démontage (réduction du nombre de fixation, préconisation de vis ¼ de tour, des plastirivets, suppression du collage pour les revêtements de pièces d’habitacle…).
La capitalisation de ces actions est formalisée dans des cahiers de préconisation destinées aux concepteurs qui, de plus en plus, sont chez les équipementiers.
Envisagez-vous l’utilisation de matières plastiques recyclées dans les nouveaux véhicules ?
Si le législateur a prévu une valorisation matière à hauteur de 85% (à laquelle s’ajoute 10% de valorisation énergétique), il est indispensable de trouver un débouché aux matériaux ainsi extraits du véhicule.
Or, il apparaît peu probable que les autres industries utilisent ces matériaux, non adaptés à leur spécificité.
C’est pourquoi, ils doivent revenir dans le domaine automobile sous forme de matières recyclées et une part significative est introduite dans les nouveaux programmes afin de permettre de boucler le cycle de vie: on introduit 20 kg de matières plastiques recyclées par véhicule depuis janvier 2003.
Les pièces concernées par l’emploi de matières recyclées sont en priorité des fonctions non visibles réalisées à partir de polyoléfines, de polyuréthannes et de fibres naturelles ou synthétiques recyclées : renforts de boucliers, passages de roues, protections sous moteur, pièces cachées de l’habitacle : carter de climatisation, pièces de garnissage revêtues de tissus, isolants phoniques sous tapis, garnissage de coffre, bac de rangement, pièces du compartiment moteur : cache-style, filtre à air…Ultérieurement, et si nécessaire, seront pris en compte des pièces plus sensibles, c’est à dire soumises soit à des contraintes mécaniques, soit à des vieillissements climatiques particuliers.
Actuellement, une quarantaine de pièce sont été choisies représentant une masse de 16 à 20 kg selon la gamme du véhicule.En volume annuel, cette part représente des quantités très importantes puisque les volumes estimés sont de l’ordre de 40 000 tonnes par an en période stabilisée.
D’où la nécessité de trouver des fournisseurs capables de livrer des produits satisfaisant également les spécifications automobiles.Le marché actuel n’est pas en mesure de fournir les besoins estimés notamment dans le domaine du polypropylène, seul polymère à être véritablement intéressant à grande échelle actuellement. Il est donc indispensable d’utiliser le gisement représenté par es VHU, non encore exploité à ce jour (exceptés les bacs à batterie et les boucliers).
Quelle place occupe le tri post-broyage chez Renault ?
Le tri post-broyage n’existe pas de manière industrielle même si des développements sont en cours chez certains industriels. Les questions non encore résolues sont celles de la séparation des matières plastiques et de leur compatibilité chimique en vue d’obtenir des matières recyclées aptes à répondre aux spécifications automobiles.
Les contraintes liées au design, à l’allègement ainsi que l’augmentation des prestations dues au client provoquent une explosion de la diversité des matériaux qui ne milite pas en faveur d’une solution purement tri post-broyage.
En outre, cette dernière solution rendrait caduc le marquage des pièces prévu par le législateur.
Par contre, il n’est pas impossible d’imaginer des traceurs incorporés dans les matières plastiques vierges permettant une identification lors d’un tri après broyage des carcasses automobiles.
Comment imaginez-vous l’avenir du marquage des plastiques ?
La valorisation des plastiques automobiles deviendra à court terme incontournables pour atteindre un taux de valorisation de 95% en masse au véhicule si on estime que les métaux et le verre ne sont pas suffisants pour atteindre –seuls- cette cible.
Pour assurer l’extraction des plastiques, il est nécessaire de reconnaître rapidement et à moindre coût la nature des familles chimiques lors du traitement du VHU grâce au marquage des pièces selon un code international.
L’utilisation accrue de matières recyclées dans l’automobile est la suite logique de cette valorisation.
Dans un premier temps, seront impliquées des fonctions peu sollicitées ou non visibles, puis ultérieurement des pièces plus exposées aux contraintes mécaniques ou de vieillissement.
A plus long terme, il serait souhaitable de trouver les moyens techniques et industriels du tri post-broyage, plus rationnel et économique que la solution précédente.
Enfin, il est indispensable de mettre en œuvre le traitement des VHU pour assurer des gisements de matières recyclées dont l’automobile aura besoin rapidement pour répondre à l’exigence de protection de l’environnement.