Automobile : le CO2 fait du rififi au Sénat !...
Devant la délégation du Sénat pour l’Union Européenne présidée par M. Hubert Haenel, Mme Fabienne Keller (Bas-Rhin - UMP) a récemment présenté un rapport critique sur la proposition de règlement communautaire visant à ramener le seuil d’émission de CO2 des voitures neuves à 130 g/km, contre 160 aujourd’hui. Le seuil est calculé en moyenne pour l’ensemble de l’UE et est ensuite modulé par constructeur, en fonction du poids des voitures. La norme serait assortie de pénalités applicables à partir de 2012...
La proposition est discutable dans son principe, puisque le coût de la pollution est payé lors de l’achat de véhicule et non lors de l’usage du bien, et dans ses modalités, puisqu’elle laisse la possibilité aux constructeurs de se regrouper en formant des alliances de circonstance entre constructeurs de voitures de différentes gammes afin de desserrer les contraintes. La sénatrice regrette que la Commission n’ait pas choisi la solution française du Bonus-Malus (voir notre article) adoptée à la suite du Grenelle de l’Environnement. Une solution simple, claire, comprise par tout le monde, et efficace, puisqu’elle a provoqué une accélération du renouvellement du parc et a eu un effet vertueux dans le choix des modèles (en faveur des petits véhicules les moins polluants).
Un système de "pente de droits d’émission", liant le seuil des rejets d’émissions au poids des voitures, a été préféré au système français. Si ce choix est un geste de consensus compréhensible, en revanche, la pente choisie aujourd’hui est une concession discutable aux constructeurs de voitures les plus puissantes. Le système a ainsi pour effet de ne pas faire payer le gramme de CO2 le même prix selon le poids des voitures. Les constructeurs généralistes se voient appliquer des normes plus rigoureuses, avec des possibilités de répercussion du coût de la technologie sur les prix de vente des voitures beaucoup plus réduites que les constructeurs de voitures puissantes, et des risques de pénalités plus lourdes. Les pénalités sont fondées surtout sur le volume des ventes : un très faible dépassement sur la gamme généraliste entraîne des pénalités beaucoup plus fortes qu’un dépassement majeur sur des voitures puissantes mais au marché réduit.
La sénatrice, qui se définit comme UMP et écologiste, estime que l’Europe ne doit pas renoncer à avoir une politique ambitieuse en matière d’environnement. Pour se faire elle formule 4 propositions :
Au contraire de la proposition actuelle, l’UE doit encourager l’usage de petits véhicules peu polluants et accepter de freiner le marché des voitures puissantes. La sénatrice souhaite que la pente de droits d’émission soit comprise entre 45° (un niveau neutre qui assure la proportionnalité des seuils aux poids des véhicules) et 60°.
L’UE doit renoncer au système d’alliances de circonstances qui permettent aux constructeurs d’échapper en pratique aux normes d’émission.
L’UE devrait aménager le système de pénalités en prévoyant une modulation des peines en fonction de l’importance du dépassement.
L’UE doit aussi se préoccuper des autres sources d’émission du secteur routier, émanant des poids lourds et des véhicules utilitaires légers, dont les émissions de CO2 augmentent beaucoup plus vite que celles des voitures particulières.
Mme Fabienne Keller souhaite également que le gouvernement français, avant l’adoption du règlement, soutienne des positions ambitieuses et cohérentes avec le Grenelle de l’Environnement.