Arcelor-Mittal : la victoire du capitalisme familial
Avec 43% des actions, et une répartition égalitaire avec les représentants d'Arcelor au sein du conseil d'administration de la nouvelle entité Arcelor-Mittal, la famille Mittal est la grande gagnante de cette fusion-absorption qui va donner naissance au premier producteur d'acier au monde (116 millions de tonnes/an, 60 milliards d'euros/an, 320.000 salariés). C'est par contre une défaite cinglante pour l'équipe de direction actuelle d'Arcelor, avec à sa tête Guy Dollé, qui n'a cessé de critiquer et traiter avec mépris et dédain, la réussite industrielle et financière de cette famille indienne....
Les actionnaires ont fait entendre leurs voix et c'est très bien comme cela. Les dirigeants d'Arcelor, Guy Dollé en premier, ont bien essayé d'imposer leurs vues, leur stratégie politique, mais les actionnaires n'ont pas approuvé ses choix. Quand bien même, la famille Mittal a amélioré économiquement les conditions de son opa, il s'agit bien d'un échec retentissant pour les dirigeants successifs d'Arcelor, incapables de rénumérer correctement leurs actionnaires, et de mettre en place un noyau stable d'actionnaires.Or, sans contrôle du capital, la gestion d'une entreprise est tributaire des aléas du marché. C'est pour avoir oublié ce principe de base, que les dirigeants d'Arcelor ont perdu cette bataille boursière. Il est vrai qu'Arcelor est née sur une culture d'entreprises nationalisées, avec à sa tête des grands serviteurs de l'Etat qui ont toujours privilégié l'investissement et l'outil industriel, aux activités commerciales et au profit. Les contribuables ont financé les activités historiques de ce groupe. Mais, en contre partie, ils n'ont guère été remerciés, puisqu'aujourd'hui c'est la famille Mittal qui rafle la mise. Et, encore, les actionnaires doivent remercier la famille Mittal, car sans elle, non seulement la direction d'Arcelor aurait vidé les caisses, mais en plus elle aurait confié au pouvoir politique russe, l'avenir du premier sidérurgiste mondial. Heureusement, Arcelor-Mittal va rester une société régie par les régles économiques du capitalisme. Cela ne peut qu'être favorable à l'évolution du marché de l'acier.
Bien entendu, la stratégie de ce nouvel ensemble et sa direction vont changer. Les actionnaires ont rejeté la vision des dirigeants d'Arcelor du marché de l'acier qui ont toujours considéré qu'il y avait les aciers nobles, le "parfum", et les aciers communs, "l'eau de cologne", et qu'il n'était pas question de comparer ou de marier ce qui n'était pas dans la même catégorie. C'était oublier d'une part que des entrepreneurs comme Lakshmi Mittal ont bâti leur richesse notamment sur la reprise d'usines fabriquant des aciers communs dont les anciens actionnaires voulaient se débarrasser, étant incapables de les gérer correctement. D'autre part, dans le contexte de la mondialisation, le marché de l'acier est tout d'abord un marché de première commodité avant d'être un marché de qualité.
Si les dirigeants d'Arcelor parlent de mariage de raison, c'est tout simplement parce qu'ils n'avaient pas d'autre choix, et qu'ils fallaient bien se rendre à l'évidence, il n'aurait pas été raisonnable d'aller plus en avant contre la volonté des actionnaires. Les dirigeants sont au service des actionnaires et pas l'inverse. Souhaitons, que cela serve d'exemple pour d'autres décideurs qui bien souvent négligent de respecter les actionnaires, mais aussi les salariés, sans faire preuve de modestie à leur propre égard.