Arcelor : les actionnaires pris en otage ?
En proposant aux actionnaires d'Arcelor de voter en faveur d'une reprise des actifs du russe Severstal et en contrepartie limiter la participation d'Alexey Mordashov à 32% pendant 4 ans, les dirigeants d'Arcelor soutiennent qu'il s'agit du meilleur partenaire. Maintenant, il ne faut pas se faire d'illusions, il suffira à Alexey Mordashov d'augmenter de quelques points son pourcentage dans Arcelor pour en devenir le maître. De plus, les actionnaires sont en quelque sorte pris en otage puisqu'il faudrait que 50% des actionnaires votent contre cet accord lors de la prochaine AG. Et, pour pouvoir comparer les alliances industrielles entre Severstal et Mittal Steel, ils manquent d'explications....
Selon les dirigeants d'Arcelor, il est difficile d'apprécier la fiabilité de la situation financière du groupe Mittal. Pourtant ce groupe dont l'action se négocie sur plusieurs marchés boursiers est au même titre qu'Arcelor une société capitaliste qui doit se plier aux exigences boursières tant au niveau des pratiques comptables, financières. N'oublions pas qu'il est solidement implanté aux Etats-Unis. Tel n'est pas le cas de Severstal qui est avant tout un de ces immenses conglomérats russe en relation étroite avec le pouvoir politique : Vladimir Poutine aurait donné son accord à cette opération. (voir rédactionnel du Monde)
Sur le plan industriel et développement durable, Arcelor a mis en avant la qualité technique de ses installations et son positionnement sur les produits plats. Mais, en reprenant les actifs de Severstal il devra gérer des usines conçues du temps du régime communiste qui tant au niveau de la qualité des installations, que du niveau de l'environnement (pollution des hauts-fourneaux) vont nécessiter de très lourds investissements de remise à niveau.
Dans ces conditions, il est bien difficile aux actionnaires d'Arcelor de pourvoir comparer valablement quel est le meilleur partenaire industriel. Pourtant, la direction d'Arcelor risque bien de leur imposer leur choix car pour empêcher que cet accord soit validé, il faudrait que 50% des actionnaires votent contre, et non 50% des votants. C'est pour cela que Mittal parle de manipulation des actionnaires de la part des dirigeants d'Arcelor.
Finalement, ces derniers pourraient se trouver dans l'incapacité de céder au mieux leurs actions : à hauteur de 29,4% du montant de l'offre, Mittal a proposé du cash : 37,74 euros contre 1 action Arcelor. Or, avec l'accord des dirigeants d'Arcelor, ils n'auront pas de porte de sortie. D'ailleurs le cours de l'action Arcelor était en baisse de près de 3% ce vendredi pour se situer à 33€.
Quand bien même les dirigeants d' Arcelor réussiront à éviter la prise de contrôle de Mittal, le groupe pourrait bien sortir cet OPA affaibli sans la même capacité de développement et d'alliances.Et ce sont ses actionnaires qui en seront pour leurs frais.