Angleterre : passage en force de la taxe carbone

Le 05/11/2010 à 12:16  

Angleterre : passage en force de la taxe carbone

Fumées centrales Il y a des pays où l'on tergiverse pendant des mois pour la mettre en place, d'autres où on la repousse carrément aux calendes grecques (lire Taxe carbone: qui, quoi, quand, comment? et CO2: le Conseil constitutionnel carbonise la taxe), mais il y en a où la taxe carbone est tout bonnement imposée, comme en Angleterre. Élu premier ministre en mai dernier, le conservateur David Cameron a déjà fait pas mal de ménage. Récemment, il a annoncé un plan de rigueur drastique visant à économiser près de 95 milliard d'euros afin de réduire le déficit de son pays. Dans un contexte de crise, toute rentrée d'argent est bonne à prendre et l'imposition d'une taxe carbone a donc pris le pas sur la création d'un marché d'émissions de CO2. Ce passage en force surprend.

Cette mesure fait partie du plan de rigueur annoncé par le gouvernement britannique. L'État va conserver les recettes du nouveau système de paiement des droits d'émissions de carbone ou CRC (Carbon Reduction Commitment) alors qu'un procédé de reversement des fonds aux entreprises ayant réduit leurs émissions avaient été prévu initialement. Ce dernier aurait permis de récompenser les plus méritantes et de (mieux) faire passer la pilule d'une contribution économique en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES).

L'État en a décidé autrement. Le CRC est devenu une simple taxe et non plus un marché libre du carbone. Dorénavant, des milliers de commerces et d'entreprises devront payer l'État pour avoir le droit d'émettre du CO2 dans l'atmosphère au-delà d'un certain seuil. Cette mesure devrait principalement toucher les entreprises de taille moyenne, puisque les grandes restent soumis au système de marché du carbone mis en place par l'Union européenne depuis 2005. Ce dernier est tout de même moins contraignant.

Les recette fiscales à la clef seront loin d'être négligeables. En effet, Londres espère récolter la somme de 3,5 milliards de livres (4 milliards d'euros) sur les 4 ans à venir. La nouvelle n'a cependant pas réjoui tout le monde. En particulier les organisations qui défendent le green business, comme le Green Building Council. Il est vrai que le projet de CRC avait été à la base mal accueilli par les entreprises, jugeant le système difficile à mettre en place. Ce nouveau système devrait être plus simple, plus radical. Sur le plan pratique, les recettes prélevées sur les entreprises les plus polluantes seront de 1 milliards de livres en 2014-2015, et le prix du carbone montera de 12 livres la tonne en 2011 à 16 livres la tonne après 2013. Cette taxe, qui s'appliquera à partir de 2012, sera une motivation puissante pour pousser les entreprises à réduire leur consommation d'énergie, notamment en améliorant l'efficacité énergétique de leurs bâtiments.

Le débat sur la taxe carbone mène souvent à de âpres discussions, nous l'avons en France (Taxe carbone : le Sénat ne renonce pas) mais aussi tous les pays industrialisés. Si une loi l'encadre bien et que tous les acteurs jouent le jeu, cette taxe peut avoir de réelles conséquences sur la réduction des émissions de GES. Elle n'est néanmoins par la seule alternative et elle se doit d'être adaptée au contexte économique du pays visé. L'Angleterre a-t-il raison de faire cavalier seul dans cette affaire? L'avenir le dira.