Agrément emballages : le dossier bientôt porté en justice ?
La Commission nationale d'agrément sur les emballages a donné mardi dernier un avis favorable à la demande de ré-agrément des 2 éco-organismes Eco-Emballages et Adelphe. 2 élus, 2 associations de consommateurs et une association de protection de l'environnement ont finalement voté en faveur de cet agrément, donnant ainsi la majorité au vote favorable aux cotés des producteurs d'emballages et leurs filières de recyclage. De leur côté, les opposants fulminent, dénonçant une remise en cause inacceptable du Grenelle Environnement...
Lors du vote, les représentants d'Amorce, du Cercle Nationale du Recyclage (CNR), ainsi que ceux de France Nature Environnement (FNE - voir notre article), des Amis de la Terre et d'Agir pour l'Environnement (APE) se sont opposés à cet agrément tandis que les représentants de Fnade, de Federec, de la Confédération du Logement et du Cadre de Vie (CLCV) et d'UFC-Que Choisir se sont abstenus en indiquant néanmoins leurs nombreux désaccords. A cette occasion, les présidents d'Amorce et du CNR ont expliqué leur vote par le déni de démocratie et de concertation qui a été observé dans le déroulement de cette commission et le non respect de la loi Grenelle.
Sur la forme, il faut rappeler qu'un arrêté ministériel définissant le cahier des charges de l'agrément a été signé par des directeurs de service du ministère en lieu et place des Ministres (et ce en plein remaniement !) et publié au Journal Officiel la veille du vote de ce dernier à la commission d'agrément, sans tenir compte du précédent vote négatif de la commission sur les modalités de financement de la gestion des déchets d'emballages proposé par le Ministère qui définissait une enveloppe théorique de seulement 640 millions d'euros (voir notre article).
Sur le fond, le projet d'agrément d'Eco-Emballages et d'Adelphe ne respecte pas les principales orientations des 2 lois Grenelle en matière de prévention, de recyclage et de financement des déchets d'emballages. En effet, la signalétique indiquant sur les emballages leur recyclabilité, les malus d'éco-contribution pour les emballages non recyclables et non éco-conçus, ainsi que le financement à 80% des coûts optimisés de gestion des déchets par le Point vert ne sont pas respectés alors qu'il s'agissait des 3 principales mesures pour atteindre l'objectif de 75% de recyclage en 2012.
Concernant le financement, le respect du Grenelle aurait dû se traduire par un quasi doublement (780 millions d'Euros en 2012 contre 410 en 2009) de la participation d'Eco-Emballages et d'Adelphe à la gestion des déchets d'emballages afin de financer l'effort de tri des collectivités pour arriver à l'objectif de 75%. Avec une augmentation effective de seulement 25% de ce financement dès 2011 et une augmentation virtuelle de 50 % en 2014 dans le meilleur des cas, c'est donc un des engagements les plus importants du Grenelle qui est ainsi remis en cause, laissant à la charge des contribuables locaux plus de la moitié du coût de la gestion des déchets d'emballages évalué à plus d'un milliard d'euros par an en France. "Pour les collectivités, cette augmentation ne compense en aucun cas l'augmentation de la TGAP décidée au Grenelle, qui a, elle, été appliquée immédiatement, contrairement aux REP sur les déchets dangereux des ménages et sur les déchets de soin, sur les déchets de meubles, ainsi que sur les déchets de construction et du bricolage que nous attendons toujours !", dénonce Amorce dans un communiqué.
Le CNR et Amorce demandent donc à Nathalie Kosciusko-Morizet, Ministre de l'Environnement, de ne pas valider la demande d'agrément d'Eco-Emballages et d'Adelphe en l'état. Ils souhaitent également qu'elle lance un travail de fond pour mettre en place une nouvelle gouvernance de la filière, pour assurer en particulier le respect des procédures de concertation, une représentation supérieure des associations de collectivités, de protection de l'environnement et des consommateurs dans les instances de concertation et de décision, un contrôle beaucoup plus strict, régulier et indépendant des 2 sociétés agréées notamment sur les conditions de contributions aux éco-organismes, ainsi que sur la gestion financière de ces éco-organismes, dont les dérives ont pour l'instant coûté récemment près de 40 millions d'euros, ce qui correspond exactement à la demande d'augmentation minimale de l'enveloppe pour 2011 par les associations d'élus.
Ce vendredi, les 2 associations ont rendu public le vote unanime de leur conseil d'administration respectif pour étudier les conditions d'une action en justice visant à établir la légitimité de ces agréments devant la loi, dans le cas où malgré leurs demandes instantes il serait publié prochainement en l'état.